Islam en France
L’imam intégriste expulsé
(Photo AFP)
Les autorités françaises ont voulu faire vite, quelques heures après le début de la polémique, l’affaire Bouziane est réglée. L’imam de la mosquée de Vénissieux en banlieue lyonnaise, a été expulsé, mercredi 21 avril au matin, vers son pays d’origine, l’Algérie. Abdelkader Bouziane, partisan du courant salafiste, une mouvance rigoriste de l’Islam, doit son départ forcé à son discours ouvertement rétrograde à l'égard de la femme, des propos «contraires au droits de l'homme» qui tombent sous le coup de la loi. Son avocat, Me Mahmoud Hebia a déposé deux recours auprès du tribunal administratif de Lyon estimant que l’arrêté d’expulsion était basé sur «des accusations vagues et confuses» et comportait «des irrégularités» .
Pour le ministre français de l’Intérieur, Dominique de Villepin, qui a décidé mardi 20 avril de l’expulsion immédiate, il s’agit d’ «une mesure d'ordre public destinée à protéger la collectivité nationale». Dans un communiqué, le ministère souligne que le gouvernement ne peut tolérer qu'en public soient tenus des propos contraires aux droits de l'homme, attentatoires à la dignité humaine et en particulier à la dignité des femmes, des appels à la haine ou à la violence ou faisant l'apologie du terrorisme.
Sous le coup d’une enquête des RGNé en Algérie, Abdelkader Bouziane, âgé de 52 ans, polygame, père de seize enfants français, diffuse la pensée salafiste, favorable à une interprétation stricte et littérale du Coran, depuis le début des années 1990, d'abord à Villefranche-sur-Saône (Rhône), puis dans le quartier de la Duchère à Lyon et enfin à Vénissieux. Surveillé depuis des mois par les renseignements généraux pour ses prêches radicaux, Abdelkader Bouziane faisait l'objet d'un arrêté d'expulsion depuis le 26 février dernier. Mais ce sont ses propos parus dans l’édition d’avril d’un magazine lyonnais qui ont provoqué la colère des autorités françaises et précipité la procédure. Dans une interview au mensuel sensationnaliste Lyon-Mag, l'imam salafiste avait, au nom du Coran, justifié le droit de battre les épouses infidèles, légitimé la polygamie et souhaité la victoire de l’Islam dans le monde. «Battre sa femme, c'est autorisé par le Coran mais dans certaines conditions, notamment si la femme trompe son mari», avait-t-il déclaré.
Une lecture que ne partage pas le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), l’instance représentative de l’Islam en France. Dalil Boubakeur a vivement réagi, condamnant autant les propos extrémistes de l’imam que l’exploitation médiatique qui en est faite: «L’Islam n’est pas une religion qui bat ses femmes, tue ses enfant et veut la mort de l’occident. Celui qui défend de telles idées n’est pas digne d’être imam». Pour sa part, Mohamed Bechari, le président de la Fédération nationale des Musulmans de France(FNMF), a estimé que «la véritable sanction contre Abdelkader Bouziane doit être celle de la communauté. Les associations doivent licencier de tels imams». Avant cette affaire, d’autres religieux extrémistes ont subi le même sort. Abdelkader Yahia Cherif, l'imam algérien de Brest expulsé le 14 avril dernier pour avoir appelé au jihad, la guerre sainte, l'a également appris à ses dépens.
par Myriam Berber
Article publié le 21/04/2004 Dernière mise à jour le 21/04/2004 à 13:31 TU