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Immigration

Sarkozy veut choisir les immigrés

Nicolas Sarkozy a visité le 11 juillet les installations du port de Marseille, afin d'assister aux opérations de débarquement et de contrôle des voyageurs en provenance de l'étranger.(Photo: AFP)
Nicolas Sarkozy a visité le 11 juillet les installations du port de Marseille, afin d'assister aux opérations de débarquement et de contrôle des voyageurs en provenance de l'étranger.
(Photo: AFP)
Nicolas Sarkozy a fait de l’immigration l’un de ses principaux chevaux de bataille. A peine revenu à la tête du ministère de l’Intérieur, il a immédiatement défini les axes de la politique que la France doit mettre en place dans ce domaine. Sans parler de quotas, il prône désormais le «volontarisme républicain». En d’autres termes, il fait de la sélection des candidats à l’immigration et du renforcement des contrôles, le gage de la réussite de l’intégration des immigrés.

Qui dit «choix», ne dit pas quotas. En tout cas, Nicolas Sarkozy a bien pris garde à ne pas employer le mot qui fâche en abordant le thème de l’immigration, lors de son intervention à l’occasion de la première conférence préfectorale et consulaire, à Marseille. Cela ne l’a pas empêché de développer un argumentaire parfaitement huilé sur les raisons qui rendent nécessaire la mise en place d’une sélection des candidats à l’immigration. Le ministre de l’Intérieur part d’un constat : «Aujourd’hui, la situation n’est pas satisfaisante», pour en arriver à une conclusion : la France doit mettre en œuvre «une politique volontariste» basée avant tout sur le choix des immigrants en fonction des besoins de l’économie nationale.

«Il appartient au gouvernement de fixer, en fonction des besoins de l’économie et de nos capacités d’accueil, le nombre de personnes admises à s’installer en France», a ainsi expliqué Nicolas Sarkozy. Pour atteindre cet objectif, le ministre préconise tout d’abord la mise en place d’un système de points pour sélectionner, les étudiants dans un premier temps mais vraisemblablement «les actifs qualifiés» par la suite, en fonction de leur âge, de leurs diplômes, de leur expérience professionnelle ou de leur maîtrise de la langue française. Pour affiner cette réflexion et élaborer le, ou les, profils types des immigrés dont la France a besoin, Nicolas Sarkozy a décidé la création d’une mission interministérielle d’évaluation des capacités d’accueil, d’octroi des visas et des besoins de la France. Elle devrait rendre ses premières conclusions en mars 2006.

Mais d’ores et déjà, les associations critiquent ce type de dispositions. Le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap)  estime qu’il s’agit d’une tentative «d’instrumentalisation politique du thème de l’immigration» qui aboutirait en fait à l’organisation d’un «pillage» des «richesses humaines» des pays du Sud.

Visas biométriques, contrôle du regroupement familial, expulsions…

Sur le terrain, le ministre de l’Intérieur entend obtenir une meilleure coordination des services pour renforcer les contrôles. C’est pour cela qu’il veut la création d’une administration centrale unique en charge de l’immigration, de l’asile, de l’intégration et de la nationalité.  C’est aussi pour améliorer les résultats qu’il veut mettre en place une liaison informatique entre les préfectures et les consulats et créer un titre unique, à la fois visa et carte de séjour. L’un des objectifs prioritaires du ministre est de lutter contre la délivrance de visas touristiques lorsqu’il y a «risque migratoire». Autrement dit lorsque l’on soupçonne les voyageurs de vouloir rester en France plus que prévu. Nicolas Sarkozy demande donc aux consulats de veiller à vérifier si les étrangers sont bien rentrés à la fin de la durée de validité de leur visa et de faire signer aux voyageurs «une déclaration de retour». Ces vérifications devraient permettre, par ricochet, d’ajuster le nombre de visas accordés dans les pays en fonction du taux de retour, de manière à limiter les flux qui alimentent l’immigration clandestine.

Le renforcement des contrôles doit aussi passer par la «généralisation des visas biométriques», qui permettent de vérifier les identités de manière infaillible. Pour le moment, seuls les consulats de Bamako, Colombo, Minsk, Annaba, Kinshasa, Lubumbashi, San Francisco, Washington, ainsi que les aéroports de Roissy et Orly et le port de Marseille sont équipés de ces dispositifs. Nicolas Sarkozy veut que d’ici deux ans, deux cents postes consulaires soient eux aussi dotés des systèmes biométriques.

Cette surveillance renforcée a pour objectif de limiter les abus, notamment en matière d’immigration familiale. Là aussi, Nicolas Sarkozy veut combattre les fraudes. Et pour y parvenir, il préconise d’améliorer la lutte contre les mariages blancs, les mariages forcés, la polygamie, la maltraitance à l’égard des femmes et surtout mieux contrôler les regroupements familiaux. Dans la pratique, le ministre a annoncé la mise en place d’une mesure qui provoque l’indignation des associations comme la Cimade (service œcuménique d’entraide) : l’obligation pour une personne qui demande un regroupement familial de prendre en charge tous les besoins de sa famille (ressources, logement)  pendant une durée déterminée comme condition sine qua non à la délivrance du visa. Pour la Cimade, il s’agit d’une disposition «porteuse d’une remise en cause des droits sociaux».

Des régularisations au compte-gouttes

Contrôler pour ne pas subir, cela veut aussi dire pour Nicolas Sarkozy : ouvrir au minimum la vanne des régularisations de clandestins dont le ministre de l’Intérieur a prévenu qu’elles seraient réalisées au cas par cas, autant dire au compte-gouttes. D’autre part, il a annoncé que la politique de reconduite aux frontières serait renforcée, avec un objectif chiffré à la clef : augmenter le nombre d’expulsions de 50 % en 2005, de manière à renvoyer chez eux 23 000 étrangers en situation irrégulière.

Grâce à ce dispositif, Nicolas Sarkzoy espère bien arriver à limiter les effets négatifs de l’immigration «subie où tout le monde est perdant» parce que, selon lui, l’intégration des arrivants échoue. C’est pour cette raison que le ministre de l’Intérieur désire aussi obtenir la signature par 100 % des immigrés du «contrat d’accueil et d’intégration» qui rend notamment obligatoire une formation linguistique.


par Valérie  Gas

Article publié le 12/07/2005 Dernière mise à jour le 12/07/2005 à 17:35 TU