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Bush déterminé à rester en Irak pour <i>«changer le monde»</i>

George W. Bush est apparu plus déterminé que jamais à poursuivre son engagement en Irak jusqu'à la date de transfert du pouvoir aux Irakiens le 30 juin prochain. 

		Photo : AFP
George W. Bush est apparu plus déterminé que jamais à poursuivre son engagement en Irak jusqu'à la date de transfert du pouvoir aux Irakiens le 30 juin prochain.
Photo : AFP
Au cours d'une des rares conférences de presse qu'il ait donné depuis le début de sa présidence, George W. Bush a affirmé que l'échéance du 30 juin serait tenue pour le transfert de souveraineté aux Irakiens. Il estime que les Etats-Unis ont le devoir de «changer le monde», à un moment où une majorité de l'opinion américaine désapprouve sa politique irakienne.
De notre correspondant à New York

George W. Bush n'accorde des conférences de presse que lorsqu'il est poussé dans ses retranchements. Il répugne à l'exercice, qui le met mal à l'aise et l'expose à des gaffes qui ont fait sa légende. Dans l'histoire moderne des Etats-Unis, il détient le record de parcimonie pour de telles apparitions. Mais ces dernières semaines, les sondages montrent clairement qu'une majorité d'Américains désapprouve sa politique irakienne. Certains n'hésitent plus à évoquer le spectre du Vietnam. Les Démocrates l'accusent, documents à l'appui, d'avoir sous-estimé la menace terroriste avant les attentats du 11 septembre. Et aujourd'hui, les enquêtes d'opinion le donnent désormais perdant contre son opposant démocrate à la présidentielle de novembre.

Dans ce contexte troublé, George W. Bush est apparu plus déterminé que jamais à poursuivre sans dévier sur la voie dans laquelle il s'est engagé. Fait rare, il a admis que la situation en Irak n'était pas aussi positive que ce que les poids-lourds de son administration le prétendent depuis des semaines. Nous avons vécu «deux semaines difficiles» en Irak, a-t-il expliqué. Mais «comme je l'ai dit à ceux qui ont perdu des êtres aimés, nous finirons le travail de ceux qui sont tombés», a promis le président américain. «Si il faut des forces supplémentaires, je les enverrai. Si il faut des ressources supplémentaires, nous les fournirons» a-t-il ajouté.

Changement d’attitude à l’égard de l’ONU

Rappelant que la date du 30 juin avait été fixée pour le transfert de souveraineté aux Irakiens, George Bush a assuré qu'il était «important de respecter cette échéance». Mais en réponse à un journaliste qui lui demandait à qui cette souveraineté serait transmise, le président américain s'en est remis à l'envoyé de Kofi Annan en Irak, Lakhdar Brahimi. Ce changement d'attitude à l'égard de l'ONU est surprenant, pour un président qui avant la guerre n'avait pas hésité à menacer l'institution de disparaitre dans les oubliettes de l'histoire si elle ne le suivait pas en Irak - ce qu'elle a précisément refusé de faire.

Pour la première fois, le président américain a semblé douter de l'existence d'armes de destruction massives en Irak -la principale raison invoquée par son administration pour justifier la guerre. «Bien sûr, je veux savoir pourquoi nous n'avons trouvé aucune arme pour l'instant. (...) Mais je sais toujours que Saddam Hussein était une menace. Et le monde est un meilleur endroit sans Saddam Hussein» a-t-il déclaré. A plusieurs reprises, George W. Bush, qui fut élu sur un projet de politique étrangère plus que modeste, a évoqué le devoir des Etats-Unis de «changer le monde» pour y semer la «liberté». «Un Irak libre servira d'exemple aux réformateurs à travers le Proche-Orient. (...) Un Irak libre confirmera au monde qui nous regarde qu'on peut compter sur la parole donnée par l'Amérique, même dans les moments les plus difficiles» a-t-il poursuivi.

Pas de ressemblance avec le Vietnam

George W. Bush s'est aussi évertué à replacer la guerre en Irak dans le contexte plus large de la guerre contre le terrorisme - un lien critiqué par beaucoup de Démocrates. «Défaire la violence et la terreur en Irak est vital pour vaincre la violence et la terreur ailleurs, et donc vital pour la sécurité du peuple américain» a-t-il affirmé dans un saisissant raccourci. «Au cours des dernières décennies, nous avons vu que toute concession ou retraite de notre part ne fait qu'encourager cet ennemi et appelle plus de bains de sang. Et ces 31 derniers mois, l'ennemi a pu voir que nous ne vivrions plus dans la négation».

Rejetant comme «fausse» toute analogie avec le Vietnam, le président américain a déclaré que la comparaison «envoie le mauvais message à nos troupes et envoie le mauvais message à nos ennemis». Il s'est attaché à caractériser les violences en Irak comme étant uniquement le fait d'une petite minorité avide de pouvoir. En réponse à une question, le président a toutefois subitement abandonné ses notes et son ton prudent : «Personne n'aime voir des cadavres sur leurs écrans de télé. Je n'aime pas cela. Cela prend aux tripes.» Il a aussi vigoureusement rejeté les attaques de ses critiques qui accusent son administration d'avoir négligé la menace terroriste en arrivant au pouvoir, pour se concentrer sur des projets hérités de la guerre froide, comme celui de bouclier anti-missile.

«J’ai un plan pour gagner la guerre contre la terreur»

Confronté aux questions sur sa chute dans les sondages, le candidat Bush -qui s'effaçait hier soir devant le chef de guerre- s'est réveillé : «Je n'ai pas l'intention de perdre mon travail» a-t-il affirmé. «J'ai l'intention de dire au peuple américain que j'ai un plan pour gagner la guerre contre la terreur. Et je crois qu'ils resteront avec moi. Ils comprennent ce qui est en jeu.» En misant sa réélection sur le thème unique de la guerre contre le terrorisme, George W. Bush a fait un pari risqué qui, selon certains, pourrait le conduire à suivre les pas de son père, vainqueur aussi en Irak, mais défait sur la question économique. Le soutien pour la guerre en Irak a considérablement baissé, pour désormais naviguer aux alentours de 45% d'opinions favorables, alors que le soutien pour la façon dont il mène la guerre contre le terrorisme, autrefois impressionnant, n'est plus qu'aux alentours de 55%. Un sondage Newsweek publié lundi le donne perdant contre le candidat démocrate John Kerry, qui obtiendrait 50% des votes, contre seulement 43% pour le président américain.



par Philippe  Bolopion

Article publié le 14/04/2004 Dernière mise à jour le 26/04/2004 à 14:09 TU

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