Liban
Le camp pro-syrien se fissure, les élections menacées
La décision d'Omar Karamé porte un nouveau coup dur à la crise politique qui secoue le Liban depuis l'attentat contre Rafic Hariri.
Incapable de former un gouvernement, Omar Karamé a rendu son tablier et a annoncé son retrait du rassemblement loyaliste. Le camp pro-syrien se fissure et la tenue des élections à la date prévue, en mai, semble de plus en plus difficile.
De notre correspondant à Beyrouth
La décision du Premier ministre désigné Omar Karamé de renoncer à former un gouvernement porte un coup dur aux efforts visant à trouver une issue à la crise politique sans précédent qui secoue le Liban depuis l’assassinat de l’ancien président du Conseil Rafic Hariri, le 14 février. Le départ de Karamé, un leader sunnite du nord du Liban, réduit les espoirs de la tenue des élections à la date prévue, comme le souhaitent l’opposition libanaise et la communauté internationale. On voit mal, en effet, comment les électeurs pourraient être appelés aux urnes avant le 2 mai conformément aux dispositions de la Constitution (un mois avant l’expiration du mandat du parlement actuel, le 31 mai), alors que le pays est sans Premier ministre ni gouvernement et, surtout, sans loi électorale.
L’opposition libanaise soupçonne le pouvoir allié de Damas de vouloir reporter ces élections, sachant que dans le climat actuel marqué par la forte émotion après l’assassinat de Rafic Hariri, il n’a aucune chance de les remporter. La France et les États-Unis ont d’ailleurs immédiatement réagi en insistant sur la nécessité d’organiser le scrutin dans les délais constitutionnels. Après un entretien avec le prince Abdallah d’Arabie saoudite, à Paris, le président français Jacques Chirac a mis l’accent sur l’importance de la tenue des élections à la date prévue. Même discours à Washington, où la secrétaire d’État Condoleezza Rice a été plus explicite en affirmant que le scrutin devrait avoir lieu fin mai.
L’opposition en Europe
Pendant ce temps, Walid Joumblatt, l’une des principales figures de l’opposition, s'est rendu à Strasbourg pour des entretiens avec le président du Parlement européen, Josep Borrel, sur les dangers qui pèsent sur les législatives. Le chef druze s’est également rendu à Paris pour les mêmes raisons. Un autre membre de l’opposition, le député Marwan Hamadé, a averti qu'un report des élections provoquerait une « grève générale et de nouvelles manifestations ».
Sensible à toutes ces pressions locales et internationales, le président de la République Émile Lahoud a fait un geste de bonne volonté en fixant au vendredi 15 avril la date des consultations parlementaires obligatoires pour désigner un successeur à Karamé. Il a voulu ainsi accélérer le processus constitutionnel pour la formation d’un nouveau cabinet, condition indispensable pour la tenue du scrutin. Mais même s’il a les meilleures intentions du monde, sa tâche n’est pas facile. S’il arrive à désigner un nouveau Premier ministre, il n’est pas dit que cette personnalité réussira là où Karamé a échoué. Car les obstacles les plus infranchissables ne sont pas venus de l’opposition mais de ses alliés.
D’ailleurs, Omar Karamé n’a pas mâché ses mots lors de la conférence de presse annonçant son départ. Il a dit avoir pris cette décision en raison des «divergences qui sont apparues» dans le camp pro-syrien. «Face à la poursuite des divergences, je suis arrivé à une impasse. Je renonce à former un gouvernement», a-t-il affirmé, avant d’annoncer son retrait du rassemblement qui regroupe tous les partis alliés de la Syrie au Liban. Le Premier ministre démissionnaire a fait état de «demandes contradictoires» concernant l’attribution des portefeuilles entre les pro-syriens. Il s’est déclaré déçu du fait que les loyalistes n’ont pas respecté leurs promesses de lui laisser les mains libres pour la formation du gouvernement. «J'avais déjà donné ma lettre de démission au chef de l'État lundi soir et le président m'a demandé de temporiser pour donner le temps à des tractations de dernière minute. Mais comme je ne vois pas de changement, je réaffirme ma décision de démissionner», a-t-il conclu.
Selon certains observateurs, l’échec de la formation du gouvernement est l’illustration parfaite de l’affaiblissement de l’influence de Damas qui jouait, ces quinze dernière années, le rôle de modérateur entre les différentes forces politiques libanaises. Avec la disparition de l’arbitre qui gérait ses conflits internes, le régime, en pleine déliquescence, se sent perdu. L’opposition estime, quant à elle, que le sabotage des efforts pour former un gouvernement fait parti d’un plan concerté visant à gagner du temps pour provoquer, de facto, le report du scrutin. Ces milieux opposants rappellent que Karamé a perdu un mois et demi entre bouderies et concertations interminables. Il avait été désigné le 10 mars pour se succéder à lui-même. Deux semaines auparavant, il avait démissionné sous la pression de la rue et de l’opposition parlementaire qui accusaient son gouvernement et la Syrie d’être responsables de l’assassinat de Rafic Hariri. Et pendant tout cette période, il n’a pas du tout semblé pressé de former un gouvernement.
