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XVème Conférence internationale sur le sida

Les laboratoires dans le collimateur des associations

Des actions délibérément provocatrices visent à faire entendre la voix des exclus et à mettre la pression sur l’ensemble des participants à la conférence. 

		(Photo: AFP)
Des actions délibérément provocatrices visent à faire entendre la voix des exclus et à mettre la pression sur l’ensemble des participants à la conférence.
(Photo: AFP)
Dans le sillage des quelque 17000 participants à la conférence internationale sur le sida organisée à Bangkok, de nombreux militants qui dénoncent le sort réservé aux malades des pays en développement, ont fait le voyage jusqu’à la capitale thaïlandaise. Leur objectif est notamment de protester contre la présence des représentants des grands laboratoires, détenteurs des brevets sur les médicaments anti-sida, au sein des participants à la réunion qu’ils comparent à une grand-messe médiatique à efficacité limitée.

Le débat sur l’accès aux soins pour tous, le thème choisi par les organisateurs de la conférence de Bangkok sur le sida, a débuté avant même l’ouverture de la réunion. Des manifestants issus d’organisations non gouvernementales ou d’associations de malades venus des quatre coins de la planète ont, en effet, organisé des défilés et des sit-in en brandissant des pancartes où était inscrit un slogan sans équivoque: «Accès interdit à tous». Une manière de dénoncer la situation actuelle de l’accès aux soins où plus de 90 % des malades ne peuvent se procurer des antirétrovaux. Ils se sont aussi glissés parmi les participants officiels de la conférence déguisés en préservatifs roses. Ils ont même mis en scène une petite séance de mime dans le hall du centre de convention, où a lieu la conférence, au cours de laquelle ils ont jeté de la peinture rouge sur les portraits des chefs d’Etat ou de gouvernement des pays membres du G7, principaux bailleurs de fonds internationaux, aux cris de: «honte».

Ces actions délibérément provocatrices visent à faire entendre la voix des exclus et à mettre la pression sur l’ensemble des participants à la conférence, qu’ils soient représentants des organisations internationales ou des gouvernements, accusés de ne pas faire suffisamment d’efforts pour permettre de réduire les inégalités entre les malades des pays développés et ceux des pays en développement, notamment en diffusant les antirétroviraux aux plus pauvres.

Profiter de la médiatisation

Une accusation qui s’adresse aussi et surtout aux grands laboratoires pharmaceutiques internationaux, détenteurs des brevets sur les médicaments anti-sida, dont la politique tarifaire et l’obstination à refuser la fabrication de génériques a bloqué pendant longtemps toute possibilité d’élargir l’accès dans les pays en développement. Certes, des progrès ont été réalisés sur ce plan. Les laboratoires pratiquent des prix différenciés au Sud et des copies des molécules sous brevet sont aujourd’hui fabriquées. Mais cela n’a pas encore permis d’améliorer de manière sensible la situation sur le terrain dans les pays pauvres. Pour les associations, les firmes continuent à faire obstacle à la diffusion des antirétroviraux même si elles ne le font plus de manière ouverte. Elles estiment même que le fait que les laboratoires participent à la conférence internationale sur le sida est en soi inadmissible.

De nombreux militants ont ainsi dénoncé l’organisation d’une manifestation, censée faire le point sur la situation du sida dans le monde et réfléchir aux moyens de lutter contre l’épidémie, qui donne aussi l’occasion aux firmes de faire de la publicité devant les représentants de la communauté internationale. Tous les grands laboratoires disposent, en effet, d’espaces pour présenter leurs molécules et leurs recherches et leurs représentants participent activement aux débats. Ils peuvent aussi profiter de la médiatisation de la manifestation pour faire passer leur message et leurs arguments sur le sujet sensible de l’accès aux médicaments, résumés dans le slogan du Leem (Les entreprises du médicament): l’industrie pharmaceutique fait partie de la solution, pas du problème.

D’ailleurs quand des manifestants ont envahi le stand de GlaxoSmithKline pour dénoncer le non respect d’un accord passé, en 2001, avec le laboratoire sud-africain Aspen Pharmacare pour lui permettre de fabriquer des copies de ses traitements antirétroviraux, le porte-parole de la firme n’a pas cherché à démentir. Il a simplement expliqué pourquoi, trois ans après, aucune molécule n’était sortie des usines en affirmant que le blocage ne venait pas de GlaxoSmithKline mais des autorités sud-africaines. Celles-ci n’ayant toujours pas donné leur feu vert à la fabrication des génériques. Il n' y a donc pas de retour en arrière sur un accord inédit de «licence volontaire» destiné à favoriser l’accès aux traitements dans le pays le plus touché au monde par le sida, mais des lenteurs administratives.

par Valérie  Gas

Article publié le 12/07/2004 Dernière mise à jour le 12/07/2004 à 16:12 TU

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Odile Frank

Co-auteur du rapport publié par l'Organisation internationale du travail

«Dans le secteur privé, de nombreux employeurs remarquent qu'il est beaucoup plus rentable, pour les coûts et les bénéfices, de soigner les sidéens et de proposer des programmes de préventions pour leurs employés que d'être inactif.»

[12/07/2004]

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