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Antisémitisme

Indignation après l'incendie d'un foyer social juif

Le procureur de la République adjoint : «&nbsp;<I>nous sommes en face d’un incendie volontairement provoqué qui aurait pu prendre une ampleur considérable</I>&nbsp;». 

		(Photo : AFP)
Le procureur de la République adjoint : « nous sommes en face d’un incendie volontairement provoqué qui aurait pu prendre une ampleur considérable ».
(Photo : AFP)
Un incendie criminel a ravagé un centre social juif dans le XIème arrondissement de Paris, dans la nuit de samedi à dimanche. Des inscriptions nazies et antisémites ont été retrouvées sur place. Une organisation islamiste inconnue a revendiqué dimanche la responsabilité de l’incendie dans un communiqué diffusé sur Internet.

Le sinistre a dévasté le local d’une centaine de mètre carré. L’alerte a été donnée vers 3 heures 30 du matin, dimanche, lorsqu’un voisin importuné par la fumée a prévenu les pompiers qui sont intervenus immédiatement et ont rapidement maîtrisé l’incendie. Aucune victime n’est à déplorer, mais l’affaire aurait pu tourner au drame : une quinzaine de logements sont en effet occupés dans les étages supérieurs de l’immeuble qui abritait le centre social, situé au rez-de-chaussée. Pour le procureur de la République adjoint, il n’y a aucune ambiguïté : « nous sommes en face d’un incendie volontairement provoqué qui aurait pu prendre une ampleur considérable ». Le caractère raciste de l’attentat est attesté par les inscriptions relevées par les enquêteurs, croix gammées (tracées à l’envers) et graffitis antisémites à l’orthographe approximative.

Pour les juifs de France, c’est un nouveau coup dur et leurs représentants n’ont pas manqué d’exprimer leur inquiétude et leur colère. Le grand rabbin de France réclame une action du gouvernement. Le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) parle d’un « acte odieux qui défigure la France » et son président dénonce le « laxisme » de la justice. L’Union des étudiants juifs de France (UEJF) demande une campagne « de sensibilisation contre l’antisémitisme ». Les voisins et habitués du centre sont écœurés et soulignent le caractère social de l’établissement fréquenté par des gens aux revenus évidemment modestes. Le patron du café voisin rapporte à l’AFP que le centre recevait notamment des personnes âgées défavorisées. « Elles sont doublement traumatisées, après avoir connu les rafles pendant la guerre et, aujourd’hui, ce feu ».

Le Centre social juif de la rue Popincourt avait été créé dans les années 1920 par des juifs sépharades originaires de l’Empire ottoman. Il avait été transformé en synagogue avant de retrouver sa vocation de lieu d’accueil et de « resto du cœur » il y a une vingtaine d’années.

Revendication d’un groupe inconnu

Cet incendie criminel a aussi provoqué une très vive indignation au sein de la classe politique dans le contexte de recrudescence des actes spécifiquement antisémites en France. Le président de la République a fait part de sa « profonde indignation » et exprimé « sa pleine solidarité » à la communauté juive de France. Jacques Chirac a souligné « la détermination absolue des pouvoirs publics à rechercher les auteurs de ces agissements inacceptables pour qu’ils soient jugés et condamnés avec la plus grande sévérité ». Le Premier ministre, qui s’est rendu sur place, a rappelé que « les auteurs de tels crimes encourent des peines de prison pouvant aller jusqu’à vingt ans ». « C’est une insulte de voir des croix gammées au moment où l’on célèbre la libération de notre pays », a notamment déclaré Jean-Pierre Raffarin, tandis que son ministre de l’Intérieur demandait au préfet de police de Paris de « mobiliser tous les moyens d’enquête nécessaire » en vue d’identifier les auteurs de cet attentat. Le ministre de la Justice a annoncé que « sur instruction vraiment très forte du président de la République, le gouvernement a déclaré la guerre au racisme, à tous les racismes ».

Le maire de Paris s’est également rendu sur les lieux et a rappelé que ces événements « interviennent dans un climat malsain et dangereux ». Le président de la région Ile-de-France propose de faire de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme « une grande cause nationale » et a affirmé que sa région était « prête à financer un grand programme pédagogique de lutte contre toutes les formes de racisme et d’intolérance pour que les jeunes apprennent à mieux vivre ensemble dans les lycées ». Le recteur de la mosquée de Paris a exprimé sa vive émotion et sa solidarité. Dalil Boubakeur s’est déclaré « écœuré par la résurgence inquiétante de l’antisémitisme ». Il a exprimé sa volonté de s’unir avec la communauté juive « dans un même combat contre le racisme, l’antisémitisme et pour la paix ».

Dimanche, une formation inconnue, le « groupe des partisans de la guerre sainte islamique », a revendiqué la destruction de l’établissement dans un communiqué diffusé sur un site internet islamiste. Selon le document, l’attaque a été perpétrée « en réponse aux actes racistes (commis par des) juifs en France contre l’islam et les musulmans et la profanation de cimetières musulmans par des juifs ». L’authenticité de la revendication n’a pas été établie.



par Georges  Abou

Article publié le 23/08/2004 Dernière mise à jour le 23/08/2004 à 14:16 TU