Belgique
Le pays attend le procès Dutroux
Le procès de Marc Dutroux va s’ouvrir, le 1er mars, dans un climat extrêmement tendu. Il doit marquer la fin d’une affaire terrible qui a traumatisé l’ensemble des Belges, à la fois parce que les crimes commis par cet homme accusé d’avoir enlevé, séquestré, violé et tué plusieurs jeunes filles, sont terribles, mais aussi parce que la conduite de l’enquête a mis au jour l’incompétence de la police et de la justice du pays.
Aux yeux des Belges, Marc Dutroux ne mérite aucune clémence. Un sondage réalisé pour les quotidiens La Dernière Heure, Heet Laatste Nieuws et la chaîne de télévision RTL-TVI, a révélé que 66% des personnes interrogées étaient favorables à l’application de la peine capitale dans cette affaire, alors qu’aucune exécution n’a eu lieu dans le pays depuis 1950. Le traumatisme provoqué par la découverte des actes de Dutroux est donc loin d’être surmonté en Belgique, même si près de huit ans se sont écoulés depuis l’arrestation de celui que la presse nationale a surnommé «le monstre de Charleroi».
Un «monstre» qui doit aujourd’hui être jugé pour les enlèvements, séquestrations et viols de six fillettes et adolescentes dont quatre sont mortes dans des conditions de souffrance terribles et deux ont pu être sauvées in extremis. Julie et Melissa, âgées de 8 ans, ont été enlevées en juin 1995. An et Eefje, 17 ans et 19 ans, ont connu le même sort en août. Toutes les quatre ont été retenues prisonnières dans une cache aménagée par Marc Dutroux dans l’une de ses maisons près de la ville de Charleroi. Toutes les quatre sont mortes de faim et d’épuisement après avoir été violées pendant des mois. Sabine et Laetitia, 12 et 14 ans, ont été enlevées à leur tour le 28 mai et le 9 août 1996. Elles s’en sont sorties vivantes mais ont subi elles aussi les pires sévices sexuels et des mauvais traitements. C’est de ces crimes que Marc Dutroux doit répondre aujourd’hui devant la justice mais aussi du meurtre de l’un de ses complices, Bernard Weinstein. Il n’est pas le seul accusé dans ce procès. Son ex-épouse, Michelle Martin, un ancien toxicomane, Michel Lelièvre, et un escroc, Michel Nihoul, doivent aussi répondre d’une accusation de complicité. Ce dernier est le seul à comparaître libre. Arrêté en août 1996, comme Dutroux, Nihoul a ensuite été relâché en 1997, la justice ayant estimé qu’elle manquait «d’indices sérieux» concernant son implication.
Une succession de négligences et d’erreurs
Dans cette affaire, l’horreur des faits a été amplifiée par le sentiment qu’ils auraient pu être en partie évités si la police et la justice avaient fait leur travail. D’une part, Marc Dutroux est un multirécidiviste qui a été condamné, en 1989, à 13 ans de prison pour viol sur mineures et a été libéré au bout de six ans. D’autre part, il semble que la police ait négligé un certain nombre d’indices et ait mal mené une perquisition organisée dès août 1995 chez Dutroux, qui aurait peut-être pu permettre d’éviter la mort des enfants.
Cette succession de négligences et d’erreurs repérées à tous les niveaux a été pointée par une commission d’enquête parlementaire qui a estimé, en 1998, que «les dysfonctionnements de l’appareil pénal belge posent aujourd’hui de graves problèmes qui mettent réellement en péril l’Etat de droit». Et l’arrestation de Dutroux, considéré en Belgique comme l’ennemi public numéro un, n’a pas mis un terme à la vague des incohérences. En avril 1998, le prisonnier a réussi à s’évader en subtilisant l’arme du seul gendarme chargé de le surveiller pendant qu’il consultait son dossier au palais de justice de Neufchâteau. Même s’il a été vite rattrapé, cet épisode a provoqué une nouvelle fois l’indignation des Belges, suffoqués de constater à quel point il a été facile à Dutroux de déjouer le dispositif de sécurité censé l’empêcher de nuire. Le scandale provoqué par cette évasion a été tellement important que les ministres de l’Intérieur et de la Justice ont été contraints de démissionner.
Dans ce contexte, l’hypothèse d’une protection dont aurait bénéficié Marc Dutroux qui aurait été, peut-être, le pourvoyeur d’un réseau pédophile, n’a pas cessé de hanter les esprits en Belgique depuis près de huit ans. L’enquête menée dans le cadre de l’instruction du dossier n’a pas permis de confirmer cette piste. Mais les avocats de Dutroux entendent bien l’évoquer à nouveau durant le procès pour asseoir leur défense. Ils vont notamment mettre en évidence les indices retrouvés dans les caches où ont séjourné les enfants et qui n’ont pas été exploités: des cheveux, des tâches de sang et de sperme, par exemple. La présence de Michel Nihoul, escroc soupçonné d’avoir organisé des parties fines et des trafics de drogue, dans le boxe des accusés, devrait aussi être utilisée pour aller dans ce sens puisqu’il représente le lien possible entre Dutroux et un éventuel réseau.
