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Développement

Le plan de Gordon Brown pour l’Afrique

Gordon Brown, ministre des Finances britannique (D) et son homologue sud-africain Trevor Manuel (G) lors de la conférence de presse sur la Commission pour l’Afrique.(Photo : AFP)
Gordon Brown, ministre des Finances britannique (D) et son homologue sud-africain Trevor Manuel (G) lors de la conférence de presse sur la Commission pour l’Afrique.
(Photo : AFP)
Les ministres de l’Économie et des Finances de quatorze pays se sont retrouvés au Cap en Afrique du Sud, en début de semaine, pour une consultation de la commission pour l’Afrique d’une journée et demie. La commission a été lancée par Tony Blair, le Premier ministre britannique, et doit publier son rapport en mars, à la veille de la réunion du G8 en juillet en Écosse. Gordon Brown, membre de la commission est venu exposer son «plan Marshall» pour l’Afrique au Cap, en Afrique du sud.
De notre envoyée spéciale au Cap

«Qu’il faille favoriser la croissance pour lutter contre la pauvreté, franchement ce n’est pas nouveau et nous n’avons pas entendu de nouvelles idées, en revanche, il y a eu des actes concrets avant la conférence, et ça c’est nouveau», explique Diarisso Sogué, directeur de la prévision et des statistiques au ministère des Finances du Sénégal. Le Sénégal est un des sept pays francophones à avoir envoyé un ministre ou un délégué à la consultation de la Commission pour l’Afrique. L’événement a reçu une couverture médiatique importante du fait de la présence de Gordon Brown, ministre des Finances britanniques, qui clôturait par le Cap une tournée en Afrique de quatre jours, où il a multiplié les actions.

Gordon Brown a annoncé que la Grande-Bretagne rembourserait 10% de la dette multilatérale de la Tanzanie aux bailleurs internationaux comme le FMI ou la banque mondiale. Une aide qui devrait réduire la dette de la Tanzanie de 74 millions de dollars sur dix ans.

Au Mozambique, le ministre britannique a annoncé la même chose assortie d’une annulation de sa dette bilatérale de 150 millions de dollars. Quatre-vingt pour cent de la dette de l’Afrique est due aux institutions internationales comme le FMI.

Fort de ses actions, Brown est arrivé au Cap pour une journée de conférence en demandant aux autres pays du G8 de suivre son exemple, rappelant qu’il avait fallu une journée au Club de Paris pour annuler la dette de l’Irak : «La justice promise sera une justice niée pour toujours si l’on ne soulage pas cette génération du poids des dettes accumulées par les précédentes générations», a déclaré le ministre dans un discours, ajoutant : «à ce rythme, il faudra 150 ans avant d’atteindre les objectifs du millénaire. Le monde entier devrait savoir que 150 ans, c’est trop long pour attendre que justice soit rendue».

Les objectifs du millénaire prévoyaient à l’origine, entre autres, de réduire d’ici 2015 la pauvreté de moitié sur le continent. La commission  pour l’Afrique qui soumettra son rapport à la réunion du G8 qui aura lieu en Écosse en Juillet, a également rappelé quelques évolutions : quinze pays d’Afrique ont connu des taux de croissance de plus de 4% durant ces dix dernières années. «Une aide extérieure maintenant sera encore plus efficace qu’elle ne l’aurait été il y a dix ans», peut-on lire dans le document de consultation.

Convaincre les membres du G8

Le plan de la commission demande également un doublement de l’aide au développement et  des actions pour aider au développement du commerce avec les pays riches.

La proposition d’annulation de la dette a été accueillie très favorablement par tous les ministres présents : «Il faut reconnaître que l’initiative pour les pays les plus endettés lancée en 1996 n’a pas vraiment marché. Il faut faire plus aujourd’hui, notre dette extérieure représente un tiers de notre budget, vous vous rendez compte ce qu’on pourrait faire avec ça !», commente Daniel Njankouo Lamere, ministre délégué chargé des programmes au Cameroun.

L’idée est d’alléger la dette pour que ces pays puissent investir dans les secteurs publics prioritaires : éducation, santé, infrastructures. «Il y a eu moins de langue de bois. On a parlé de la mauvaise utilisation des aides dans le passé, et de l’importance d’agir», commente Masse Lo, de «Lead Afrique francophone» chargé de recueillir l’opinion de la société civile avant la conférence. La commission est censée être un instrument pour renforcer les principes d’investissements contre bonne gouvernance du Nepad.

«Le salut de nos pays dépend de nous à la fin, il ne faut pas se faire d’illusions. Les investisseurs ont besoin d’un environnement favorable pour s’installer ; l’état de droit, des lois appliquées, si on ne fait pas ça, on peut toujours attendre», souligne Diarisso Sogué du Sénégal.

Le défi pour Gordon Brown est de convaincre les membres du G8 de suivre la proposition de la commission pour l’Afrique. Une commission composée de personnalités éclectiques, «pas seulement là parce qu’il faut être là, mais des gens vraiment impliqués» remarque un participant à la conférence. Menée par le Premier ministre britannique Tony Blair, elle rassemble des personnalités comme Anna Kajumulo Tibaijuka, secrétaire exécutive de UN Habitat. Trevor Manuel, ministre des Finances sud-africain, Lina Mohohlo, gouverneur de la banque du Botswana, mais aussi Michel Camdessus, le représentant de Jacques Chirac pour l’Afrique, et le chanteur irlandais Bob Geldof  qui faisait partie du concert Live Aid organisé en 1985 pour les victimes de la famine en Afrique et qui fait régulièrement campagne pour l’annulation de la dette. Nelson Mandela a d’ailleurs annoncé qu’il se rendrait à Londres en février pour soutenir l’action de la commission lors d’une réunion des ministres des Finances du G7.

par Stéphanie  Savariaud

Article publié le 19/01/2005 Dernière mise à jour le 19/01/2005 à 11:02 TU