Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Nations unies

Kofi Annan défend son Conseil des droits de l’Homme

Kofi Annan s'adresse à l'Assemblée générale des Nations unies pour présenter sa réforme des droits de l'Homme.(UN Photo: Eskinder Debebe)
Kofi Annan s'adresse à l'Assemblée générale des Nations unies pour présenter sa réforme des droits de l'Homme.
(UN Photo: Eskinder Debebe)
Trois semaines après avoir présenté son ambitieux projet de réforme des institutions de l’ONU, Kofi Annan s’est attaqué au chantier qui semble lui tenir le plus à cœur, la refonte de la Commission des droits de l’Homme de Genève. Selon le secrétaire général de l’organisation internationale en effet, «l’effritement de la crédibilité» de cette institution a largement «terni la réputation du système des Nations unies» dans son ensemble. Et il est grand temps, a-t-il insisté, de «prendre un nouveau départ».

Kofi Annan a soigneusement pesé ses mots pour dire aux Etats membres de la Commission des droits de l’Homme de Genève (CDH) tout le mal qu’il pensait de cette institution onusienne, créée en 1947 pour promouvoir les libertés et interpeller les Etats qui leur portent atteinte. «Nous avons atteint un stade où la baisse de crédibilité de la Commission porte une ombre sur la réputation de Nations unies dans leur ensemble», leur a-t-il ainsi asséné. Le secrétaire général de l’ONU a également estimé que des réformes fragmentaires ne pouvaient suffire. Et «faute d'une refonte de notre machinerie pour les droits de l'homme, nous pourrions être incapables de regagner la confiance du public à l'égard des Nations unies elles-mêmes», a-t-il conclu.

Lors de la présentation le 21 mars dernier de son projet de réforme des institutions de l’ONU, Kofi Annan avait proposé de remplacer la CDH, où siègent actuellement 53 Etats représentant les grandes régions du monde, par un organe plus restreint et aux compétences plus élargies. «La création de ce Conseil des droits de l’Homme serait l’occasion de prendre un nouveau départ» a-t-il plaidé de nouveau à Genève en invitant la communauté internationale à prendre rapidement une décision de principe concernant sa mise en place. Ce conseil, au sujet duquel le secrétaire général n’a évoqué jeudi ni la taille, ni le mandat, ni la composition, figure en effet, aux côtés de l’élargissement du Conseil de sécurité, en tête de ses priorités de réforme de l’organisation internationale.

Pour un système d’alerte efficace

Contrairement à la CDH qui se réunit six semaines par an, ce nouvel organe siégerait en permanence. Ses membres seraient élus à la majorité des deux tiers par l’Assemblée générale de l’ONU et non sur une base régionale comme c’est le cas aujourd’hui. Quant à sa tâche première, elle consistera à «évaluer périodiquement la manière dont tous les Etats s’acquittent de leurs obligations en matière de droits de l’Homme». Jusqu’à présent, la CDH se contentait en effet de se pencher sur la situation des libertés dans un pays lorsqu’un ou plusieurs Etats lui en faisaient la demande à travers une résolution. Cette situation faisait que seule une poignée de coupables habituels tels la Corée du Nord, la Biélorussie, Cuba ou la Birmanie, essuyaient des condamnations tandis que d’autres pays, violant de façon tout aussi notoire les droits de l’Homme comme la Chine ou la Russie, étaient épargnés grâce au jeu des alliances politiques.

S’adressant aux membres de la Commission, Kofi Annan a rappelé qu’en 2004, après avoir observé une minute de silence en mémoire des victimes du génocide rwandais, la CDH s’était déclarée «résolue à faire en sorte qu’un tel déni d’humanité ne puisse plus jamais se reproduire. Aujourd’hui, le moment est venu à nouveau de prouver notre engagement», a-t-il ajouté. Dans l’esprit du secrétaire général en effet, le Conseil des droits de l’Homme qu’il souhaite voir mis en place pourrait «porter à l’attention de la communauté mondiale les crises exigeant que des mesures soient prises d’urgence». A titre d’exemple, Kofi Annan n’a pas hésité à évoquer «les effroyables souffrances» au Darfour, estimant que la communauté internationale n’avait «déjà que trop tardé» à mettre un terme aux exactions contre les civils dans cette région de l’Ouest du Soudan.

Les déclarations du secrétaire général de l’ONU sont loin d’être anodines. En pointant la situation au Darfour, il a en effet braqué la lumière sur les défaillances de la CDH qui l’année dernière s’est contentée –par 50 voix pour, une contre et deux abstentions– d’exprimer son inquiétude sur la situation dans cette région. A aucun moment, et alors que les combats faisaient rage, elle n’a en effet formellement condamné le gouvernement de Khartoum dont les milices janjawids étaient pourtant à l’origine des exactions commises contre les populations civiles. On estime à 180 000 le nombre de personnes mortes au Darfour depuis le début du conflit en février 2003 et à deux millions celui des déplacés.

 


par Mounia  Daoudi

Article publié le 08/04/2005 Dernière mise à jour le 08/04/2005 à 17:16 TU