Côte d'Ivoire
Gbagbo attend un merci
(Photo: AFP)
La presse ivoirienne a largement fait écho à l’opération avorté de la libération des otages français détenus depuis le 20 août 2004 en Irak. Pour obtenir la libération de Christian Chesnot et Georges Malbrunot, quelques parlementaires français dont, Didier Julia ont affirmé avoir été contacté par «des réseaux particuliers» et pour ne pas entraver la diplomatie officielle française, ils ont alors choisi de s’adresser au président Laurent Gbagbo. Selon la presse ivoirienne les interlocuteurs du chef de l’Etat ivoirien lui auraient exposé les exigences de leur mission qui nécessite une certaine « mobilité ». Didier Julia affirme à la télévision française que les avions présidentiels n’ont pas besoin d’autorisation spéciale pour se déplacer de capitales en capitales alors «pourquoi se priver d’un tapis volant », ajoute-t-il.
Mais pourquoi celui-là plus qu’un autre ? Et le parlementaire français de se répandre sur l’humanisme de Laurent Gbagbo et d’ajouter qu’il offrait ainsi l’occasion au président ivoirien de se racheter vis-à-vis de l’opinion française en participant à la libération des journalistes français otages en Irak alors que deux autres journalistes français ont connu des destins tragiques en Côte d’Ivoire. Jean Hélène a été tué à Abidjan par un policier ivoirien le 21 octobre 2003 et Guy-André Kieffer a disparu depuis le 16 avril 2004 à Abidjan. Didier Julia s’est servi de ces événements pour obtenir du président Laurent Gbagbo la mise à disposition d’un avion.
«Ils disent que l’Elysée est au courant»
Cité comme partie prenante dans cette affaire de libération des otages français en Irak, le président Laurent Gbagbo a tenu à expliquer à l’opinion ivoirienne et internationale la raison profonde de sa participation à cette opération. Un communiqué de la présidence de la république retrace les différentes étapes de la négociation entre le président et ses interlocuteurs en précisant toutes les garanties officielles dont Laurent Gbagbo s’est assuré avant d’apporter son aide. Le même communiqué précise que «l’avion qui a été mis à la disposition du député Didier Julia n’a été utilisé à aucune autre fin que celle convenue ».
Le président ivoirien qui n’a guère apprécié les sous-entendus de «looser et de trafiquant d’armes» dont on l’affuble s’est aussi exprimé sur cette opération manquée de la libération des otages français lors d’une réunion publique à Abidjan le 6 octobre. Sa version des faits sur le ton trivial qui lui est propre est rapportée par le quotidien Soir Info. « Quelqu’un a été envoyé pour nous demander un service. Ils ont dit nous sommes un groupe autour du député Julia, nous connaissons suffisamment le réseau de cette partie du monde pour faire libérer les otages. Mais nous avons besoin de nous déplacer. Je leur ai demandé si l’Elysée était au courant. Ils disent que l’Elysée est au courant, mais ayant une diplomatie officielle, l’Elysée ne peut nous envoyer sa diplomatie. Donc nous sommes obligés de nous débrouiller pour avoir un moyen de déplacement (…) J’ai répondu que j’avais trois avions et que je leur donnais un petit Grumman ». Visiblement agacé d’avoir à se justifier Laurent Gbagbo poursuit : « Ils n’ont pas pu libérer les otages, ça devient une affaire de la Côte d’Ivoire. S’ils les avaient libérés, on n’allait même pas parler de nous. Il faut au moins nous dire merci », conclut-il sur cette affaire tout en souhaitant que les otages soient libérés.
par Didier Samson
Article publié le 08/10/2004 Dernière mise à jour le 08/10/2004 à 15:50 TU