Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Social

Intermittents : un conflit peut en cacher un autre

Les améliorations à l’accord du 27 juin sur l’indemnisation des intermittents du spectacle n’ont pas modifié les points de vue. La CGT, majoritaire dans le secteur, et FO maintiennent leur opposition à la réforme et les annulations de festivals se multiplient. Venant après le conflit récent sur les retraites le mouvement des intermittents prend un tour de plus en plus politique.
Francofolies de La Rochelle : annulées. Festivals de Pau, de Grenoble et de Rennes : annulés. A Avignon la confusion règne entre les compagnies en grève, celles qui ont décidé de jouer et celles qui restent encore dans l’expectative. Ce festival, le plus important de France, et celui d’Aix-en-Provence étaient, mercredi, en grand danger de ne pas se tenir. C’est le résultat de l’échec de la rencontre de la dernière chance entre patronat et syndicats, mardi soir.

Les partenaires sociaux, Medef et organisations syndicales, n’ont en effet pas modifié leur position et les améliorations apportées à la réforme du régime d’indemnisation du chômage des intermittents du spectacle, à la demande pressante du ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon, n’a pas levé l’opposition des syndicats CGT et FO. Les signataires de l’accord du 27 juin, CFDT, CGC et CFTC ont entériné le report à 2004 et l’application progressive de l’entrée en vigueur de la réforme. Désormais chacun se renvoie la responsabilité de la poursuite du conflit.

Jean-Jacques Aillagon, annonçant que le gouvernement lance la procédure d’agrément de l’accord, en l’état, a dénoncé le mauvais coup porté à la culture et qualifié le mouvement d’irresponsable. Le ministre de la Culture se fixe néanmoins deux priorités : la «lutte féroce» contre les abus mis en lumière pendant ce conflit dans l’attribution du statut d’intermittent du spectacle, et la mise en place d’un plan de soutien au spectacle vivant, théâtre, danse, musique et cirque. De son côté, la CGT juge que le ministre est «ficelé» par le Medef (patronat) et veut passer en force contre l’avis des professionnels du spectacle, portant ainsi la responsabilité du durcissement du conflit.

Champ clos intersyndical

Mais, au-delà du problème de l’indemnisation des 95 000 intermittents du spectacle, le conflit qui domine l’actualité sociale de la France en ce début des vacances d’été prend une ampleur qui le dépasse largement et une tonalité de plus en plus politique. C’est le ministre de la Culture qui, le premier, a brisé le non-dit en affirmant que le mouvement en cours est un «champ clos où un syndicat qui n’a pas signé l’accord essaie de faire mordre la poussière à un syndicat qui l’a signé». Pas besoin d’être devin pour reconnaître la CGT, non-signataire de l’accord sur les intermittents et non-signataire de celui sur la réforme des retraites face à la CFDT favorable dans les deux cas aux réformes proposées par le Medef, sur l’assurance-chômage, et le gouvernement, sur les retraites.

Le conflit paralysant les festivals ne serait donc que la poursuite du combat intersyndical sur la réforme des retraites. Le ministre est même allé plus loin encore en désignant des «groupes organisés qui n’ont rien à voir avec le secteur et essaient de trouver prétexte à manifestation, voire à agitation». Jusqu’à présent le gouvernement a laissé au ministre de la Culture le soin de gérer le conflit, mais, devant le blocage de la situation, des voix s’élèvent pour demander un arbitrage. Jack Lang, ancien ministre socialiste de la Culture, a lancé un appel au président de la République afin qu’il «sauve les festivals et la vie artistique de ce pays» rappelant que Jacques Chirac s’est souvent prononcé en faveur de la préservation de l’exception culturelle française, dont le régime des intermittents du spectacle est, selon lui, un des aspects. Quant à François Bayrou, président de l’UDF, il invite le gouvernement à intervenir pour rapprocher les points de vue et «recoller les morceaux».



par Francine  Quentin

Article publié le 09/07/2003