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Eglise catholique

Benoît XVI au défi des JMJ à Cologne

Le cortège du char des Journées mondiales de la jeunesse passe devant la cathédrale lors du dernier carnaval de Cologne.(Photo: WJT gGmbH)
Le cortège du char des Journées mondiales de la jeunesse passe devant la cathédrale lors du dernier carnaval de Cologne.
(Photo: WJT gGmbH)
Quatre mois après son élection à la tête du Vatican, le pape Benoît XVI s’apprête à rencontrer pour la première fois de son pontificat les jeunes catholiques du monde entier, lors de la XXe édition des Journées mondiales de la Jeunesse (JMJ), qui se tiendront du 16 au 21 août, à Cologne (Allemagne). L’occasion pour le successeur de Jean-Paul II de mettre à l’épreuve sa popularité auprès des 800 000 jeunes attendus. A 78 ans, il devra se montrer à la hauteur de son défunt prédécesseur, créateur de ces journées et idole des jeunes catholiques, à une époque où l’église est plus que jamais en crise.

On dirait un festival de rock estival, avec ses dizaines de milliers de jeunes qui affluent de partout, son dispositif de sécurité monstrueux, sa nuée de journalistes et sa star planétaire: le nouveau pape Benoît XVI, attendu comme le messie du 16 au 21 août à Cologne, en Allemagne.

Venus en voiture, à vélo, en car, en avion, ou à pied, sacs au dos, les jeunes catholiques du monde entier ont commencé à se ruer vers l’Allemagne, à quelques jours des XXe JMJ. Car avant le lancement officiel des festivités, les participants venus de 193 pays sont invités aux «journées de rencontres», avant-premières du rassemblement spirituel, qui se tiennent jusqu’au 15 août dans les diocèses allemands, pour «faire connaissance avec la vie de l’Eglise et la culture en Allemagne». Hébergées dans les paroisses de la région, les 120 000 personnes attendues à ses journées préparatoires sont invitées à prendre part à des tables rondes, des chants et des prières. Ce n’est qu’après la fête de l’Assomption de la Vierge Marie, le 15 août, qu’ils gagneront le diocèse de Cologne. Environ 400 000 jeunes de 16 à 30 ans, dont 45 000 Français, sont d’ores et déjà inscrits pour toute la durée du rassemblement.

Ils seront tous là pour la première visite à l’étranger de Benoît XVI, qui marque également son premier retour dans son pays natal, depuis son élection, le 19 avril dernier. Au cours des JMJ, le souverain pontife devrait faire trois apparitions publiques, aux côtés de 8 000 prêtres et de 750 évêques : à la fête de bienvenue, le 18 août, à la veillée de la prière le 20 au soir, et à la messe géante le lendemain au Marienfeld, dans un ancien site minier situé à 27 km de Cologne. Entre 600 000 et 800 000 personnes sont attendues pour cette messe de clôture.

Le paradis de la sécurité et du marketing

Un énorme dispositif de sécurité a été déployé à Cologne, la quatrième ville du pays, et dans la région: 4 000 policiers et autant de vigiles privés sont chargés de surveiller la manifestation. Le plus haut degré de sécurité a été enclenché compte-tenu des menaces terroristes qui planent actuellement sur Europe. Mais les services de police colonais ont de l’expérience en matière d’événement de cette ampleur: des dispositifs similaires avaient déjà été mis en place lors des trois précédentes visites de Jean-Paul II, en 1980, 1987, et lors du G8, en juin 1999.

Outre la sécurité, les JMJ requièrent une énorme logistique. Si la machine fonctionne à grand renfort de bénévoles, le marketing n’est pas absent. Bobs, répertoires, cartes téléphoniques, timbres, porte-clefs et bien sûr chapelets griffés «JMJ» sont déjà en vente sur le site des JMJ http://www.wjtshop2005.de/articles-1. On y trouve aussi des produits dérivés plus inattendus comme une bouteille de vin blanc alsacien à 6 euros, le tout étant bien sûr copyright. Bon nombre d’entreprises allemandes, telles que Volkswagen, Deutsche Telekom ou Deutsche Post, comptent bénéficier des retombées économiques de cet événement, qui leur offre une véritable vitrine commerciale. De même, les organisateurs espèrent couvrir au moins 7,5% du coût total, évalué à 100 millions d'euros, grâce au sponsoring et aux dons d’entreprises.

Un baptême pour le nouveau pape

Cette manifestation représente un véritable baptême du feu pour le pape qui porte le lourd héritage de son prédécesseur et créateur des JMJ, Jean-Paul II. Pour beaucoup de jeunes catholiques nostalgiques, ces journées seront autant marquées par la présence de Jean-Paul II que par celle de Benoît XVI. «C’était un pape tellement bien que ça va être difficile pour Benoît XVI car les gens attendent beaucoup de lui», estime une jeune femme du pèlerinage. Ainsi plus de 20 000 Polonais ont pris la route de Cologne pour rendre un hommage posthume à leur pape, décédé en avril dernier.

A 78 ans, Benoît XVI, critiqué pour son manque de charisme, doit d’abord se faire connaître de ces jeunes fidèles, tout en faisant face aux scissions qui menacent une église forte d’un milliard de fidèles. Pour beaucoup de jeunes, tenants d’une doctrine dure, il est important que le nouveau pape reste dans la lignée conservatrice de Jean-Paul II. Une position qu’il continue à défendre, après avoir quitté ses fonctions de préfet tout puissant de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Depuis son élection, l’ancien cardinal Josef Ratzinger n’a pas souhaité marquer une césure avec la fin du pontificat de Jean-Paul II, en conservant notamment la Curie romaine et le gouvernement de l’église.

Mais si beaucoup de jeunes catholiques attendent de lui qu’il campe sur cette ligne dure, les fidèles d’Amérique latine quant à eux attendent de ce nouveau pontificat davantage de dialogue et de modernité. Parmi les 12 000 jeunes latino-américains attendus à Cologne, beaucoup attendent de l’Eglise qu'elle soit plus souple sur les questions de mariage, de sexualité ou d’avortement. Sur le continent, elle subit la concurrence des églises évangélistes et les sectes qui se multiplient depuis le début du XXIe siècle, et profitent des désaffections liées aux prises de position conservatrices de Jean-Paul II, en faveur des valeurs familiales et traditionnelles, et contre l’homosexualité. «Benoît XVI doit donner un nouvel élan à l’église, la dépoussiérer, la dérouiller, tout en restant fidèle à la doctrine et à l’action de Jean-Paul II. Elle a besoin d’un bain de jouvence», estime une jeune Mexicaine. Face à la désaffection de l’église, Benoît XVI devra trancher pour ne pas rester en porte-à-faux avec ses fidèles, à commencer par les plus jeunes.


par Julie  Connan

Article publié le 14/08/2005 Dernière mise à jour le 14/08/2005 à 16:10 TU