Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Sida

Passer des intentions à l’action

De plus en plus de fonds sont mobilisés en faveur de la lutte contre le sida dans le monde et notamment en Afrique subsaharienne, la région qui regroupe le plus grand nombre de personnes infectées par le VIH. Mais ces progrès sont largement insuffisants pour combattre une épidémie qui continue à progresser rapidement, et dans toutes les régions du monde. D’autant qu’un autre pari reste à relever : celui de réussir à utiliser au mieux les ressources disponibles pour permettre d’élargir, enfin, l’accès aux traitements dans les pays pauvres. Car pour le moment moins de 10 % des malades qui ont besoin des antirétroviraux peuvent en disposer.
Cinq millions de nouvelles infections à VIH ont été enregistrées dans le monde en 2003. Il s’agit de la plus forte augmentation du nombre de contaminations durant les dernières années. L’épidémie de sida ne fléchit donc pas, bien au contraire. Partout, elle progresse à un rythme inquiétant. L’Afrique subsaharienne, où réside 25 millions de porteurs du virus, est particulièrement durement touchée. Soixante-quinze pour cent des décès dus au sida enregistrés en 2003 y ont, en effet, été répertoriés. A ce rythme, la catastrophe humanitaire tant annoncée risque de devenir inévitable sur le continent. Les experts d’Onusida qui viennent de publier leur rapport sur l’état de l’épidémie estiment ainsi que si rien n’est fait, «60 % des jeunes qui ont 15 ans actuellement n’arriveront jamais à 60 ans». D’ores et déjà, le sida a un impact direct sur l’espérance de vie dans certains pays. En Afrique australe, par exemple, elle est passée de 62 à 49 ans. Globalement, on estime que «sans réaction forte», environ une quarantaine de pays africains verront leur population diminuer de 14 % d’ici 2025.

L’Afrique n’est pas la seule région où la situation est très préoccupante. C’est, en effet, en Asie que le sida progresse le plus vite puisqu’un quart des nouvelles infections ont eu lieu, en 2003, sur ce continent. Les deux géants régionaux en terme de population, la Chine et l’Inde, doivent notamment faire face à une épidémie galopante même si les taux de prévalence y sont encore bas (entre 0,1 et 0,4 % en Chine et 1,3 % en Inde). Un séropositif sur sept vit aujourd’hui en Inde et ce pays arrive juste derrière l’Afrique du Sud au palmarès du nombre de porteurs du virus (plus de 5 millions en 2003). En Chine, on recense officiellement 840 000 séropositifs mais le taux d’accroissement de la prévalence est inquiétant et les chiffres nationaux peuvent cacher des situations locales alarmantes. Dans la province du Henan, par exemple, les contaminations par transfusions sanguines ont fait exploser les infections dans la population rurale. Selon certaines estimations, on pourrait dans ce contexte atteindre 7 millions de personnes infectées par le VIH d’ici 2005 en Chine.

Les chiffres mondiaux de l'épidémie de sida. 

		Réalisation: NG/RFI
Les chiffres mondiaux de l'épidémie de sida.
Réalisation: NG/RFI





















« L’épidémie avance toujours plus vite que la riposte»

Le sida est donc plus que jamais une «urgence sanitaire mondiale» et face à ce fléau la mobilisation progresse. Certes, comme le constate Catherine Hankins, de l’Onusida, «l’épidémie, dynamique, avance toujours plus vite que la riposte». Mais il n’empêche que des progrès ont été réalisés notamment au niveau de la mobilisation des fonds. Depuis 1996, les ressources consacrées à la lutte contre le sida dans les pays en développement ont été multipliées par quinze et sont passées de 300 millions à 5 milliards de dollars. On est pourtant loin du compte, puisque l’Onusida estime les besoins à 12 milliards de dollars d’ici 2005 et 20 milliards d’ici 2007.

D’autre part, si l’augmentation des financements demeure indispensable, Michel Kazatchkine, directeur de l’Agence française de recherche sur le sida, estime que le nouveau défi à relever est de «bien dépenser l’argent et de faire arriver les médicaments chez les patients». Les ressources disponibles ne sont, en effet, pas toujours utilisées de manière optimum en raison de l’existence de nombreux blocages d’ordre administratif, technique et humain. Le déficit en personnel médical mais aussi en gestionnaires, l’insuffisance des infrastructures et des mécanismes de suivi des programmes, les complications bureaucratiques empêchent aussi souvent de répondre efficacement aux besoins des populations touchées par le sida. Pour l’Onusida, il faut ainsi aujourd’hui dépenser «plus intelligemment» et s’assurer que l’utilisation des fonds est «efficace». C’est à dire qu’elle permet d’améliorer la prévention, le dépistage de la séropositivité et les soins aux malades.

Obtenir plus d’argent et mieux l’employer : c’est donc l'objectif prioritaire de la lutte contre le sida pour les prochaines années. De cette manière, le problème des conditions à réunir pour améliorer l’accès des plus pauvres aux antirétroviraux, qui sera au centre des discussions de la Conférence internationale sur le sida, à Bangkok (11-16 juillet 2004), pourra peut-être être envisagé concrètement et des solutions proposées. Car cette question est dorénavant au cœur des préoccupations des institutions internationales qui s’alarment de l’injustice dont sont victimes les quelque six millions de porteurs du virus qui auraient besoin de ces traitements en urgence mais ne peuvent en disposer.


par Valérie  Gas

Article publié le 06/07/2004 Dernière mise à jour le 09/07/2004 à 15:11 TU