Xavier Magnée, l’un des avocats de Dutroux, a d’ailleurs annoncé la couleur en déclarant: «On nous présente Dutroux comme un pervers isolé, parfaitement responsable de ses actes. Mais son comportement n’est compréhensible que s’il y a un réseau. Ou alors, il est fou». Mais l’avocat est conscient que quelles que soient les révélations qui peuvent sortir au cours du procès, elles ont bien peu de chances d’atténuer la responsabilité de son client qui va comparaître, en présence de l’une de ses victimes, Sabine, qui tient à venir pour montrer à son bourreau qu’elle n’est pas devenue folle: «Si je plaide mal, il aura la perpétuité. Si je plaide bien, il aura la perpétuité».
Un «monstre» qui doit aujourd’hui être jugé pour les enlèvements, séquestrations et viols de six fillettes et adolescentes dont quatre sont mortes dans des conditions de souffrance terribles et deux ont pu être sauvées in extremis. Julie et Melissa, âgées de 8 ans, ont été enlevées en juin 1995. An et Eefje, 17 ans et 19 ans, ont connu le même sort en août. Toutes les quatre ont été retenues prisonnières dans une cache aménagée par Marc Dutroux dans l’une de ses maisons près de la ville de Charleroi. Toutes les quatre sont mortes de faim et d’épuisement après avoir été violées pendant des mois. Sabine et Laetitia, 12 et 14 ans, ont été enlevées à leur tour le 28 mai et le 9 août 1996. Elles s’en sont sorties vivantes mais ont subi elles aussi les pires sévices sexuels et des mauvais traitements. C’est de ces crimes que Marc Dutroux doit répondre aujourd’hui devant la justice mais aussi du meurtre de l’un de ses complices, Bernard Weinstein. Il n’est pas le seul accusé dans ce procès. Son ex-épouse, Michelle Martin, un ancien toxicomane, Michel Lelièvre, et un escroc, Michel Nihoul, doivent aussi répondre d’une accusation de complicité. Ce dernier est le seul à comparaître libre. Arrêté en août 1996, comme Dutroux, Nihoul a ensuite été relâché en 1997, la justice ayant estimé qu’elle manquait «d’indices sérieux» concernant son implication.
Une succession de négligences et d’erreurs
Dans cette affaire, l’horreur des faits a été amplifiée par le sentiment qu’ils auraient pu être en partie évités si la police et la justice avaient fait leur travail. D’une part, Marc Dutroux est un multirécidiviste qui a été condamné, en 1989, à 13 ans de prison pour viol sur mineures et a été libéré au bout de six ans. D’autre part, il semble que la police ait négligé un certain nombre d’indices et ait mal mené une perquisition organisée dès août 1995 chez Dutroux, qui aurait peut-être pu permettre d’éviter la mort des enfants.
Cette succession de négligences et d’erreurs repérées à tous les niveaux a été pointée par une commission d’enquête parlementaire qui a estimé, en 1998, que «les dysfonctionnements de l’appareil pénal belge posent aujourd’hui de graves problèmes qui mettent réellement en péril l’Etat de droit». Et l’arrestation de Dutroux, considéré en Belgique comme l’ennemi public numéro un, n’a pas mis un terme à la vague des incohérences. En avril 1998, le prisonnier a réussi à s’évader en subtilisant l’arme du seul gendarme chargé de le surveiller pendant qu’il consultait son dossier au palais de justice de Neufchâteau. Même s’il a été vite rattrapé, cet épisode a provoqué une nouvelle fois l’indignation des Belges, suffoqués de constater à quel point il a été facile à Dutroux de déjouer le dispositif de sécurité censé l’empêcher de nuire. Le scandale provoqué par cette évasion a été tellement important que les ministres de l’Intérieur et de la Justice ont été contraints de démissionner.
Dans ce contexte, l’hypothèse d’une protection dont aurait bénéficié Marc Dutroux qui aurait été, peut-être, le pourvoyeur d’un réseau pédophile, n’a pas cessé de hanter les esprits en Belgique depuis près de huit ans. L’enquête menée dans le cadre de l’instruction du dossier n’a pas permis de confirmer cette piste. Mais les avocats de Dutroux entendent bien l’évoquer à nouveau durant le procès pour asseoir leur défense. Ils vont notamment mettre en évidence les indices retrouvés dans les caches où ont séjourné les enfants et qui n’ont pas été exploités: des cheveux, des tâches de sang et de sperme, par exemple. La présence de Michel Nihoul, escroc soupçonné d’avoir organisé des parties fines et des trafics de drogue, dans le boxe des accusés, devrait aussi être utilisée pour aller dans ce sens puisqu’il représente le lien possible entre Dutroux et un éventuel réseau.
Xavier Magnée, l’un des avocats de Dutroux, a d’ailleurs annoncé la couleur en déclarant: «On nous présente Dutroux comme un pervers isolé, parfaitement responsable de ses actes. Mais son comportement n’est compréhensible que s’il y a un réseau. Ou alors, il est fou». Mais l’avocat est conscient que quelles que soient les révélations qui peuvent sortir au cours du procès, elles ont bien peu de chances d’atténuer la responsabilité de son client qui va comparaître, en présence de l’une de ses victimes, Sabine, qui tient à venir pour montrer à son bourreau qu’elle n’est pas devenue folle: «Si je plaide mal, il aura la perpétuité. Si je plaide bien, il aura la perpétuité».
par Valérie Gas
Article publié le 29/02/2004