Paludisme
Vaccin : des essais encourageants
(Photo : AFP)
Pas de remède miracle mais un espoir. C’est ce que les résultats de l’essai mené au Mozambique, publiés dans la revue médicale Lancet, permettent d’avoir aujourd’hui, de l’avis de l’ensemble des spécialistes du paludisme. L’espoir de mettre au point dans un délai réduit, peut-être d’ici 2010, un vaccin contre une maladie qui tue chaque année plus d’un million de personnes dans le monde, dont 90 % en Afrique subsaharienne où elle représente la première cause de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans.
Jusqu’à présent, aucun des quelque 30 candidats-vaccins contre le paludisme testés sur l’homme n’a permis d’obtenir des résultats aussi prometteurs que le RTS,S/AS02A, mis au point par GSK Biologicals, une unité de recherche pharmaceutique de la firme GlaxoSmithKline, avec l’aide des chercheurs de l’Université de Barcelone et de l’Institut national de la santé du Mozambique, grâce aux financements de la Fondation Bill&Melinda Gates dans le cadre du PATH (Programme pour des technologies appropriées dans le domaine de la santé). Il est vrai que la mise au point d’un vaccin contre le paludisme est particulièrement complexe en raison de la capacité du parasite à se transformer à chaque étape de son évolution et de sa diffusion dans l’organisme. D’autre part, le paludisme qui touche essentiellement les pays en développement, ne fait pas partie des maladies sur lesquelles les grands laboratoires, qui privilégient les recherches susceptibles d’être source de profit, investissent massivement.
30 % de «premières crises» en moins
Deux mille enfants mozambicains âgés de un à quatre ans ont donc participé aux essais sur ce vaccin entre avril 2003 et mai 2004. Ils ont été séparés en deux groupes pour mener un test en double-aveugle. La moitié d’entre eux a reçu trois injections de RTS,S/AS02A. L’autre moitié a été vaccinée contre une maladie infantile classique. Mais les médecins et le personnel médical chargés de s’occuper des patients n’ont pas été informés de la répartition des injections, de manière à ce qu’ils ne puissent pas en tenir compte dans leurs observations et leur pratique.
Au bout de six mois, il s’est avéré que les enfants vaccinés contre le paludisme avaient développé moins de «premières crises» (30 %) que ceux qui ne l’avaient pas été. D’autre part, et ce n’est pas la moindre des satisfactions procurées par cet essai, la fréquence des crises «graves» a été diminuée de manière très importante (58 %) au sein de la population des enfants de moins de deux ans. Le taux d’infection décelé chez les enfants vaccinés était en outre inférieur à celui des enfants non vaccinés (12 % contre 19 %). Et les médecins ont noté que la protection diminuait certes au fil du temps, mais ne disparaissait pas totalement. Au cours des six mois de suivi, le nombre d’anticorps a ainsi baissé fortement (75 %) sans pour autant devenir nul. Les résultats de ces essais menés sur des enfants mozambicains complètent ceux des tests réalisés avec le même vaccin sur des adultes en Gambie, qui avaient obtenu un taux d’efficacité de 34 % après trois injections et de 47 % après un rappel effectué un an plus tard.
A ce stade de l’expérimentation, c’est-à-dire en phase II dite d’efficacité, le candidat-vaccin est apparu fiable et n’a pas provoqué d’intolérance. Ce qui constitue une autre source de satisfaction. Reste maintenant à affiner les résultats et à vérifier notamment l’absence d’interférences nocives avec d’autres vaccins infantiles ou la capacité d’avoir une action efficace à long terme, pour pouvoir passer à la dernière phase d’expérimentation indispensable avant d’envisager une mise sur le marché. La route est donc encore très longue. Car pour assurer une véritable immunité, un vaccin comme le RTS,S/AS02A qui attaque les parasites avant qu’ils ne se multiplient dans le foie en provoquant la production d’anticorps, doit être efficace à 100 %.
Cette avancée significative de la recherche contre le paludisme est importante sur le plan scientifique mais aussi humain. Car la firme GlaxoSmithKline qui a mené les essais, s’est engagée, en échange du soutien financier apporté par la Fondation Bill&Melinda Gates, à vendre les doses du vaccin qui pourrait être développé au prix le plus bas. Donc à faire l’effort nécessaire pour le rendre accessible dans les pays pauvres, notamment d’Afrique subsaharienne, où se trouve la majorité des malades.
par Valérie Gas
Article publié le 15/10/2004 Dernière mise à jour le 15/10/2004 à 16:22 TU