Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

France

Les chantiers de Thierry Breton

Hervé Gaymard (à gauche sur la photo) a remis lundi matin les rênes du ministère de l'Economie et des Finances à Thierry Breton.(Photo : AFP)
Hervé Gaymard (à gauche sur la photo) a remis lundi matin les rênes du ministère de l'Economie et des Finances à Thierry Breton.
(Photo : AFP)
Le nouveau ministre de l’Economie et des Finances, Thierry Breton, a pris ses fonctions, lundi 28 février à Bercy. Il succède à Hervé Gaymard qui a dû démissionner suite à la polémique autour de son luxueux logement de fonction et de son patrimoine. Ce capitaine d’industrie de 50 ans qui déclare vouloir inscrire son action «dans la continuité», n’aura pas la tâche facile. L’économie française donne des signes d’essoufflement : progression du chômage, malaise social, déficit public trop élevé. Alors qu’une journée d’action est annoncée le 10 mars prochain pour contester la politique économique et sociale du gouvernement.

C’est ce lundi à la mi-journée qu’a eu lieu au ministère de l’Economie et des Finances la passation de pouvoir entre Hervé Gaymard et Thierry Breton. Celui qui était jusqu’à vendredi soir PDG du groupe France Télécom a donc pris ses fonctions à la tête de Bercy. Thierry Breton qui accède pour la première fois à une fonction ministérielle, a déclaré, lors de la passation de pouvoir vouloir inscrire son action «dans la continuité» de ses prédécesseurs Francis Mer, Nicolas Sarkozy et Hervé Gaymard. Depuis dix ans, Bercy a usé huit ministres de l'Economie.

La passation de pouvoir entre les deux hommes a été courte: une demi-heure. Le temps pour Hervé Gaymard de s’entretenir sur «les dossiers les plus chauds». Premier grand chantier qui attend Thierry Breton : celui de l’emploi. Alors que le chômage a atteint son niveau le plus élevé depuis cinq ans. Les économistes s'attendaient à une stabilité, voire une baisse du nombre de chômeurs en France, c'est une hausse qui est apparue avec un taux de 10%. Une journée d’action pour contester la politique économique et sociale du gouvernement sur l’assouplissement des 35 heures, les salaires bloqués et l’inquiétude sur l’emploi est annoncée pour le 10 mars prochain.

L’autre gros dossier auquel devra s'atteler Thierry Breton est celui du pouvoir d’achat et de la consommation. La semaine prochaine, doit être présenté en Conseil des ministres le projet de loi Gaymard-Jacob qui comprend plusieurs volets. L’un vise à réformer la loi Galland, sur les prix dans la grande distribution, grâce à laquelle le Premier ministre se fixe l’objectif d’une basse des prix de 5%. L’autre porte sur la transmission des entreprises, leur accès au financement et traitera du statut de l’entrepreneur individuel.

Un budget «nouvelle manière»

Une des premières tâches de Thierry Breton sera également de reprendre là où Hervé Gaymard avait laissées les discussions sur la réforme du Pacte de stabilité. C’est également la semaine prochaine -les 7 et 8 mars- que les ministres européens des Finances doivent se retrouver pour étudier le texte de compromis sur la réforme du Pacte de stabilité rédigé par le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker. La France a promis de ramener son déficit public à 2,9% du PIB cette année.

S’il respecte le programme des privatisations annoncé par Hervé Gaymard, Thierry Breton devrait également maintenir les ouvertures de capital d'entreprises publiques : Gaz de France devait être introduite en bourse d'ici l'été, le groupe nucléaire Areva d'ici la fin de l'été et Electricité de France (EDF) d'ici la fin de l'année. Il devra aussi mettre en bourse la Société des autoroutes du Nord et de l’Est de la France (Sanef) d’ici début avril.

Thierry Breton sera également le ministre des Finances qui mettra le premier en musique un budget «nouvelle manière» établi selon de nouveaux principes destinés à responsabiliser davantage les ministres face à la dépense. Quel va être le poids de Bercy par rapport à des ministres très politiques qui ont des budgets considérables comme Jean-Louis Borloo à la Cohésion sociale ou Michel Alliot-Marie à la Défense ? C’est une question de fond à laquelle n’a pas eu à faire face son prédécesseur. Thierry Breton semble en tout cas avoir à cœur d’éviter les erreurs qui ont coûté son poste à Hervé Gaymard. Son entourage a fait savoir que le nouveau ministre de l'Economie, père de trois enfants, resterait dans le logement privé qu'il possède dans le XIVe arrondissement de Paris et qu'il ne recevrait ni prime, ni indemnité pour prix de son départ de la direction de France Télécom.

Thierry Breton a également démissionné de ses mandats d’administrateur qu’il détenait dans plusieurs sociétés, Thomson, Schneider Electric et le groupe bancaire franco-belge Dexia. Comme c’est la règle pour les ministres, il a également cédé ses 11 000 actions France Télécom et confié ses autres valeurs à un gestionnaire indépendant. Une manière de répondre aux objections soulevées par le porte-parole du Parti socialiste Julien Dray et le député socialiste Arnaud Montebourg qui avaient relevé dimanche un «conflit d'intérêt» entre les anciennes et les nouvelles fonctions de Thierry Breton.

A France Télécom, Didier Lombard, jusque là en charge de la Mission Technologies a été désigné par le conseil d’administration à la tête du groupe. Le groupe a fait le choix de la continuité pour rassurer les marchés, Didier Lombard va poursuivre le plan de redressement de l'entreprise qui est considérablement endettée. Ses premières déclarations seront écoutées attentivement par le ministre délégué à l’Industrie. Patrick Devedjian a bataillé ferme ces derniers mois avec Thierry Breton, alors président de France Télécom, sur la question de la hausse de l’abonnement du téléphone fixe. Sans parler de «conflit d’intérêt», la nomination d’un proche de Thierry Breton à la tête de France Télécom risque de compliquer la tâche de Patrick Devedjian.


par Myriam  Berber

Article publié le 28/02/2005 Dernière mise à jour le 28/02/2005 à 17:21 TU