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L’Afghanistan, cas d’école des opérations extérieures

Patrouille de l'ISAF dans Kaboul.(Photo: AFP)
Patrouille de l'ISAF dans Kaboul.
(Photo: AFP)
A la réunion des ministres de la défense de l’Otan, à Berlin, l’Afghanistan apparaît comme un cas d’école en matière d’intervention internationale. Deux contingents internationaux y combattent et cohabitent selon des modalités qui tiennent compte des exigences de chacun des pays contributeurs. Le secrétaire d’Etat américain réclame une unité de commandement et d’action entre la coalition combattante dirigée par Washington et celle dirigée par l’Otan, placée sous mandat de l’ONU. Donald Rumsfeld affronte les réticences de certains pays membres qui redoutent une confusion des genres entre missions de guerre et de réhabilitation.

Hasard du calendrier : tandis que le Conseil de sécurité de l’ONU reconduisait mardi pour un an, à dater du 13 octobre prochain, la mission de la Force internationale d’assistance à la sécurité (ISAF) en Afghanistan, l’organisation militaire occidentale Otan réunissait ses 26 ministres de la Défense, à Berlin, pour examiner notamment quelle orientation donner à son action militaire en Afghanistan. Selon Washington, le partage des rôles entre la coalition offensive «Liberté immuable», forte de 20 000 hommes (principalement des Américains) et élaborée au lendemain des attaques terroristes du 11 septembre, et le contingent international ISAF, fort aujourd’hui de 11 000 hommes, mandaté par l’ONU et commandé par l’Otan, ne répond qu’imparfaitement à la montée en puissance du dispositif politico-militaire occidental dans ce pays.

En effet, tout d’abord cantonné à Kaboul, le contingent ISAF a poursuivi son déploiement vers le nord, puis vers l’ouest du pays. Il est aujourd’hui question d’étendre ses missions vers l’est du pays, réputé être le bastion des combattants talibans de l’ancien régime afghan. Mais il faudra pour cela à nouveau réévaluer les effectifs et les missions. Plusieurs milliers d’hommes supplémentaires seront vraisemblablement nécessaires pour livrer bataille et s’emparer du terrain : c’est le rôle de la coalition «Liberté immuable». Il en faudra autant pour mener à bien le travail de sécurisation et de normalisation de la vie civile et politique : c’est le rôle de l’ISAF.

Les règles d’engagement du feu sont différentes

Or si les deux missions sont complémentaires, l’une assurant la sécurité de l’autre, et si l’on trouve au sein de l’ISAF des contingents nationaux disposés à fournir des troupes spéciales à la coalition formée par Washington au lendemain du 11 septembre pour défaire le régime taliban, les règles d’engagement du feu entre les deux contingents sont différentes. Tandis que «Liberté immuable» est à l’offensive contre les Taliban dans les régions réputées indociles de l’est, du sud-est et du sud, l’ISAF (et donc l’Otan) a l’ambition d’aider à la reconstruction du pays en créant des conditions socio-politiques propices.

Selon Washington, cette configuration manque de souplesse et n’autorise pas la rapidité de réaction et d’exécution exigée dans les missions afghanes que l’administration américaine souhaiterait entièrement déléguer à l’ISAF d’ici octobre 2006, y compris les missions de combats. «Clairement, si vous êtes un commandant de l’Otan dans une zone d’opération et qu’il y a différentes règles d’engagement et différentes restrictions de la part des troupes nationales, il est extrêmement difficile pour les responsables d’avoir de la flexibilité», traduit le secrétaire américain à la Défense Donald Rumsfeld.

«Une seule mission, une seule structure»

Pour différentes raisons, nombre de pays membres de l’Otan, s’inquiètent donc d’une confusion des genres entre combattants et reconstructeurs. C’est notamment le cas de la France, bien qu’elle contribue aux deux missions. C’est également le cas de la Turquie, ainsi que de l’Allemagne qui, après un demi-siècle d’adhésion à l’Alliance atlantique, demeure naturellement réticente à déployer des soldats hors de ses frontières et exige qu’ils restent cantonnés dans des missions non-combattantes. Berlin craint en effet d’engager ses soldats dans des opérations où ils deviendraient des cibles pour les rebelles anti-gouvernementaux.

L’unité de commandement en Afghanistan est encore un projet dont M. Rumsfeld vient tout juste de donner le coup d’envoi. Il est soutenu par le secrétaire général de l’Otan, Jaap de Hoop Scheffer qui préconise, avec l’élargissement de la zone d’action de l’ISAF, «une seule mission commune avec l’armée américaine, avec une seule structure de commandement et une seule définition des règles d’engagement». «Nous n’en sommes pas encore là», reconnaît-il alors que l’organisation transatlantique travaille à la mise sur pied, d’ici un an, d’une Force de réponse de l’Otan, lourdement armée, dotée de 22 000 hommes, capable de se déployer n’importe où en moins de huit jours… et dont il ne reste plus qu’à déterminer la contribution de chacun des Etats membres.


par Georges  Abou

Article publié le 14/09/2005 Dernière mise à jour le 14/09/2005 à 17:46 TU