Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Géorgie

Chevardnadze jette l’éponge

Edouard Chevardnadze, président de la Géorgie depuis 1995, a donné sa démission dimanche, cédant à la pression de l’opposition et à la médiation russe. Trois semaines de manifestations et 48 heures de mobilisation intense de l’opposition ont mis un terme à une crise politique qui avait pris la forme de chronique d’une fin annoncée.
La situation s’est brusquement accélérée, dimanche après-midi à Tbilissi, quand le leader de l’opposition, Mikhaïl Saakachvili, a lancé un ultimatum au président Chevardnadze, retranché depuis la veille à quelques kilomètres de la capitale. Tout au long de la journée, le médiateur russe, le ministre des Affaires étrangères Igor Ivanov, avait rencontré, tour à tour, les responsables de l’opposition et le président Chevardnadze. A ce moment là, l’opposition se disait prête à un règlement négocié de la sortie de crise, causée par la contestation des élections législatives du 2 novembre.

Mais de la résidence où il s’était réfugié, après avoir été chassé par la foule du parlement, samedi, le président Chevardnadze démettait de ses fonctions le secrétaire du Conseil de sécurité nationale, qui avait reconnu des fraudes aux élections, lui nommait un successeur et engageait les manifestants à quitter les centres névralgiques du pouvoir qu’ils occupaient, avant l’entrée en vigueur de l’état d’urgence.

De leur côté, les opposants recevaient un nombre de plus en plus important de soutiens dont le ministre de la Justice, les troupes du ministère de l’Intérieur, la police de la capitale et, selon le leader de l’opposition Saakachvili, presque tous les ministres. Fort de ces ralliements et du mouvement populaire qui ne faiblissait pas, dans la rue, pour exiger la démission de Chevardnadze, Saakachvili a donc pris l’initiative de donner une heure au président pour s’en aller. «Le président se moque de nous, il est déjà trop tard pour parler de négociation», déclarait-il. Un seul thème restait, selon lui, en discussion : la garantie de sécurité pour que le président déchu quitte le pays. Il appelait la foule à marcher sur la résidence d’Edouard Chevardnadze, comme, la veille, sur le parlement et la présidence.

Finalement, une rencontre «tripartite» a eu lieu entre le président Chevardnadze, l’opposition représentée par Mikhaïl Saakachvili et Zourab Jvania et Igor Ivanov. Celui-ci, premier sorti, a annoncé la fin de sa mission de médiation, laissant les responsables géorgiens entre eux. Les jeux semblaient faits quand une télévision locale a fait savoir que l’avion présidentiel de Chevardnadze était prêt, sur le tarmac de l’aéroport de Tbilissi. Effectivement, peu après, le président annonçait officiellement sa démission.

Une élection présidentielle dans 45 jours

Le président déchu est remplacé, au milieu des manifestations de liesse populaire, par la dirigeante de l’opposition Nino Bourdjanadze, désignée président par interim dès samedi par les forces d’opposition. Son mandat devrait couvrir la période transitoire jusqu’à l’élection présidentielle, qui, aux termes de la constitution, doit être organisée dans un délai de 45 jours après la démission du président Edouard Chevardnadze.

Agé de 75 ans, né en Géorgie, Edouard Chevardnadze est entré à l'âge de 20 ans au Parti communiste. En 1972, il accède au poste de Premier secrétaire du parti en Géorgie. En 1985, il est appelé à Moscou par Mikhaïl Gorbatchev qui lance la Perestroïka et fait de lui son ministre des Affaires étrangères. On se souviendra de luio, à cette époque, comme l'un des artisans du désarmement et de la fin de la Guerre froide. En 1990, il démissionne de ces fonctions et, un an plus tard, se produit l'explosion de l'URSS.

Edouard Chevardnadze revient «au pays». En mars 1992, il est président du Conseil de sécurité d’une république désormais indépendante qui sombre dans la guerre civile. Dans cette période troublée il fait figure de dernier recours. Il est élu à la présidence en novembre 1995 avec près de 75% des voix, et réélu en avril 2000 avec près de 80% des suffrages. En principe, il devait quitter le pouvoir en 2005, la Constitution ne prévoyant que deux mandats présidentiels successifs.

A écouter également :

Mikhaïl Saakachvili, l'un des chefs de l'opposition georgienne au micro de Dominique De Courcelles (24/11/2003).

Gorgadzé Thornike, spécialiste du Caucase
Invité de Frédérique Genot (24/11/2003).

Portraits croisés de Nino Bourdjanadze, présidente par intérim et de Mikhaïl Saakachvili, leader du Mouvement national, Maya Siblini (23/11/2003)

A lire également :

Une «révolution de velours» très canalisée
L'édito international de Richard Labévière (24/11/2003).



par Francine  Quentin

Article publié le 23/11/2003