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Proche-Orient

Veto américain contre une résolution palestinienne

Après deux jours de tractations, les États-Unis ont utilisé leur droit de veto au Conseil de sécurité de l'ONU pour bloquer un projet de résolution d'inspiration palestinienne, qui exigeait qu'Israël renonce à expulser Yasser Arafat. Les pays arabes craignent qu'Israël interprète cette décision comme une carte blanche donnée à sa politique sécuritaire.
De notre correspondant à New York (Nations unies)

Seul mais déterminé, sous les regards de tous les diplomates, l'ambassadeur américain a levé la main. Les États-Unis ont opposé leur droit de véto, à un projet de résolution d'inspiration palestinienne qui exigeait «qu'Israël, la puissance occupante, s'abstienne de procéder à toute déportation et cesse toute menace à la sécurité du Président élu de l'Autorité palestinienne» Yasser Arafat. Le texte réclamait par ailleurs «la cessation complète de tous les actes de violence, y compris tous les actes de terrorisme». Dans ce projet de texte, le Conseil de sécurité exprimait aussi «son appui sans réserve aux initiatives du Quartette» et militait pour la mise en oeuvre de la feuille de route par les deux parties.

Immédiatement après avoir opposé son véto à ce texte, le représentant américain, John Negroponte, a expliqué son geste. «Nous ne soutiendrons aucune résolution qui évite de mentionner la menace explicite posée par le Hamas et d'autres groupes terroristes au processus de paix au Proche-Orient» a-t-il expliqué. Également mal à l'aise, la Grande Bretagne, la Bulgarie et l'Allemagne ont préféré s'abstenir de voter, sur un texte qu'elles jugeaient trop radical. Ces trois États auraient souhaité que les pays du groupe arabe fassent des concessions, pour emporter l'assentiment des États-Unis et préserver l'unité du Conseil de sécurité. Mais les onze autres membres du Conseil, y compris la France, ont estimé que la résolution palestinienne était suffisamment équilibrée. La veille de ce vote, plus d'une quarantaine de pays s'étaient également indignés devant le Conseil de sécurité de la décision israélienne de se débarrasser de Yasser Arafat.

Carte blanche

Si les pays du groupe arabe ont poussé Washington à un veto, c'est parce qu'ils ne croyaient pas à un compromis. Ces deux dernières années, les États-Unis ont utilisé leur droit de veto à trois reprises pour bloquer des résolutions qui auraient pu s'avérer embarrassantes pour Israël. Plutôt que de dénaturer son projet de résolution, le représentant palestinien auprès de l'ONU, Nasser al-Kidwa, a préféré exposer l'isolement diplomatique des États-Unis et de l'Etat hébreu. Mais les pays arabes craignent maintenant qu'Israël considère ce vote comme une carte blanche donnée à sa politique sécuritaire.
«Cette bande de fous qui siègent au gouvernement israélien pourraient maintenant songer à rendre la situation encore plus dangereuse. Il y a un vrai danger qu'ils puissent mal interpréter ce veto, et donc un danger de créer une situation réellement catastrophique» a déclaré Nasser al-Kidwa après le vote. «Nous reviendrons à vous, peut-être dans un futur proche» a-t-il lancé au Conseil de sécurité. «Nous ne nous laisserons pas intimider par ce qui vient de se passer». Il a toutefois remis en cause la possibilité pour les États-Unis de servir d'intermédiaire honnête entre l'Autorité palestinienne et Israël.

De son côté, l'ambassadeur américain à l’ONU a tenu à lever toute ambiguïté. «Le secrétaire d'État Powell a déclaré que les États-Unis ne soutiennent pas l'élimination de M. Arafat, ou son exil forcé. Même si M. Arafat fait partie du problème, nous pensons que ce problème est mieux réglé par un isolement diplomatique», a expliqué John Negroponte. Mais pour les États-Unis, ce veto pourrait avoir de graves conséquences diplomatiques. Depuis plusieurs semaines, Washington essaye de convaincre l'ONU de venir à son aide en Irak. La diplomatie américaine concentre ses efforts sur les pays musulmans, qui pourraient envoyer des troupes en Irak. Des pays qui à n'en pas douter, voient d'un très mauvais oeil ce veto américain.



par Philippe  Bolopion

Article publié le 17/09/2003