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Proche-Orient

Les radicaux palestiniens boycottent la présidentielle

Le Hamas et le Jihad islamique ont rejeté l'idée d'une élection présidentielle. 

		(Photo : AFP)
Le Hamas et le Jihad islamique ont rejeté l'idée d'une élection présidentielle.
(Photo : AFP)
L’ancien Premier ministre et tout nouveau chef de l’Organisation de libération de la Palestine, Mahmoud Abbas, a multiplié ces derniers jours les contacts avec les différents mouvements palestiniens pour les convaincre de participer à la présidentielle de janvier jugée cruciale pour empêcher un éventuel chaos dans les Territoires palestiniens et garantir la succession du vieux raïs décédé le 11 novembre. Ce compagnon de route de Yasser Arafat est l’un des candidats probables à ce scrutin auquel les mouvements radicaux du Hamas et du Jihad islamique, très populaires dans la bande de Gaza, ont d’ores et déjà annoncé qu’ils ne participeraient pas. Les partis d’opposition de gauche ont pour le moment réservé leur réponse et réclament, comme les groupes islamistes d’ailleurs, l’organisation parallèlement de législatives et de municipales.

La fusillade qui a éclaté dimanche à Gaza au moment ou Mahmoud Abbas –nouvellement nommé président de l’OLP– s’apprêtait à recevoir les condoléances à la suite de la mort de Yasser Arafat a provoqué un électrochoc au sein de la classe dirigeante palestinienne pour qui l’organisation d’élections est désormais devenue le seul moyen d’empêcher l’anarchie dans les Territoires. Mais alors que l’actuelle direction cherche en priorité à doter l’Autorité palestinienne d’un nouveau président élu par ses concitoyens, la plupart des mouvements politiques considèrent comme nécessaires le renouvellement de toutes les institutions. Le groupe radical du Jihad islamique a le premier rejeté l’idée d’une élection présidentielle, suivi rapidement par le Hamas. Le refus de ces deux mouvements de participer à un scrutin chargé de désigner un successeur à Yasser Arafat à la tête de l’Autorité palestinienne n’est pas une surprise en soi dans la mesure où ni l’un ni l’autre ne reconnaît cette instance née des accords d’Oslo. Ils avaient d’ailleurs boycotté le scrutin de 1996 qui avait triomphalement porté à sa tête le vieux raïs rentré d’exil deux ans plus tôt. «L’élection présidentielle est illégale», a ainsi affirmé Mahmoud Zahar, l’un des chefs du Hamas dans la bande de Gaza. Selon lui, elle n’est qu’«un prolongement du processus d’Oslo qui a déjà échoué et qui est fini».

Plus direct, un responsable du Jihad islamique, Nafez Azzam, a affirmé que son organisation ne participerait pas au scrutin de janvier car «le président palestinien élu engagera fatalement un dialogue avec les Etats-Unis et Israël», ce que son mouvement rejette. «Au Jihad islamique nous avons notre propre priorité pour recouvrer notre terre, ce qui signifie qu’une politique de résistance est fondamentale pour nous», a-t-il justifié. Mais ce refus des groupes islamistes palestinien de participer au scrutin présidentiel de janvier ne signifient pas pour autant que ces mouvements rejettent tout processus politique. Bien au contraire, le Hamas et dans une moindre mesure le Jihad islamique –deux mouvements qui jouissent d’une popularité croissante auprès des Palestiniens– sont visiblement prêts à s’impliquer dans des consultations aussi bien législatives que municipales. «Nous réitérons notre opposition à toute monopolisation du pouvoir», a ainsi déclaré un responsable du Hamas, faisant ouvertement allusion au contrôle de l’Autorité palestinienne par l’OLP à laquelle les groupes islamistes palestiniens n’appartiennent pas.

Tenter d’inverser le rapport de forces avec Israël

Lâché par les mouvements radicaux palestiniens, Mahmoud Abbas tente de convaincre les partis d’opposition de gauche de participer au scrutin présidentiel du 9 janvier. Le chef de l’OLP devait rencontrer ce mercredi les dirigeants du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) et du Front démocratique de libération de la Palestine (FDLP), deux formations qui avaient boycotté la présidentielle de 1996. Des responsables de ces deux mouvements ont d’ores et déjà fait connaître leur préférence pour un scrutin général, s’alignant sur les positions défendues par le Hamas et le Jihad islamique. «Le FPLP est pour la tenue d’élections générales. Nous sommes contre la tenue d’un scrutin présidentiel seulement sans l’annonce d’un calendrier pour des législatives et des municipales car nous risquons de nous retrouver avec des institutions désuètes», ainsi justifié Jamal Majdalawi, une membre du bureau politique de ce parti. Cet avis est largement partagé par les dirigeants du FDLP pour qui les scrutins législatif et municipal, s’ils ne peuvent se tenir en même temps que la présidentielle, doivent se dérouler au plus tard en mars prochain comme prévu avant la mort de Yasser Arafat.

L’intransigeance des mouvements islamistes ainsi que les exigences défendues par les partis d’opposition de gauche en disent long sur les difficultés qui attendent Mahmoud Abbas. A défaut de convaincre ces formations de participer à la présidentielle du 9 janvier, le chef de l’OLP tente d’arracher une trêve dans les attentats anti-israéliens, convaincu que l’arrêt des violences, préalable à la tenue de ce scrutin, représente une chance unique d’inverser le rapport de forces avec Israël. Cette élection impliquerait en effet, comme l’a fait remarquer le ministre palestinien Saëb Erakat, «un retrait des tanks israéliens de nos villes et de nos villages». La direction palestinienne semble vouloir ainsi prendre au mot l’administration Bush qui s’est déclarée favorable à l’émergence d’une nouvelle équipe dirigeante, idée à laquelle le gouvernement Sharon peut difficilement s’opposer. Les Etats-Unis ont d’ailleurs fait savoir qu’ils faisaient pression sur Israël pour qu’il prenne des mesures qui faciliteraient la tenue d’élections comme notamment le retrait de ses forces de sécurité de certains secteurs palestiniens.

Cette bonne disposition de Washington pourrait cependant changer du tout au tout si de nouveaux attentats anti-israéliens venaient à être perpétrés. Officiellement les groupes radicaux palestiniens refusent de signer une trêve malgré la volonté d’unité affichée depuis la mort de Yasser Arafat. Ils font notamment valoir que la dernière trêve à laquelle ils s’étaient engagés au printemps 2003 avait volé en éclats au bout de quelques semaines en raison de la poursuite des opérations israéliennes. Dans ce contexte, une nouvelle implication forte des Etats-Unis dans le dossier israélo-palestinien semble aujourd’hui à bien des égards nécessaire pour éviter une dégradation de la situation dans les Territoires palestiniens.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 17/11/2004 Dernière mise à jour le 17/11/2004 à 18:02 TU