Côte d'Ivoire
Médiations tous azimuts
(Photo: AFP)
Tous les protagonistes de la crise ivoirienne se disent favorables à l’accord de Marcoussis et à son application qui reste à présent la seule issue de sortie de crise. L’accord de Marcoussis fait donc l’unanimité mais est sujet à des interprétations. Chaque partie en fait une lecture originale pour y trouver une justification de son action. Dans cette partie aux règles du jeu variables, c’est le président de la République Laurent Gbagbo qui garde la main. Il se prévaut, par-dessus tout, de la constitution du pays dont Marcoussis garantit le respect et de la défense de l’intégrité territoriale. Dans ce jeu où tout le monde a raison il est aujourd’hui important de compléter les conventions signées jusque-là pour ouvrir de nouvelles perspectives à la résolution du conflit en Côte d’Ivoire.
C’est le sens choisi par la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) qui a demandé à nouveau au président Gnassingbé Eyadéma du Togo de reprendre les discussions avec les belligérants ivoiriens. Après plusieurs missions des membres de son gouvernement à Abidjan et à Bouaké, le président Eyadéma convoque le 13 juillet 2004 tout le monde chez lui à Kara, dans le nord du Togo. Plusieurs points de blocage empêchent un accomplissement circonstancié du processus de paix. Le désarmement, le limogeage des ministres, les délégations de pouvoir au Premier ministre, le code de la nationalité, la succession et l’accès à la propriété, ainsi que les échéances électorales connaissent de timides avancements puisque les instances dédiées à leur application ont presque toutes été créées.
Faire évoluer les Forces nouvellesL’assemblée nationale a aussi voté récemment un code de l’accès à la propriété, et un autre texte sur la nationalité qui semble emporter les faveurs de tout le monde. Cependant d’autres dispositions connaissent des fortunes diverses malgré le sceau des Nations unies dont elles jouissent. C’est le cas du programme de désarmement et de réinsertion qui rencontre l’hostilité des Forces nouvelles (ex-rebelles). Elles refusent de déposer les armes en posant à différents niveaux des conditions de confiance. La principale mission du président Eyadéma sera de faire évoluer les Forces nouvelles sur cette question car leur réticence maintient le pays coupé en deux et ne permet pas un établissement normal des listes électorales. Or Marcoussis prévoit le respect le respect des échéances électorales de 2005.
Le chef de l’Etat togolais, médiateur de la CEDEAO, doit trouver avec ses invités à Kara -l’ensemble des partis politiques d’opposition formant le G7- la clé pour relancer le processus de paix. Pendant ce temps à Dakar, l’Internationale socialiste bouclait deux journées de travail à l’issue desquelles elle préconise l’envoi à Abidjan d’une mission du « Comité Afrique » de l’organisation. Dans un communiqué l’Internationale socialiste demande au président Gbagbo, dont le parti, le Front populaire ivoirien (FPI), est membre de l’organisation, de tout mettre en œuvre pour « faciliter la reprise des activités du gouvernement de réconciliation nationale en Côte d’Ivoire ».
Il a pour cela le soutien du secrétaire général de l’ONU, Kofi Anan, du président Omar Bongo du Gabon qui joue ici la carte de la sagesse, celle du doyen des chefs d’Etat africain qui a déjà reçu tous les protagonistes du conflit ivoirien et Blaise Compaoré, le président burkinabé accusé par Laurent Gbagbo de soutenir la rébellion. Le président John Kufuor du Ghana et président en exercice de la CEDEAO convoque dès le 29 juillet à Accra, un sommet régional de l’organisation sur la Côte d’Ivoire. A ce sommet déjà baptisé « Accra 3 », sont attendus le président Laurent Gbagbo, le Premier ministre Seydou Diarra et les acteurs de la crise politico-militaire en Côte d’Ivoire. Le président Bongo sera l’invité exceptionnel de cette réunion de la CEDEAO.
par Didier Samson
Article publié le 14/07/2004 Dernière mise à jour le 14/07/2004 à 15:28 TU