Social
Service minimum : faut-il légiférer ?
L’instauration d’un service minimum en cas de grève dans les services publics soulève, en France, une controverse. Le débat qui se tient mardi à l'Assemblée nationale ne porte même pas encore sur la définition de ce service garanti aux usagers ni son application, mais sur l’opportunité de recourir à la loi pour l’établir. Dans d’autres pays européens la question est tranchée depuis longtemps.
Jacques Chirac l’avait promis pendant la campagne électorale pour l’élection présidentielle en 2002. Le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, l’a inscrit à son programme politique : l’instauration d’un service minimum en cas de grève dans les services publics, notamment les transports, revient d’actualité à quelques mois des élections régionales. Plus de trois français sur quatre, selon les sondages, y sont favorables, sept propositions de loi ont été déposées dans ce sens au cours des deux dernières années. Pourtant, la question fait encore débat et au volontarisme politique de certains parlementaires de la majorité présidentielle s’oppose la prudence du ministre des Transports, Gilles de Robien.
Celui-ci semble penser que ce ne serait pas défendre les droits des usagers que de leur imposer un conflit social dur dans les transports, à l’appel de syndicats qui seraient prêts à défendre, par la grève, le droit de grève. Gilles de Robien préfère donc axer ses efforts sur les procédures de prévention des conflits et juge qu’il est urgent d’attendre, remettant à 2004 la création d’une mission d’expertise chargée de faire des propositions.
Effectivement, les organisations syndicales voient d’un mauvais œil ce qu’elles considèrent comme une atteinte au droit de grève, inscrit dans la constitution. Un «passage en force», par la voie législative, serait mal perçu. Les syndicats souhaitent un renforcement du dialogue social et l’émergence de solution internes à chaque service public. La procédure d’alarme sociale mise en place à la RATP (transports publics en région parisienne) a permis de réduire sensiblement le nombre de conflits dans le métro et les bus.
Telle n’est pas l’opinion de Christian Blanc, député UDF et ancien président de la RATP puis de la compagnie Air France. Pour lui «on ne peut pas aboutir à un résultat par la négociation avec les syndicats» et il a déposé une proposition de loi instaurant un service minimum, position qu’il défendra la semaine prochaine lors d’un débat à l’Assemblée nationale sur les services publics de transports.
Droit de grève, droits des usagers
Le débat qui se déroule en France apparaîtrait bizarre à bien d’autres pays européens qui ont déjà réglé le problème sans déclencher de guerre sociale pour autant. Le député UMP Robert Lecou vient de rendre un rapport consacré au service minimum dans les services publics en Europe dont il ressort que sept parmi les quinze membres actuels de l’union européenne prévoient un service minimum dans les services publics de même que dans la moitié des futurs membres de la communauté. La définition des services publics indispensables varie selon les pays qui ont instauré des règles de service minimum.
En Italie, les services publics indispensables sont largement définis, santé transports, justice, éducation, mais c’est une commission indépendante qui arbitre entre gouvernement et partenaires sociaux. L’Espagne aussi prévoit les secteurs essentiels au bon fonctionnement du pays et les modalités du service minimum. Portugal, Grèce, Belgique, Suède et Finlande ont adopté des recettes variées pour préserver à la fois le droit de grève et celui des usagers.
D’autres pays européens ne disposent pas de réglementation particulière sur le service minimum. Mais, relève le député français, ce sont généralement des pays qui ont une culture du dialogue social qui les met globalement à l’abri des conflits sociaux très importants. L’Allemagne, la Hongrie, l’Autriche ou le Danemark appartiennent à cette catégorie. Et, au regard de ces deux groupes de pays, la France, selon Robert Lecou, est un «cas particulier» car elle ne prévoit pas de service minimum ni de continuité des services publics, tout en présentant la situation de conflits sociaux nombreux dans le secteur public. Une «exception culturelle française» de plus.
Ecouter également:
Robert Lecou, député UMP est l'Invité matin du 9 décembre 2003. Il a été l'auteur d'un rapport sur le service minimum en Europe. Il répond aux questions de Pierre Ganz (9 déc. 2003, 7'40'').
Dominique Baillard, journaliste à RFI est l'Invitée de la rédaction du 9 décembre 2003. Elle analyse le dossier du service minimum au micro de Philippe Lecaplain (9 déc. 2003, 4'50'').
Celui-ci semble penser que ce ne serait pas défendre les droits des usagers que de leur imposer un conflit social dur dans les transports, à l’appel de syndicats qui seraient prêts à défendre, par la grève, le droit de grève. Gilles de Robien préfère donc axer ses efforts sur les procédures de prévention des conflits et juge qu’il est urgent d’attendre, remettant à 2004 la création d’une mission d’expertise chargée de faire des propositions.
Effectivement, les organisations syndicales voient d’un mauvais œil ce qu’elles considèrent comme une atteinte au droit de grève, inscrit dans la constitution. Un «passage en force», par la voie législative, serait mal perçu. Les syndicats souhaitent un renforcement du dialogue social et l’émergence de solution internes à chaque service public. La procédure d’alarme sociale mise en place à la RATP (transports publics en région parisienne) a permis de réduire sensiblement le nombre de conflits dans le métro et les bus.
Telle n’est pas l’opinion de Christian Blanc, député UDF et ancien président de la RATP puis de la compagnie Air France. Pour lui «on ne peut pas aboutir à un résultat par la négociation avec les syndicats» et il a déposé une proposition de loi instaurant un service minimum, position qu’il défendra la semaine prochaine lors d’un débat à l’Assemblée nationale sur les services publics de transports.
Droit de grève, droits des usagers
Le débat qui se déroule en France apparaîtrait bizarre à bien d’autres pays européens qui ont déjà réglé le problème sans déclencher de guerre sociale pour autant. Le député UMP Robert Lecou vient de rendre un rapport consacré au service minimum dans les services publics en Europe dont il ressort que sept parmi les quinze membres actuels de l’union européenne prévoient un service minimum dans les services publics de même que dans la moitié des futurs membres de la communauté. La définition des services publics indispensables varie selon les pays qui ont instauré des règles de service minimum.
En Italie, les services publics indispensables sont largement définis, santé transports, justice, éducation, mais c’est une commission indépendante qui arbitre entre gouvernement et partenaires sociaux. L’Espagne aussi prévoit les secteurs essentiels au bon fonctionnement du pays et les modalités du service minimum. Portugal, Grèce, Belgique, Suède et Finlande ont adopté des recettes variées pour préserver à la fois le droit de grève et celui des usagers.
D’autres pays européens ne disposent pas de réglementation particulière sur le service minimum. Mais, relève le député français, ce sont généralement des pays qui ont une culture du dialogue social qui les met globalement à l’abri des conflits sociaux très importants. L’Allemagne, la Hongrie, l’Autriche ou le Danemark appartiennent à cette catégorie. Et, au regard de ces deux groupes de pays, la France, selon Robert Lecou, est un «cas particulier» car elle ne prévoit pas de service minimum ni de continuité des services publics, tout en présentant la situation de conflits sociaux nombreux dans le secteur public. Une «exception culturelle française» de plus.
Ecouter également:
Robert Lecou, député UMP est l'Invité matin du 9 décembre 2003. Il a été l'auteur d'un rapport sur le service minimum en Europe. Il répond aux questions de Pierre Ganz (9 déc. 2003, 7'40'').
Dominique Baillard, journaliste à RFI est l'Invitée de la rédaction du 9 décembre 2003. Elle analyse le dossier du service minimum au micro de Philippe Lecaplain (9 déc. 2003, 4'50'').
par Francine Quentin
Article publié le 09/12/2003