Ce retour à la case départ ouvre la voie à toute sorte de développements. La poursuite des manifestations populaires de part et d’autre est le scénario le plus probable. La reprise des attentats à l’explosif, le plus effrayant.
La décision du Premier ministre désigné Omar Karamé de renoncer à former un gouvernement porte un coup dur aux efforts visant à trouver une issue à la crise politique sans précédent qui secoue le Liban depuis l’assassinat de l’ancien président du Conseil Rafic Hariri, le 14 février. Le départ de Karamé, un leader sunnite du nord du Liban, réduit les espoirs de la tenue des élections à la date prévue, comme le souhaitent l’opposition libanaise et la communauté internationale. On voit mal, en effet, comment les électeurs pourraient être appelés aux urnes avant le 2 mai conformément aux dispositions de la Constitution (un mois avant l’expiration du mandat du parlement actuel, le 31 mai), alors que le pays est sans Premier ministre ni gouvernement et, surtout, sans loi électorale.
L’opposition libanaise soupçonne le pouvoir allié de Damas de vouloir reporter ces élections, sachant que dans le climat actuel marqué par la forte émotion après l’assassinat de Rafic Hariri, il n’a aucune chance de les remporter. La France et les États-Unis ont d’ailleurs immédiatement réagi en insistant sur la nécessité d’organiser le scrutin dans les délais constitutionnels. Après un entretien avec le prince Abdallah d’Arabie saoudite, à Paris, le président français Jacques Chirac a mis l’accent sur l’importance de la tenue des élections à la date prévue. Même discours à Washington, où la secrétaire d’État Condoleezza Rice a été plus explicite en affirmant que le scrutin devrait avoir lieu fin mai.
L’opposition en Europe
Pendant ce temps, Walid Joumblatt, l’une des principales figures de l’opposition, s'est rendu à Strasbourg pour des entretiens avec le président du Parlement européen, Josep Borrel, sur les dangers qui pèsent sur les législatives. Le chef druze s’est également rendu à Paris pour les mêmes raisons. Un autre membre de l’opposition, le député Marwan Hamadé, a averti qu'un report des élections provoquerait une « grève générale et de nouvelles manifestations ».
Sensible à toutes ces pressions locales et internationales, le président de la République Émile Lahoud a fait un geste de bonne volonté en fixant au vendredi 15 avril la date des consultations parlementaires obligatoires pour désigner un successeur à Karamé. Il a voulu ainsi accélérer le processus constitutionnel pour la formation d’un nouveau cabinet, condition indispensable pour la tenue du scrutin. Mais même s’il a les meilleures intentions du monde, sa tâche n’est pas facile. S’il arrive à désigner un nouveau Premier ministre, il n’est pas dit que cette personnalité réussira là où Karamé a échoué. Car les obstacles les plus infranchissables ne sont pas venus de l’opposition mais de ses alliés.
D’ailleurs, Omar Karamé n’a pas mâché ses mots lors de la conférence de presse annonçant son départ. Il a dit avoir pris cette décision en raison des «divergences qui sont apparues» dans le camp pro-syrien. «Face à la poursuite des divergences, je suis arrivé à une impasse. Je renonce à former un gouvernement», a-t-il affirmé, avant d’annoncer son retrait du rassemblement qui regroupe tous les partis alliés de la Syrie au Liban. Le Premier ministre démissionnaire a fait état de «demandes contradictoires» concernant l’attribution des portefeuilles entre les pro-syriens. Il s’est déclaré déçu du fait que les loyalistes n’ont pas respecté leurs promesses de lui laisser les mains libres pour la formation du gouvernement. «J'avais déjà donné ma lettre de démission au chef de l'État lundi soir et le président m'a demandé de temporiser pour donner le temps à des tractations de dernière minute. Mais comme je ne vois pas de changement, je réaffirme ma décision de démissionner», a-t-il conclu.
Selon certains observateurs, l’échec de la formation du gouvernement est l’illustration parfaite de l’affaiblissement de l’influence de Damas qui jouait, ces quinze dernière années, le rôle de modérateur entre les différentes forces politiques libanaises. Avec la disparition de l’arbitre qui gérait ses conflits internes, le régime, en pleine déliquescence, se sent perdu. L’opposition estime, quant à elle, que le sabotage des efforts pour former un gouvernement fait parti d’un plan concerté visant à gagner du temps pour provoquer, de facto, le report du scrutin. Ces milieux opposants rappellent que Karamé a perdu un mois et demi entre bouderies et concertations interminables. Il avait été désigné le 10 mars pour se succéder à lui-même. Deux semaines auparavant, il avait démissionné sous la pression de la rue et de l’opposition parlementaire qui accusaient son gouvernement et la Syrie d’être responsables de l’assassinat de Rafic Hariri. Et pendant tout cette période, il n’a pas du tout semblé pressé de former un gouvernement.
Ce retour à la case départ ouvre la voie à toute sorte de développements. La poursuite des manifestations populaires de part et d’autre est le scénario le plus probable. La reprise des attentats à l’explosif, le plus effrayant.
par Paul Khalifeh
Article publié le 14/04/2005 Dernière mise à jour le 14/04/2005 à 12:05 TU