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République démocratique du Congo

Confusion à l’Est

Bukavu, le 11 juin 2004. La ville est reprise par les autorités légales du pays. 

		(Photo: AFP)
Bukavu, le 11 juin 2004. La ville est reprise par les autorités légales du pays.
(Photo: AFP)
Depuis le 26 mai dernier une grande confusion règne dans l’est du pays. La ville de Bukavu tombe aux mains des dissidents avant d’être reprise par l’armée gouvernementale. Les dissidents prétendent défendre les intérêts de la communauté Banyamulenge et posent des conditions pour un cessez-le-feu total.

Les questions politico-militaires sont toujours posées avec acuité dans l’est de la République démocratique du Congo et se doublent aujourd’hui de graves problèmes sanitaires. Des épidémies de rougeole et de diarrhée ont atteint plus de 600 personnes en quelques jours, a fait remarquer la fondation onusienne «Hirondelle». Les combats dans cette partie du pays ont fait fuir de nombreux travailleurs humanitaires qui ont quitté leurs postes de veille sanitaire et d’administration des soins primaires. La précarité des conditions de vie des populations, dans une ambiance de guerre est un terreau favorable aux pandémies d’autant que les stocks et autres dispensaires désertés par les équipes humanitaires ont été pillés et par des éléments de l’armée régulière et par les dissidents qui battaient en retraite.

Cette confusion est à l’instar de ce qui se passe actuellement dans l’est du Congo. Le général Laurent Nkunda, chef des soldats dissidents qui menaçaient d’entrer en rébellion contre le pouvoir central de Kinshasa, revient sur sa décision et posent des conditions. «Nous n’allons pas faire la guerre et nous ne bougerons pas de nos positions à moins que l’armée (gouvernementale) ne nous attaque», a-t-il déclaré. Parmi les revendications des insurgés de l’est du Congo, figurent : le remplacement du commandant de la région militaire, le général Félix Budja Mabe, accusé par les dissidents de «génocide» à l’encontre des Tutsis congolais, la création d’une commission d’enquête gouvernementale sur les crimes présumés. La commission d’enquête de l’ONU avait déjà conclu à l’inexistence d’un tel génocide.

Acheter son impunité

Les revendications des dissidents étaient dans un premier temps adressées au gouvernement de transition, mais ils affirment par la suite se satisfaire de la prise en compte de leurs thèses par leur mouvement devenu parti politique, le RCD (Rassemblement congolais pour la démocratie), ex-rébellion soutenue par le Rwanda. Mais au moment où ces revendications sont énoncées comme base de négociation, la communauté internationale condamne les événements dans l’est du Congo, y compris le Rwanda et la riposte s’organise. Mais le redéploiement des forces gouvernementales qui marchent sur Bukavu, ne rencontre aucune résistance et les gouvernementaux reprennent la ville. Les dissidents s’étaient repliés à Kamanyola, commune située à la frontière avec le Burundi et le Rwanda.

Les autorités congolaises accusent alors le Rwanda de soutenir cette dissidence, mais Kigali dément tout en jugeant «probablement justifiée» l’intervention armée des soldats dissidents dans l’est du Congo. Le RCD auquel appartient le général Laurent Nkunda, a pour sa part fermement condamné «les violences survenues à Bukavu» et a convoqué du 14 au 16 juin une réunion du «collège des fondateurs». Mais au terme de cette réunion, les observateurs ont noté une franche scission dans le RCD. Un courant rénovateur est apparu et qualifié de «proche du président joseph Kabila», alors le «collège des fondateurs» reste proche des thèses rwandaises, comme Azarias Ruberwa, un des quatre vices-présidents, lui-même Tutsi congolais. Le communiqué final de la réunion convoquée par le RCD à Kinshasa regrette «l’absence de volonté politique réelle et la lenteur dans la réalisation des objectifs de la transition». Le RCD menace également de sanctions ses membres qui ont constitué un «courant rénovateur».

Par ailleurs, l’incohérence du discours des officiers meneurs de la dissidence dans l’est du Congo, le général Laurent Nkunda et le colonel Jules Mutebusi, laisse penser qu’ils veulent démontrer leur capacité de nuisance pour acheter en contre-partie une couverture politique, lorsque la transition sera conduite à son terme en 2005. Pour de nombreux Congolais, le retour des institutions républicaines leur permettra de poursuivre devant la justice de leur pays et devant la Cour pénale internationale, certains chefs de guerre. Et, ces derniers pensent déjà que leur hiérarchie politique (ex-chefs rebelles) qui ont acquis une notabilité à Kinshasa et qui se préparent aussi des parapluies, les laisseront pour compte.

Article publié le 19/06/2004 Dernière mise à jour le 19/06/2004 à 12:08 TU