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Côte d'Ivoire

Inquiétantes attaques

L’armée gouvernementale annonce qu’elle a fait des prisonniers parmi les auteurs de la double attaque non revendiquée qui a visé ce week-end Anyama, dans la banlieue nord d’Abidjan, avant Agboville, à quelque 70 kilomètres au nord de la capitale. Apparemment, les assaillants ont poursuivi leur offensive sur Agboville, dimanche matin, pour échapper à l’intervention des Forces de défense et de sécurité (FDS) à Anyama, leur première cible. Là, dans la nuit de samedi à dimanche, plusieurs dizaines (100 à 200, selon les témoignages) d’hommes en civil armés de kalachnikov ont attaqué le poste de gendarmerie, faisant cinq morts et deux blessés parmi les gardiens de la paix, selon un bilan diffusé lundi. Les assaillants auraient laissés quatre morts sur le terrain, à Anyama. En se repliant sur Agboville, à bord de véhicules privés et de taxis, ils ont tué un agent des Eaux-et-Forêts, à mi-chemin de leur route, à Azaguié, une localité qui abrite une base des FDS. A Agboville, ils ont ouvert la prison et tenu neuf heures avant de décamper. Les FDS dénoncent une «violation flagrante des accords de paix». Les ex-rebelles des Forces nouvelles dénient toute implication.

«Nous avons détruit et récupéré des véhicules. Nous avons fait également des prisonniers à Agboville. Nous allons les filmer, ensuite nous allons les amener à Abidjan», déclarait lundi le chef d’état-major des Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (Fanci), le général de brigade Philippe Mangou. Pour sa part, il se garde bien de désigner les anciens rebelles des Forces nouvelles, avec lesquels il vient d’ailleurs de contresigner un nouveau calendrier de désarmement, le 9 juillet dernier. Reste donc à attendre les conclusions des interrogatoires. Mais déjà, les esprits se sont échauffés dans le camp gouvernemental où, dimanche, le chef des jeunes patriotes, Charles Blé Goudé avait lancé un appel télévisé aux partisans du président ivoirien Laurent Gbagbo pour qu’ils se «mobilisent». Pour sa part, le président du Front populaire ivoirien (FPI), Pascal Affi Nguessan a très vite accusé les Forces nouvelles. Celles-ci objectent qu’il «n'y a aucun élément des Forces nouvelles présents dans ces zones-là». Leur porte-parole, Alain Lobognon, ajoute que «les derniers événements survenus en zone gouvernementale ne sauraient remettre en cause les engagements des FN dans le processus de paix».

Dispositif militaire allégé à Abidjan

Dimanche, les Fanci ont annoncé la reprise d’Agboville «à 17 heures 32». Lundi, le dispositif militaire déployé dans le centre-ville d’Abidjan a été allégé. Le porte-parole de la force française Licorne, le lieutenant-colonel Philippe de Cussac, indiquait alors que «des soldats français sont partis ce matin vers Agboville pour faire la jonction avec des casques bleus marocains de l'Onuci afin de sécuriser la ville et ses environs comme le demande la résolution 1609 des Nations unies». Dimanche soir, un communiqué de l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci) avait condamné «vivement cette action injustifiable qui risque d'hypothéquer les importants progrès enregistrés dans le processus de paix particulièrement après la dernière réunion de Pretoria». Officiellement, les «forces impartiales» n’ont pas identifié les auteurs des attaques. Mais elles redoutent que ces événements entraînent la «détérioration d'une situation déjà très préoccupante». Sur place, comme l’explique le chef de la force Licorne, le général ElrikIrastorza, l’objectif sera de «comprendre ce qui se passe et de faire comprendre aux gens qu'on ne peut pas circuler en toute impunité sur ce territoire».

Pour sa part, le secrétaire général des FN, Guillaume Soro, venait d’arriver dans son fief de Bouaké (au Centre), jeudi, après cinq mois passés hors du pays. Dimanche, pendant les événements d’Agboville, il était occupé à remettre «des épaulettes à ses soldats», à commencer par son chef d’état-major, le colonel Soumaïla Bakayoko, élevé au grade de général de brigade, en même temps que le transfuge, Michel Gueu. Les FN ont en effet procédé au «deuxième avancement de [leurs] combattants» qui devraient commencer, le 31 juillet, à rejoindre des sites de pré-regroupement, conformément au nouveau calendrier de DDR (Désarmement-Démobilisation-Réintégration) issu de Pretoria II. L’opération doit être complètement bouclée le 3 octobre, juste le temps de la campagne pour les présidentielles du 30 octobre. Le 15 juillet, la promulgation des lois électorales par le président Gbagbo était censée lever le dernier obstacle politique au retour du ministre de la Communication Soro dans le gouvernement de Réconciliation nationale. Les événements d’Anyama et d’Agboville sèment à nouveau le trouble.

Depuis dimanche, les Fanci «demandent, premièrement, à tous leurs éléments de regagner immédiatement leurs casernes. Deuxièmement, aux populations de garder le calme et la sérénité». Lundi, un calme inquiet régnait sur le théâtre des événements du week-end où les «forces impartiales» doivent enquêter. Abidjan se perd en conjectures sur l’identité et les objectifs du mystérieux commando d’Anyama qui s’est volatilisé à Agboville.


par Monique  Mas

Article publié le 25/07/2005 Dernière mise à jour le 25/07/2005 à 17:14 TU

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Alain Bolognon

Porte-parole des Forces Nouvelles

«Il n'y a pas que des Forces Nouvelles qui sont acteurs de la crise ivoirienne.»

Pascal Alfi Nguessan

Président du Front Populaire Ivoirien

«Tout cela montre bien que c'est un plan savamment mise au point.»

Un témoin de l'attaque

Un témoin de l'attaque

«Les gens rentrent chez eux, la ville est déserte.»

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