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Sida

Financement : mode d’emploi

La prise de conscience concernant l’impact terrible du sida a permis, ces deux dernières années, de mobiliser des fonds importants pour lutter contre ce fléau qui tue, tous les ans, plusieurs millions de personnes dans le monde. Elle a aussi amené l’engagement d’acteurs diversifiés dans ce domaine, qu’il s’agisse des institutions internationales, des gouvernements, des fondations privées, ou même des entreprises. Cet élan encourageant ne permet pas, malgré tout, de répondre à l’ensemble des besoins dans les pays les plus pauvres de la planète. Mais il montre que face à un enjeu sanitaire global, des actions sont possibles.
(Carte NG/RFI)
(Carte NG/RFI)





















Près de 5 milliards de dollars ont été consacrés, en 2003, par la communauté internationale à la lutte contre le sida. Quand on se rappelle qu’à l’époque de la création du Programme commun des Nations unies sur le VIH, baptisé Onusida, en 1996, les ressources disponibles pour combattre l’épidémie s’élevaient à 300 millions de dollars, on mesure le chemin parcouru. Certes, entre ces deux dates le VIH a connu une progression phénoménale et est devenu la plus terrible des pandémies. Aujourd’hui, on dénombre environ 38 millions de porteurs du virus dans le monde. Et en 20 ans d’épidémie, le sida a tué plus de 20 millions de personnes. Pour la seule année 2003, on a enregistré encore trois millions de décès supplémentaires dont 75 % ont frappé des malades africains.

La riposte engagée à l’initiative de l’ONU qui a consacré, en 2000, une session spéciale du conseil de sécurité à cette épidémie, n’a pas encore permis de ralentir la progression du virus dans les pays en développement où il fait le plus de ravages. Mais des outils ont été mis en place petit à petit et des programmes commencent à être menés sur le terrain. Le Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose, créé en 2002, en est, par exemple, aujourd’hui à son quatrième appel d’offres. En 2003, il a approuvé 227 programmes dans 124 pays pour un montant global de 2,1 milliards de dollars sur deux ans et a déjà décaissé 232 millions.

Après une période de mise en œuvre où l’on avait craint que ce fonds ne reste une coquille vide, il semble avoir désormais pris sa place dans le dispositif multilatéral de lutte contre le sida. Peu à peu, les donateurs ont rempli ses caisses. Les engagements de contributions s’élèvent, aujourd’hui, à 5,4 milliards de dollars sur les cinq prochaines années. Du coup, le Fonds espère pouvoir financer des programmes visant à permettre à 1,6 million de malades des pays en développement d’avoir accès aux antirétroviraux d’ici 2008. Cette institution consacre 60 % de ses ressources à la lutte contre le sida et l’Afrique, qui regroupe 25 millions de séropositifs, reste la région prioritaire pour l’attribution des budgets.

Coordonner et évaluer les actions

Si les financements dont dispose le Fonds global ne sont pas négligeables, ils restent encore inférieurs aux budgets engagés par les seuls Etats-Unis dans le domaine de la lutte contre le sida. L’initiative lancée, en 2002, par le président Bush (PEPFAR) pour investir 15 milliards de dollars sur cinq ans, a fait de ce pays l’Etat le plus engagé dans la lutte contre l’épidémie. Même si deux ans se sont écoulés avant que les premiers budgets ne soient débloqués, ce plan est désormais au cœur de la politique américaine. C’est d’ailleurs dans le cadre de ce programme que le gouvernement a promis une contribution d’un milliard de dollars sur cinq ans au Fonds mondial. Mais l’action multilatérale n’est pas la priorité du plan Bush. L’objectif défini par le président est, en effet, de consacrer 9 milliards de dollars à des interventions dans 15 pays où le virus progresse rapidement (Bostwana, Côte d’Ivoire, Ethiopie, Guyana, Haïti, Kenya, Mozambique, Namibie, Nigeria, Rwanda, Afrique du Sud, Tanzanie, Ouganda, Zambie, Vitenam). Cinq autres milliards doivent être dédiés à la poursuite de programmes bilatéraux déjà engagés.

Si l’investissement des Etats-Unis dans la lutte contre le sida est largement apprécié par la communauté internationale, la méthode et les objectifs des Américains font l’objet d’un certain nombre de reproches. Le refus d’utiliser les génériques dans les programmes, pour ne pas défavoriser les laboratoires américains fabricant des médicaments anti-sida, est ainsi souvent mis en cause. Tout comme le fait de mener des actions privilégiant, par exemple, l’abstinence sur l’usage du préservatif. Les organisations internationales et les ONG estiment, d’autre part, qu’il serait plus efficace de privilégier les actions coordonnées dans le cadre multilatéral plutôt que mener un combat isolé.

Un premier bilan des interventions menées depuis quelques années pour lutter contre le sida a, en effet, permis de se rendre compte de la nécessité de coordonner et d’évaluer les actions pour être efficace. Car la multiplication des opérateurs augmente les ressources mais disperse les acteurs, les objectifs et les moyens. Institutions internationales, gouvernements, organismes privés interviennent désormais dans la lutte contre le sida. La Banque mondiale mène, par exemple, un programme spécifique sur cette maladie (MAP). Des Fondations, comme la Fondation Bill et Melinda Gates, mobilisent aussi des ressources pour intervenir dans ce domaine. Les entreprises privées commencent à aider la prise en charge de leurs employés contaminés et à mettre en place des programmes de prévention.

Du coup, le danger est aujourd’hui de réaliser des doublons et de multiplier des actions trop ponctuelles pour être efficaces à grande échelle. D’autant que, même si elles ont augmenté, les ressources internationales sont encore insuffisantes pour répondre aux besoins des millions de malades du sida qui n’ont accès ni aux services de prévention, ni au dépistage, ni surtout aux traitements. C’est pour éviter cet obstacle que l’Onusida et les donateurs internationaux ont défini «trois principes» -mise en place d’un plan national sur le sida, d’une instance nationale chargée de cette maladie et d’un système de suivi et d’évaluation- indispensables pour que la mise en œuvre des programmes puisse permettre d’obtenir des résultats tangibles.


par Valérie  Gas

Article publié le 07/07/2004 Dernière mise à jour le 07/07/2004 à 16:43 TU

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Peter Piot

Directeur général d'ONUSIDA

«En Asie et en Europe de l'Est, il y a une extansion de la maladie.»

[07/07/2004]

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