Constitution européenne
Un « nee » franc et massif
(Photo : AFP)
De notre correspondante aux Pays-Bas
« C’est très inquiétant. Je ne m’attendais pas à un tel dégoût de l’Europe. De champions de l’ouverture et de la tolérance, nous voilà le dos tourné au monde et à l’Europe ». Dick Pels, sociologue à Amsterdam, ne fait pas partie de ceux, militants d’extrême-gauche et d’extrême-droite, qui ont écumé les bars, hier soir, pour fêter la victoire écrasante du « nee ». Le refus de
« Le gratin de
Jan Peter Balkenende, le Premier ministre néerlandais, a accusé le coup.
« Naturellement, je suis très déçu », a-t-il déclaré mercredi soir, tout en indiquant son intention de respecter le verdict des urnes. Alors que beaucoup de commentateurs s’attendaient à une forte abstention, les enjeux étant moins forts après le « non » français, les 12 millions d’électeurs néerlandais ont surpris par leur forte mobilisation. Le taux de participation, de 24 points supérieur aux dernières élections européennes, a fait du « nee » un véritable raz-de-marée.
La coalition de centre-droit au pouvoir, au plus bas dans les sondages (17 % d’opinions positives), essuie un sérieux camouflet. Mais la bourrasque fera moins de dégâts immédiats qu’en France : le Premier ministre chrétien-démocrate a clairement annoncé son intention de ne pas démissionner, pour poursuivre son mandat jusqu’aux prochaines élections législatives, en mai 2007.
Invités pour la première fois à se prononcer par voie de référendum, les Néerlandais ont exprimé un mécontentement profond. « J’ai voté non à cause de l’euro », déclare Daniela, une commerçante du marché aux fleurs d’Amsterdam qui n’est pas restée insensible à la médiocrité de la campagne des tenants du « oui ».
L’Europe n’inspire plus confiance
En brandissant le spectre de la guerre ou du chaos économique, en fustigeant les « eurosceptiques » et en leur demandant de s’abstenir, les ministres ont aggravé le ressentiment contre leur propre gouvernement. Les motifs d’insatisfaction se sont accumulés, ces dernières années. Outre l’introduction de l’euro, l’éventuelle entrée de
« C’est une fête pour la démocratie », a commenté hier soir Ruud Koole, président des travaillistes (PvdA, opposition), comme pour se consoler. Son parti, qui a défendu l’organisation de ce référendum consultatif se retrouve avec un « oui » ténu, qui n’a pas remporté plus de 38,4 % des suffrages. Les députés, qui entérineront en dernier ressort le verdict des urnes, avaient promis de le faire à condition que le taux de participation dépasse les 30 % - sans se douter qu’il atteindrait le double. Après la publication des résultats définitifs et officiels, lundi 6 juin, ils vont devoir voter un « non » contraire à leurs opinions.
En fait, c’est une révolution politique qui se poursuit aux Pays-Bas, commencée en 2002 avec la percée fulgurante du mouvement de Pim Fortuyn, leader populiste assassiné la même année par un militant de gauche. Les idées de cet intellectuel de droite, le premier en son genre aux Pays-Bas, lui ont survécu. «
par Sabine Cessou
Article publié le 02/06/2005 Dernière mise à jour le 02/06/2005 à 08:42 TU