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G8

Blair a donné rendez-vous à l’Afrique

Le Premier ministre britannique voudrait convaincre ses homologues de la nécessité pour chacun des Etats du G8 de porter leur contribution à l’APD à 0,7 % de leur PIB d’ici 2015. (Photo : AFP)
Le Premier ministre britannique voudrait convaincre ses homologues de la nécessité pour chacun des Etats du G8 de porter leur contribution à l’APD à 0,7 % de leur PIB d’ici 2015.
(Photo : AFP)
L’aide à l’Afrique est, avec le réchauffement climatique, le principal dossier à l’ordre du jour du Sommet du G8, qui réunit les 7 pays les plus riches de la planète et la Russie, à Gleneagles, en Ecosse, du 6 au 8 juillet. Le Premier ministre britannique Tony Blair, l’hôte de la rencontre, a fait part depuis plusieurs mois de son intention d’amener ses homologues internationaux à s’engager plus significativement dans la lutte contre la pauvreté et pour le développement des pays du continent. Il a déjà obtenu un engagement concernant l’annulation de la dette multilatérale de 18 pays pauvres (surtout africains), annoncé en juin. Il lui reste à faire adopter, lors du Sommet du G8, d’autres mesures en faveur de l’augmentation du niveau de l’aide des Etats dans les prochaines années.

Il faut aider l’Afrique. C’est avec cet objectif prioritaire clairement affiché que la Grande-Bretagne a décidé de préparer le Sommet du G8 organisé en terre écossaise. De l’annonce d’un nouveau Plan Marshall pour l’Afrique présenté en janvier 2005 par le chancelier de l’Echiquier, Gordon Brown, à la réunion des ministres des Finances des pays du G8, en juin, au cours de laquelle engagement a été pris d’annuler la dette multilatérale de 18 pays pauvres (soit 40 milliards de dollars), le gouvernement de Tony Blair a poursuivi son opération de mobilisation progressive. Avec l’espoir de faire encore avancer le dossier lors de la réunion au sommet de Gleneagles, où les sept chefs d’Etat et de gouvernement les plus puissants de la planète (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon, Russie) viennent le rencontrer.

Tony Blair a, en effet, proposé d’augmenter le niveau de l’aide publique au développement (APD) et de le faire passer de 50 à 100 milliards de dollars par an d’ici 2010. Il voudrait aussi convaincre ses homologues de la nécessité pour chacun des Etats du G8 de porter leur contribution à l’APD à 0,7 % de leur produit intérieur brut (PIB) d’ici 2015. Pour y parvenir, le chef du gouvernement britannique a d’ailleurs proposé un système, baptisé Facilité financière internationale, qui permettrait de trouver rapidement des fonds sur le marché des capitaux par l’émission d’obligations remboursées ensuite par les donateurs.

Des divergences sur le montant de l’aide

Sur ce dernier point, il paraît peu probable que Tony Blair réussisse à obtenir un accord avec l’ensemble des partenaires du G8. Les Etats-Unis ont déjà fait part de leur opposition à la proposition britannique, tout comme ils avaient refusé l’idée du président français, Jacques Chirac, de mettre en place une taxation internationale sur les billets d’avion pour dégager des financements en faveur de l’achat de médicaments contre le sida, le paludisme et la tuberculose. Washington estime, d’autre part, qu’avec 19 milliards de dollars par an, les Etats-Unis se situent déjà au premier rang des contributeurs et que l’objectif d’aligner tous les pays sur le niveau de 0,7 % du PIB, quelle que soit la taille de leur économie, est «irréaliste» puisque cela porterait l’aide américaine à 91 milliards de dollars.

Les Britanniques se sont en revanche réjouis de l’engagement de l’Union européenne de passer le montant de son aide de 40 à 80 milliards de dollars d’ici 2010. Et surtout, Gordon Brown a fait part de l’avancée majeure que constitue, selon lui, la décision de procéder à une augmentation progressive de la part du budget dédiée au développement (0,51% du PIB en 2010 et 0,7% en 2015) prise par certains Etats. Il a ainsi déclaré : «Nous avons maintenant 13 pays européens qui ont accepté un calendrier pour porter l’aide à 0,7 % de leurs revenus, quelque chose que l’on n’a pas vu en trente ans malgré toutes sortes de tentatives».

Même si les opinions divergent sur les moyens à mettre en œuvre et les montants nécessaires pour aider l’Afrique à sortir du sous-développement, l’unanimité semble néanmoins faite autour du caractère indispensable d’une mobilisation en faveur des pays de ce continent. Cette position n’a d’ailleurs jamais été aussi clairement et aussi souvent défendue par les représentants des pays les plus riches de la planète, Britanniques en tête. Reste à savoir s’il s’agit surtout «d’un coup médiatique», comme le prétendent les ONG, pour lesquelles au-delà des mots et des effets d’annonce, les mesures adoptées risquent d’être décevantes par rapport aux besoins. ActionAid estime ainsi que l’effacement de la dette de 18 pays pauvres auprès des organismes internationaux (Fonds monétaire international, Banque mondiale, Banque africaine de développement), qui doit être entériné à Gleneagles, ne représente qu’un quart du montant de la dette de ces Etats et surtout, est soumis à certaines conditions, parmi lesquelles la privatisation des services de base, qui relativisent d’autant son impact.

Passer des paroles aux actes

D’autre part, un volet particulièrement important ne devrait pas être abordé lors du sommet du G8 : celui de la suppression des barrières douanières, avec son corollaire, les subventions accordées à leurs producteurs agricoles par les Etats du Nord, qui protègent les marchés des pays riches. Cette question très importante dès lors qu’il s’agit de permettre aux pays en développement d’accéder aux marchés internationaux et de renflouer leurs caisses, devrait être abordée dans un autre cadre, lors de la prochaine réunion de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), en décembre 2005 à Hong Kong.

Dans ce contexte marqué à la fois par des pointes d’espoir et un nécessaire pragmatisme, les Etats africains veulent croire que la communauté internationale est décidée à les aider. Réunis à Syrte, en Libye, dans le cadre d’un sommet de l’Union africaine (UA), ils ont peaufiné les interventions de leurs représentants invités à s’exprimer à Gleneagles. Leur message est clair : ils entendent obtenir l’annulation globale de la dette mais demandent aussi la création d’un fonds de 20 milliards de dollars pour financer des projets de développement et la suppression par les Etats du Nord des subventions accordées aux producteurs agricoles, de coton notamment. Même si, comme l’a souligné le président de la commission de l’UA, Alpha Oumar Konaré, «il souffle aujourd’hui sur le monde un vent en faveur de l’Afrique», le temps est venu de passer des paroles aux actes. Car pour Alpha Oumar Konaré : «Trop de promesses nous ont été faites au cours de trop de rassemblements, mais aucune n’a jamais été tenue».

par Valérie  Gas

Article publié le 05/07/2005 Dernière mise à jour le 05/07/2005 à 07:55 TU