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Justice

Un nouveau tueur en série identifié

Michel Fourniret, en 2004. 

		(Photo : AFP)
Michel Fourniret, en 2004.
(Photo : AFP)
A peine le procès du meurtrier pédophile Marc Dutroux terminé, les aveux de Michel Fourniret, un violeur récidiviste incarcéré depuis juin 2003 en Belgique, révèlent une nouvelle affaire de meurtres en série de jeunes filles. Cet homme pourrait être responsable d’une dizaine d’assassinats en Belgique mais surtout en France, entre 1987 et 2001.

Les affaires sordides se succèdent et se ressemblent. Comme dans le cas de Marc Dutroux, les enquêteurs belges ont tiré un fil qui les a conduits à faire avouer une série de crimes à un homme, Michel Fourniret (62 ans), qui se présente comme un forestier et a été incarcéré il y a un an à la suite d’une tentative ratée d’enlèvement sur une enfant de 13 ans. La petite Marie Asumption l’a en effet échappé belle, lorsqu’en juin 2003, elle a réussi à s’enfuir de la camionnette où un inconnu l’avait forcée à monter puis l’avait ligotée. Elle aurait pu connaître un bien triste sort si elle n’avait pas pu se libérer de ses liens et se sauver. Ce rapt manqué a valu à Michel Fourniret d’être interpellé après que l’enfant l’eut reconnu au volant de sa camionnette.

Pour autant, il n’a dans un premier temps été question que de cette affaire pour la police et la justice belges. Même si le passé de cet homme déjà condamné, en 1987, à sept ans de prison en France pour viol et attentat à la pudeur, a fait d’emblée peser sur lui des soupçons dans le cadre d’autres affaires de jeunes filles disparues ces dernières années. Fourniret n’est donc passé aux aveux qu’un an après son interpellation et surtout après avoir été mis en cause par sa femme, Monique Olivier, dans l’assassinat de neuf personnes de part et d’autre de la frontière franco-belge. Cette dernière, impliquée elle aussi puisqu’elle était au courant de plusieurs viols et meurtres, aurait été incitée à collaborer avec les enquêteurs par la sévérité du verdict rendu contre l’ex-épouse de Marc Dutroux (30 ans de prison). Elle a d’ailleurs été tout de suite inculpée et incarcérée.

Le château de Sautou aurait été acheté par Fourniret avec l’argent d’un des membres du groupe terroriste Action directe. 

		(Photo : AFP)
Le château de Sautou aurait été acheté par Fourniret avec l’argent d’un des membres du groupe terroriste Action directe.
(Photo : AFP)

Voyeur-violeur-violent

Poussé dans ses derniers retranchements, Michel Fourniret a, selon le procureur général de Liège, Anne Thily, chargée du dossier, fini par avouer son implication dans six meurtres. Il a ainsi notamment reconnu avoir enlevé, violé et étranglé Elisabeth Brichet, une petite Belge de 12 ans disparue près de Namur en décembre 1989. Il a aussi admis être impliqué dans le meurtre de cinq autres jeunes filles, une Belge et quatre Françaises. Cette première série d’aveux pourrait n’être qu’un début. Après avoir commencé par nier son implication dans d’autres affaires, Fourniret a ensuite reconnu, jeudi, être aussi l’auteur du meurtre de la compagne d’un membre du groupe terroriste Action directe, Jean-Pierre Hellegouarch, rencontré lors de son incarcération en France. Cet homme lui aurait demandé de «gérer» son magot. Mais Fourniret aurait opté pour une solution plus radicale : éliminer la compagne pour s’emparer de l’argent. C’est peut-être cette somme qui lui aurait permis d’acquérir le château de Sautou, à Doncherry dans les Ardennes françaises, où il aurait enterré au moins deux de ses victimes.

Des fouilles doivent d’ailleurs être engagées dans cette zone pour chercher des preuves matérielles pouvant accréditer ces déclarations. Car pour le moment, aucun élément ne permet de vérifier la véracité des affirmations de Fourniret ou de sa femme et l’hypothèse d’un changement de version ou de faux aveux n’est pas exclue. Des enquêteurs français se sont  d’ailleurs rendus en Belgique pour participer aux auditions de Fourniret et recueillir des informations en vue d’orienter les recherches. Deux dossiers de meurtres non élucidés ont d’autre part été rouverts en France après les aveux de Fourniret. Il s’agit de ceux de la jeune Natacha Darnais (13 ans), disparue à Rézé près de Nantes en 1990 et de Fabienne Leroy, une jeune femme de 22 ans, enlevée près de Mourmelon en 1989. Toutes les deux avaient été retrouvées mortes quelques jours après leur disparition. L’implication de celui qui commence à être surnommé «l’ogre des Ardennes» dans d’autres disparitions de petites filles est aussi évoquée : celle de Céline Saison (18 ans) disparue en juillet 2000 à Charleville-Mézières, celle de Mananya Thumpong (13 ans), en 2002 à Sedan, et peut-être même celle de la petite Estelle Mouzin (9 ans) qui vivait à Guermantes et dont on est sans nouvelle depuis janvier 2003.

Cette nouvelle affaire de prédateur amateur de jeunes filles, de préférence vierges et jolies, risque de connaître des rebondissements. En Belgique, elle a déjà provoqué un grand choc. Car elle a fait replonger la population, à peine remise du procès de Marc Dutroux, dans un nouveau cauchemar à connotation pédophile. En France, pays d’origine de Fourniret, l’émotion risque aussi de grandir au fil des aveux d’un homme dont le passé de voyeur-violeur-violent est bien connu des services de police et de la justice. La question de la remise en liberté et du suivi de ce récidiviste risque aussi de se poser très vite. Car Fourniret s’est évaporé après sa remise en liberté et a réussi sans difficulté à dissimuler son casier judiciaire. A tel point qu’il a même pu se faire employer comme gardien de réfectoire dans une école du village de Sart-Custinne dans les Ardennes françaises, où il s’était installé. Pendant près de quinze ans, cet homme que les enquêteurs belges décrivent comme un «chasseur d’adolescentes» rusé et poussé par des pulsions sexuelles, a, semble-t-il, agi en toute impunité en traversant la frontière entre la France et la Belgique au gré de ses méfaits.


par Valérie  Gas

Article publié le 01/07/2004 Dernière mise à jour le 01/07/2004 à 14:30 TU