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Chine

Pékin s’invite aux législatives de Hong-Kong

Le drapeau chinois flotte devant le siège de la Banque de Chine à Hong-Kong. 

		(Photo: AFP)
Le drapeau chinois flotte devant le siège de la Banque de Chine à Hong-Kong.
(Photo: AFP)
A défaut d’être un enjeu pour la prise de pouvoir, les élections législatives qui se déroulent dimanche à Hong-Kong sont révélatrices du rapport de force entre les électeurs de l’ancienne colonie britannique et le gouvernement central de Pékin.

De notre correspondante à Pékin.

Le système électoral de Hong-Kong est ainsi fait que seule la moitié des sièges du Conseil législatif (le Legco) est soumise au suffrage universel dans des circonscriptions géographiques. Trente candidats seront donc choisis par 3,2 millions d’électeurs, alors que le même nombre sera issu du choix des 300 000 membres des circonscriptions fonctionnelles (corporations professionnelles et syndicats), traditionnellement orientées vers les partis pro-Pékin. Ainsi, même si les partis démocrates remportent largement les élections directes, ils n’obtiendront pas la majorité au Legco, et ne pourront donc pas imposer un chef de l’exécutif issu de leurs rangs.

«Comme l’enjeu n’est pas la prise de pouvoir, le climat n’est pas vraiment tendu», explique Gilles Guiheux, directeur du Centre d’études français sur la Chine contemporaine, basé à Hong-Kong. «Il l’est en tout cas moins que pour le 1er juillet, le 4 juin [date anniversaire du massacre des étudiants chinois sur la place Tiananmen], ou qu’en avril dernier, lorsque l’Assemblée populaire chinoise avait mis son veto au processus de réforme institutionnelle». Le premier juillet dernier, un demi million de personnes étaient en effet descendues dans les rues de Hong-Kong pour manifester leur opposition au contrôle croissant de Pékin sur l’administration du territoire. Les manifestants dénonçaient notamment le refus du gouvernement central de voir le chef de l’exécutif et le Legco élus au suffrage universel direct en 2007 et 2008.

Les opposants harcelés

Pékin semble pourtant avoir tout fait pour gâcher le climat d’élections qui devraient confirmer et renforcer l’influence des partis démocratiques dans les circonscriptions géographiques. Un rapport de l’organisation de défense des droits de l’homme Human Rights Watch vient de dénoncer les manœuvres d’intimidations de Pékin, destinées à discréditer le mouvement démocrate de Hong-Kong. Et la liste des actions de l’ombre imputées au gouvernement central semble s’être particulièrement allongée à l’approche de l’échéance électorale. En juin dernier, trois animateurs radio réputés pour la virulence de leurs attaques envers le gouvernement communiste avaient démissionné coup sur coup, en dénonçant les menaces dont ils avaient été la cible.

Le 13 août dernier, un candidat démocrate était arrêté en Chine pour avoir loué les services d’une prostituée. Jugé à la hâte, Alex Ho a été condamné à six mois de «rééducation par le travail», une lourde peine pour un délit largement répandu et peu sanctionné en Chine. Et pour clôturer la série des opérations de discrédit, l’un des candidats les plus en vue du Parti démocrate a été accusé d’utiliser des fonds publics à des fins personnelles.

Raviver le sentiment nationaliste

Mais la Chine, dont la capacité à manier le bâton n’est plus à démontrer, a également su utiliser la carotte pour appâter les électeurs hong-kongais. Après avoir dénoncé certains représentants démocrates comme «traîtres à la patrie», accusations qui avaient causé la fureur de nombreux Hong-Kongais au printemps dernier, Pékin s’est désormais assigné la tâche de raviver le sentiment nationaliste sur le territoire. A la tournée promotionnelle de Yang Liwei, le premier astronaute chinois, a succédé une gigantesque parade de l’Armée populaire de libération, la première de cette importance depuis la rétrocession de Hong-Kong en 1997. Cette semaine, ce sont les cinquante médaillés d’or olympiques chinois qui ont été réquisitionnés: en visite à Hong-Kong pendant trois jours, ils ont multiplié les rencontres avec le public et se sont livrés à des démonstrations de leurs talents sportifs pour alimenter la flamme nationaliste locale, à défaut de respecter l’esprit de la flamme olympique.

Il est néanmoins difficile d’évaluer l’impact qu’auront ces manipulations pékinoises sur le choix des électeurs. «A l’aune d’une démocratie occidentale, il ne me semble pas que cette série de scandales puissent vraiment discréditer un camp ou l’autre», temporise Gilles Guilheux. «Je ne pense pas que les gens soient dupes: la parade des médaillés olympiques et celle de l’Armée populaire vont-elles leur faire perdre de vue ce qui les a fait descendre dans la rue ?». Réponse dimanche soir.



par Séverine  Bardon

Article publié le 11/09/2004 Dernière mise à jour le 11/09/2004 à 08:22 TU

Audio

Gilles Guiheux

Directeur du Centre d'études français sur la Chine contemporaine à Hong-Kong

«L'enjeu de ces élections est d'influencer la vue du gouvernement central de Pékin sur Hong-Kong.»

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