Israël-Liban
Le message du Hezbollah
(Photo: AFP)
Quand le Hezbollah lance une attaque contre des positions israéliennes, ce n’est généralement pas sans raison. Le mouvement intégriste justifie en effet inévitablement ses actions «en représailles à une agression» de l’Etat hébreu, comme par exemple le survol par l’aviation israélienne du territoire libanais. Mercredi, la milice chiite a donc accusé une patrouille de Tsahal d’avoir tenté de franchir la Ligne bleue, tracée par les Nations unies pour servir de frontière entre Israël et le Liban. C’est en tout cas ce que soutient al-Manar, la télévision du Hezbollah, pour expliquer les violents accrochages qui ont coûté la vie mercredi à un soldat de Tsahal, trois autres ayant été blessés dont un grièvement. La version de l’état-major israélien est tout autre. Selon lui en effet, un commando du mouvement intégriste s’est infiltré dans le secteur des fermes de Chebaa sous son contrôle pour attaquer une de ses positions, appuyés par des tirs de mortiers, de roquettes et d’armes légères. L’artillerie israélienne a aussitôt riposté en bombardant les collines entourant les localités libanaises proches de la frontière. Au total, quelque 250 obus seraient tombés sur le secteur en deux heures. L’aviation israélienne a ensuite pris le relais, bombardant à cinq reprises la région sans toutefois faire de victimes. Un nouvel incident a par ailleurs éclaté jeudi matin, Tsahal affirmant avoir touché au moins un combattant du Hezbollah, ce que le mouvement a immédiatement démenti.
Israël largue des tracts au Liban
Mais quoi qu’en dise le Hezbollah, cette flambée de violence, d’une ampleur inégalée depuis la mort le 9 janvier dernier d’un militaire israélien, d’un activiste du mouvement intégriste et d’un soldat français de la Finul –la force intérimaire des Nations unies au Liban–, est loin d’être anodine et semble avant tout répondre à des contingences internes. Les affrontements se sont en effet produits quelques heures avant la désignation du nouveau Premier ministre libanais, Fouad Siniora. Et dans ce contexte, le message en direction du prochain gouvernement issu des formations anti-syriennes est on ne peut plus claire. Le Hezbollah n’a en effet pas l’intention de désarmer comme l’exige la résolution 1559 des Nations unies qui, outre le départ des troupes syriennes du Liban, réclame le démantèlement et le désarmement de la milice chiite et des groupes palestiniens dans les camps de réfugiés. Le mouvement intégriste a sans doute également voulu montrer que le départ de son grand allié syrien n’a pas changé la donne sur le terrain. Son secrétaire général, Hassan Nasrallah, n’avait-il pas, lors de la campagne électorale qui a précédé les législatives, confié que sa formation disposait de 12 000 roquettes katioucha pointées sur Israël ?
Dans ce contexte, la position de la nouvelle équipe au pouvoir à Beyrouth, prise en tenailles entre le refus du Hezbollah de désarmer et les pressions de la communauté internationale qui réclame le démantèlement de la milice chiite, risque d’être des plus délicates. Sans compter que le gouvernement israélien a officiellement exigé qu’il prenne le contrôle de sa frontière. «Le gouvernement libanais est responsable de la dégradation de la situation dans la mesure où il laisse une liberté d’action au Hezbollah qui cherche à justifier son existence comme une organisation armée compte tenu des pressions internes au Liban», a notamment souligné un communiqué de l’armée israélienne qui a averti qu’elle était plus que jamais déterminée à riposter «aux provocations» de la milice chiite. Et dans une initiative sans précédent, l’aviation israélienne a largué des tracts au sud du Liban appelant le gouvernement à contrôler le mouvement intégriste pour éviter une escalade. «Nous appelons le peuple et le gouvernement libanais à ne pas permettre au Hezbollah de se livrer à une escalade qui portera atteinte à la stabilité de leur pays. Israël estime que le gouvernement libanais est responsable de toute agression dirigée contre lui et a le devoir d'étendre sa souveraineté sur l'ensemble du Liban sud», peut-on notamment lire sur ces documents rédigés en arabe.
par Mounia Daoudi
Article publié le 30/06/2005 Dernière mise à jour le 30/06/2005 à 18:06 TU