Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Social

La CFDT dans la tempête

A une courte majorité, les cheminots CFDT ont décidé de quitter la confédération syndicale de François Chérèque, en désaccord avec la direction sur la réforme des retraites. Cette crise ouverte ne saurait faire oublier les turbulences plus profondes à la CFDT, dont plusieurs milliers d’adhérents ont déjà claqué la porte.
Le feu couvait depuis longtemps à la CFDT où la stratégie de «recentrage» et l’option résolument réformiste passaient, dans certains secteurs, de plus en plus difficilement auprès des militants. Déjà, en 1995, le vaisseau de la CFDT avait tangué lorsque la direction de la confédération syndicale avait pris position en faveur de la réforme de la protection sociale proposée par le Premier ministre Alain Juppé qui remettait en cause la retraite dans le secteur public. Les militants CFDT n’avaient pas été les derniers, loin sans faut, dans le gigantesque mouvement de grève qui avait paralysé les transports, et par voie de conséquence le pays tout entier, durant le mois de décembre. Nicole Notat, secrétaire générale de la confédération avait eu bien du mal à redresser la barre.

Depuis, la fracture entre une «tête» de l’organisation, partenaire privilégié du gouvernement et du patronat, et une «base» radicalisée face aux projets de réforme sociale du gouvernement n’a cessé de se creuser. François Chérèque semble bien avoir fait déborder le vase en signant, seul contre les autres syndicats, le projet de réforme de la retraite.

Les cheminots CFDT ont donc décidé, le 6 novembre, à une courte majorité de 50,1% contre 49,8% de quitter la confédération. Les dirigeants de l’ex-syndicat CFDT des cheminots donnent l’exemple en rejoignant l’organisation longtemps rivale, la CGT. Toutefois, selon les analystes, une partie des adhérents pourrait aussi aller grossir les rangs du syndicat Sud-rail, proche de l’extrême gauche. Il est probable aussi que des militants, découragés, vont quitter l’action syndicale.

La représentativité en question

Les minoritaires qui restent à la CFDT ne vont pas manquer de travail pour se réorganiser et panser les plaies, avant les élections professionnelles qui auront lieu en mars 2004. A la SNCF cette situation nouvelle pourrait changer la donne : la CGT déjà en tête devrait encore creuser l’écart avec le deuxième syndicat, logiquement SUD-rail, pour la première fois devant la CFDT dans cette entreprise publique.

D’autant que l’hémorragie ne concerne pas que les cheminots CFDT. L’opposition interne à la politique confédérale de François Chérèque grandit et ses partisans font état de milliers de départs à la Poste, à Electricité de France, dans les secteurs de l’éducation et de la santé. L’attitude de la confédération est jugée trop ouverte aux projets gouvernementaux à venir de réforme de la sécurité sociale ou d’orientation de l’éducation nationale.

A terme cette situation peut affaiblir la CFDT au moment où le ministre du Travail, François Fillon, modifie les conditions de validité de la signature d’accords dans les entreprises. Jusqu’à présent un accord est valable dès lors qu’il est signé par une organisation syndicale représentative. Dans l’avenir cet accord pourrait être remis en cause par les autres syndicats s’ils représentent la majorité des salariés. Cette représentativité des syndicats est mesurée périodiquement par les résultats des élections professionnelles.. Les dernières élections prud’homales en décembre 2002 donnaient 32% des suffrages des salariés à la CGT, 25% à la CFDT, 18% à Force ouvrière, pour les trois principales organisations.

Le secrétaire général de la CFDT minimise les conséquences de la scission des cheminots. Dans un entretien au quotidien France-Soir il affirme que les opposants à la réforme du régime de retraite étaient de toutes façons en désaccords avec toutes les orientations de la CFDT depuis 20 ans. Il évalue de 6 000 à 9 000 les départs sur près de 900 000 adhérents revendiqués. Bien au contraire, François Chérèque maintient son objectif d’un million d’adhérents en 2007.



par Francine  Quentin

Article publié le 06/11/2003