Proche-Orient
Israël-Palestine: le contact renoué
(Photo: AFP)
Le climat serait-il en train de changer pour le meilleur entre Palestiniens et Israéliens ? De nombreux précédents incident à la prudence, mais les gestes accomplis de part et d’autre ces dernières heures sont autant de signes positifs à l’appui de cet espoir. Pourtant, le gouvernement israélien qui avait favorablement accueilli l’élection de Mahmoud Abbas (Abou Mazen) s’était empressé de faire savoir qu’il ne disposerait d’aucun état de grâce. La pluie de roquettes Qassam lancées par le Hamas sur la localité israélienne de Sderot avait radicalisé l’opinion israélienne et l’attentat de Karni (nord de la bande de Gaza) dans lequel six Israéliens ont été tués s’était immédiatement traduit, le 14 janvier, par un gel des contacts politique avec les Palestiniens.
Or, voici que le gouvernement de l’État hébreu annonce coup sur coup une relance des contacts avec les Palestiniens destinés à préparer la rencontre tant attendue entre le président de l’autorité palestinienne Mahmoud Abbas et le Premier ministre israélien Ariel Sharon, l’arrêt des assassinats ciblés à l’encontre des militants palestiniens soupçonnés de terrorisme par Israël, et que –pour le moment du moins– les Israéliens s’abstiennent désormais de critiquer les efforts du leader palestinien nouvellement élu d’obtenir une trêve de la part du Hamas, alors que jusqu’alors, Israël exigeait son désarmement et son démantèlement pur et simple.
Il est vrai que, comme l’a reconnu le vice-Premier ministre israélien Ehoud Olmert, Israël doit répondre aux efforts déployés par Mahmoud Abbas pour empêcher les attaques antiisraéliennes. Le gouvernement israélien reconnaît, ce faisant, que ces efforts sont réels et ne se limitent pas à des déclarations, par ailleurs courageuses et saluées comme telles par Israël. D’une part, Mahmoud Abbas s’est engagé dans un processus politique avec les «activistes» palestiniens, cherchant à intégrer dans les services de sécurité les militants des Brigades des martyrs d’Al Aqsa (qui se situent dans la mouvance du Fatah, son propre parti), d’autre part d’offrir un rôle au Hamas dont le mouvement islamiste puisse se satisfaire, du moins pour quelque temps.
Le Hamas ne manque pas de militants prêts à en découdre avec Israël, mais depuis les assassinats par Israël de ses leaders historiques, cheikh Yassine et Adelaziz Al Rantissi, sa direction politique est quelque peu flottante. Aussi l’assurance, désormais confortée par la décision israélienne, que ses militants ne seront plus assassinés par l’armée israélienne devrait l’inciter à se montrer plus ouvert à la perspective d’une trêve, trêve durant laquelle Mahmoud Abbas espère consolider sa position grâce à la remise en marche d’un processus politique bénéficiant de façon immédiate et visible à la population.
Processus politique et déploiement policierOutre ce processus politique, le président palestinien a déployé ses soldats et policiers le long de la frontière avec Israël afin de prévenir les attaques antiisraéliennes, notamment le lancement des missiles Qassam contre les localités israéliennes. C’est un geste clair, visible et sans ambiguïté, compris comme tel aussi bien des Palestiniens que des Israéliens. Cela permet aussi –enfin !– une coordination israélo-palestinienne pour le retrait israélien de Gaza et de cinq localités de Cisjordanie, qu’Ariel Sharon avait au départ envisagé comme un retrait unilatéral.
D’ores et déjà, les forces de sécurité palestiniennes se sont positionnés à proximité des localités de Ramallah, de Qalqiliya, de Toulkarem et de Jéricho que les Israéliens se préparent –à nouveau– à évacuer. Pour Mahmoud Abbas, pour limité que soit ce retrait, c’est un signe fort de la souveraineté retrouvée sur une parcelle du territoire réoccupé en 2002, lors de l’opération Remparts.
Pour autant, la bonne entente affichée entre Palestiniens et Israéliens ne doit pas faire illusion. Pour Ariel Sharon, le retrait de Gaza et des cinq localités de Cisjordanie est à la fois un début et une fin. Pour Mahmoud Abbas, ce n’est évidemment qu’un début. Les Israéliens ont feint de ne voir que propos de campagne dans les déclarations de Mahmoud Abbas sur les frontières, les réfugiés et Jérusalem. Mais sur le fond, rien ne différencie la perspective nationale du nouveau président de l’Autorité palestinienne de celle de son prédécesseur Yasser Arafat.
Le style et la tactique ont, certes, radicalement changé, sûrement pas l’objectif: un État palestinien dans les frontières de 1967, moyennant quelques ajustement mineurs, avec Jérusalem pour capitale. Or, rien n’indique, bien au contraire, que les Israéliens soient sur ce point prêts à accorder à Abou Mazen ce qu’ils ont toujours refusé à Arafat.
par Olivier Da Lage
Article publié le 26/01/2005 Dernière mise à jour le 27/01/2005 à 16:55 TU