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Il y a 60 ans, la libération des camps

Le Mémorial de la Shoah ouvre ses portes

Le Mur des Noms du Mémorial de la Shoah.(Photo : Vincent Pfrunner)
Le Mur des Noms du Mémorial de la Shoah.
(Photo : Vincent Pfrunner)
Inauguré par le président de la République, Jacques Chirac, le 25 janvier 2005, l’ouverture au public du Mémorial de la Shoah, au cœur du 4ème arrondissement de Paris, est prévue le 27 janvier 2005. La date choisie est symbolique et correspond d’une part au soixantième anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau, et d’autre part à la Journée européenne de la mémoire de l’holocauste et de la prévention des crimes contre l’humanité. Le lieu (5 000 m2) a pour vocation d’enseigner une page de l’histoire qui hante encore notre quotidien. Au-delà d’un objectif de transmission, il a pour vocation d’interpeller de manière éducative le public en général, et les jeunes générations en particulier, sur des notions de tolérance, de liberté et de démocratie, à partir d’une page tragique de l’Histoire, marquée par la déportation de milliers d’hommes, femmes et enfants juifs déportés de France.

Vue sur l'entrée principale et le Mur des noms prise du bâtiment.
(Photo : Renaud Hasselmann)
Tout comme le musée de l’Holocauste à Washington et Yad Vashem à Jérusalem, le Mémorial de la Shoah à Paris devient l’institution de référence en Europe pour la Shoah («catastrophe» en hébreu). Il réouvre ses portes, à Paris, après trois années de grands travaux d’aménagement, et  comprendra désormais des espaces d’expositions, un centre multimédia, une salle de lecture. De nombreuses activités et des cycles de débats proposés aux visiteurs sont prévus pour sensibiliser les jeunes générations, afin que le sujet ne soit plus porté par les seuls survivants et contemporains de ces crimes commis contre l’humanité. «Il y a eu 76 000 juifs et 3 000 non juifs, notamment des résistants, qui ont été déportés de France vers le camp (d’Auschwitz). Deux mille cinq cents en sont revenus. Nous ne devons pas être plus de 450 Français à vivre encore», déclarait Raphaël Esrail, secrétaire général de l’Union des déportés d’Auschwitz, le 16 janvier 2005 -lors de la réunion des dizaines d’anciens déportés réunis à Paris pour le 60ème anniversaire de la libération du camp.

«Une voix humaine qui a connu l’enfer est plus forte que des livres d’histoire»

«Une voix humaine qui a connu l’enfer est plus forte que des livres d’histoire», soulignait tristement Rose, 88 ans, ce même jour-là: la commémoration, et un lieu permanent pour rappeler la tragédie doivent donc permettre de lutter contre l’oubli auprès des jeunes générations. Dans les espaces pédagogiques se dérouleront des ateliers pour les enfants et des animations pour les classes d’enseignants; anciens déportés, résistants, enfants cachés apporteront leurs témoignages. A titre d’exemple, un atelier s’appellera l’Histoire s’affiche: on s’y interrogera sur la manière de voir les images pour mieux comprendre notre histoire en proposant une lecture approfondie d’affiches de la dernière guerre, en analysant le graphisme, le choix des mots, les symboles utilisés. Par ailleurs, un nouveau site Internet, accompagné d’un site plus particulièrement destiné aux enfants âgés de 7 à 12 ans, présentera l’institution dans sa globalité, et proposera une importante documentation en ligne.

Par ailleurs l’institution proposera des expositions itinérantes à la disposition des établissements scolaires, des collectivités et des associations qui en feront la demande, abordant des thèmes autour de la Shoah comme Le temps des rafles, Le ghetto de Varsovie, Paroles d’étoiles, Mémoire d’enfants cachés entre 1939-1945.  Des visites sur des lieux de mémoire comme Auschwitz seront également organisées tout au long de l’année, en présence d’anciens déportés. Des activités éditoriales sont envisagées, destinées aux professionnels, mais aussi aux lycéens, collégiens, et enseignants. Au périodique Revue d’histoire de la Shoah, édité deux fois par an, qui donne un aperçu thématique des chantiers d’étude, des pistes de réflexion, et des chantiers actuels de l’historiographie du judéocide, ce sont des documents de référence -glossaire, encyclopédie multimédia de la Shoah, chronologies, cartes- qui rendront compte autant de la résistance juive en France que des chronique des ghettos polonais par exemple.

Au cœur du quartier historique du Marais

Le bâtiment est situé au cœur du quartier historique du Marais, où depuis près de neuf siècles la communauté juive s’est installée. Eric de Rothschild , président de ce monument, rappelle qu’il trouve «naturellement sa place dans un quartier où la communauté juive s’est installée, a développé des commerces et de l’artisanat, a accueilli les réfugiés des premiers pogroms d’Europe de l’Est, et a connu sous l’occupation de la France par les Allemands, les rafles et la déportation vers les camps nazis d’où peu sont revenus». Le Mémorial a recensé les nom, prénom, et année de naissance de chaque personne déportée, dont l’inscription est gravé sur un grand Mur des noms, par année de déportation et par ordre alphabétique. Et parce que malheureusement des oublis ont pu être commis, un espace est réservé sur la pierre afin de rajouter le nom de ceux qui doivent y figurer.

Le lieu regroupe le Mémorial du martyr juif inconnu et le centre de documentation juive contemporaine qui détient des archives et des témoignages des crimes commis contre les Juifs. Le volume d’origine, le Mémorial du martyr juif inconnu, a été construit entre 1953 et 1956, d’après le projet des architectes Alexandre Perzitz, Georges Goldberg et Léon Arretche, et les façades, volumes extérieurs et crypte ont été conservés. Un cylindre symbolise les camps de la mort; la façade frontale est revêtue de pierre, et les façades latérales du bâtiment d’origine s’abritent derrière une trame de béton dans laquelle se découpe l’étoile de David. A ce volume initial ont été rattachés trois nouveaux bâtiments cédés par la Ville de Paris., d’architecture plus ancienne (vers 1840); ceci étant, l’aménagement intérieur du Mémorial a redonné une unité à l’ensemble.

par Dominique  Raizon

Article publié le 24/01/2005 Dernière mise à jour le 24/01/2005 à 17:59 TU