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Islam en France

Faut-il légiférer sur le foulard islamique ?

Après l’annonce du jugement du tribunal de Paris qui oblige une société à réintégrer une employée licenciée car elle refusait d’ôter son foulard, le débat autour des signes extérieurs de religion et de la défense de la laïcité revient en force dans l’actualité française. D’autant qu’il intervient dans un contexte marqué par des incidents fréquents impliquant des jeunes femmes qui portent le voile islamique, notamment dans les écoles. Faut-il ou pas utiliser l’argument suprême de la loi pour interdire le port de ce foulard dans les établissements scolaires, les lieux publics, voire les entreprises ? Le Premier ministre français, Jean-Pierre Raffarin n’exclut pas cette possibilité si la laïcité n’est pas «suffisamment forte pour ne pas avoir besoin de loi pour s’imposer».
Le tout est donc de savoir à quel niveau se situe la limite entre religion et provocation. Une question que de nombreux chefs d’établissements se posent au quotidien. Les incidents qui se sont produits ces derniers mois à l’Inalco (Institut national des langues et des civilisations orientales) offrent de ce point de vue un exemple des dérives possibles. Quelques étudiants du département d’arabe ont perturbé les cours. Une jeune fille voilée a refusé de passer un examen avec un professeur du sexe opposé. D’autres étudiantes d’origine arabe ont, au contraire, été prises à partie parce qu’elles se maquillaient ou ne respectaient pas le ramadan. Tant et si bien que le président de l’Inalco a décidé, après avoir informé l’Education nationale, de faire signer aux nouveaux inscrits une charte précisant les missions de l’université et les règles disciplinaires dans l’espoir de mettre un terme à ces comportements inadmissibles.

Face à ce genre d’incidents, de plus en plus de voix s’élèvent en France pour demander au gouvernement de légiférer pour assurer le respect de la laïcité, une valeur fondamentale de la République française. Quatre députés, parmi lesquels le socialiste Jack Lang ancien ministre de l’Education nationale, ont fait des propositions de loi visant à interdire le port ostentatoire de signes religieux dans les écoles publiques mais aussi dans l’administration.

Malgré une pression de plus en plus importante, notamment dans les rangs de la majorité –Alain Juppé a ainsi demandé que le «législateur prenne ses responsabilités»-, le gouvernement, Jean-Pierre Raffarin en tête, veut garder la tête froide et surtout ne pas jeter de l’huile sur le feu dans un contexte où le risque de communautarisation de la société ne cesse de resurgir. Malgré tout, l’éventualité d’un recours à la loi, si nécessaire, n’est pas exclue. Jean-Pierre Raffarin a ainsi déclaré que s’il y avait des «résistances», il ne fallait pas «hésiter à faire respecter la laïcité par la loi».

Néanmoins, la question de savoir si le recours à la loi est la recette magique pour mettre un terme à des comportements provocateurs se pose aussi. Pour certains, une loi qui stigmatiserait le port du foulard islamique pourrait avoir l’effet contraire à celui escompté et provoquer des réactions de repli communautaire. Voire encourager certains courants islamistes à se radicaliser un peu plus. Jean-Pierre Raffarin qui a affirmé lors de l’assemblée constitutive du Conseil français du culte musulman qu’il n’y avait en France «qu’une seule autorité, celle de la République», devra donc réaliser un difficile arbitrage entre ces deux positions.



par Valérie  Gas

Article publié le 20/06/2003