Côte d'Ivoire
Annan annonce le report des élections
(Photo: AFP)
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Tout le monde attendait les déclarations du haut représentant de l’ONU pour les élections en Côte d’Ivoire, Antonio Montéiro, de retour du Conseil de sécurité à New York. Il a réservé la primeur de ses réflexions et des informations recueillies au président Laurent Gbagbo avant de se confier à la presse internationale. Il a notamment déclaré sur RFI : «c’est très difficile, je ne veux pas le cacher. Je ne veux pas encore me prononcer parce que sinon cela va provoquer tout de suite des spéculations, mais cela va être très difficile le 30 octobre», a-t-il déclaré, cherchant déjà à proposer des solutions pou occuper utilement le temps jusqu’à la date qui sera convenue d’un commun accord.
Il ne faut pas s’y méprendre, et Antonio Montéiro le répète inlassablement: il a été nommé le 15 juillet dernier pour justement veiller à tenue du scrutin présidentiel en Côte d’Ivoire. Depuis son retour des Nations unies, il a quelque peu infléchi sa position quant au respect ferme de la date du 30 octobre. «La date n’est pas le plus important. Ce qui est important, c’est d’organiser les élections d’une façon crédible, pour qu’on arrive à des listes électorales qui correspondent à la réalité politique du peuple ivoirien», laisse entendre par ailleurs Antonio Montéiro, pour qui le respect de certaines étapes devient nécessaire.
L’après 30 octobre risque de créer une situation inédite en Côte-d’Ivoire à laquelle se préparent les états-majors de tous les partis, y compris le Front populaire ivoirien au pouvoir. Même dans les hypothèses les plus optimistes, il serait difficile d’éviter un désordre politique dans lequel chaque parti politique estimerait avoir raison et détenir la clé de sortie de crise. Sans oublier que la moitié nord du pays est toujours sous contrôle de la rébellion. Selon le haut représentant de l’ONU, une des solutions seraient de mettre en place le plus rapidement possible la Commission électorale indépendante (CEI). Elle seule pourra apprécier la situation et énoncer un éventuel nouveau calendrier à respecter.
Décider tous ensemble d’une nouvelle dateMême s’il n’est pas du ressort de la CEI d’interpréter la Constitution, ses indications pourraient éclairer les décideurs dans leurs choix de préserver la paix dans ce pays. Le temps presse alors Antonio Montéiro demande à tous les partis de désigner leurs représentants à la CEI afin qu’elle se mette rapidement au travail. Mais il manque toujours quelques noms à l’appel. On n’a pas trop de mal à savoir qui refuse obstinément de s’inscrire dans ce processus. «Les conditions d’un scrutin démocratique et transparent ne sont pas réunies», affirme la rébellion des Forces nouvelles qui exige qu’après le 30 octobre se mette en place «une transition sans Laurent Gbagbo». Le désarmement et le cantonnement des Forces nouvelles, très tôt rejetés par les rebelles et la multiplication des embûches, dont la récusation de la médiation sud-africaine sont finalement ressentis comme une tactique des rebelles qui cherchent par tous les moyens à ce qu'il ne se passe rien jusqu'au 30 octobre.
A cette date, Laurent Gbagbo ne sera plus constitutionnellement le président de la République. Tout redeviendra possible, y compris en découdre militairement avec les Forces armées de Côte d’Ivoire (Fanci) qui ont enregistré ces dernières semaines quelques grandes défections. Cette hypothèse de travail des maîtres de Bouaké qui consiste à trouver perpétuellement des remises en cause du processus de paix, ajoutée aux intrigues du pouvoir et aux tribulations d’une opposition qui se cherche, ont failli pousser les Sud-Africains exténués par quelques mois de médiation à la faute. Abandonner la mission est un aveu d’échec que les rebelles attendaient des autorités sud-africaines. Mais l’Afrique du Sud remet l’ouvrage sur le métier en proposant aux instances africaines d’envisager ensemble l’art et la manière de gérer le vide juridique d’après le 30 octobre. Mais au moment où l’ONU est moins encline à déclencher un mécanisme de sanctions contre tous les contrevenants au processus de paix, il semblerait que les institutions africaines soient prêtes à accompagner une transition. Avec qui et comment ? De nouvelles tables rondes sont à prévoir.
par Didier Samson
Article publié le 08/09/2005 Dernière mise à jour le 09/09/2005 à 14:35 TU