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Fiscalité

Villepin dévoile sa réforme de l'impôt

Quatre tranches au lieu de six pour le nouveau barême de l'impôt.(Photo : AFP)
Quatre tranches au lieu de six pour le nouveau barême de l'impôt.
(Photo : AFP)
Le ministre des Finances Thierry Breton et le porte-parole du gouvernement Jean-François Copé dévoilent les détails d’une réforme fiscale «profonde». Jean-François Copé l’a expliqué ainsi : «Quand vous baissez l’impôt, cela rend du pouvoir d’achat aux gens, ils consomment, ils investissent, ils embauchent et cela fait des recettes pour l’Etat». Il s’agit donc de redonner du pouvoir d’achat aux classes moyennes, tout en plafonnant le taux d’imposition pour les plus fortunés, et «Tout le monde sera gagnant dans cette réforme», ont certifié Thierry breton et Jean-François Copé. Au programme de la réforme : une refonte des barèmes, une révision des abattements et des niches fiscales, et un toilettage de la prime pour l’emploi. L’objectif de la réforme : rendre du pouvoir d’achat aux Français, mais aussi stimuler la relance de l’investissement et du recrutement.

Selon les déclarations officielles, les principaux bénéficiaires devraient être les salariés des classes moyennes, c’est-à-dire ceux que Nicolas Sarkozy  définit globalement comme «trop riches pour bénéficier de prestations sociales et pas assez pauvres pour se soustraire à l’impôt», soit les ménages dont le revenu annuel est compris entre 10 000 à 30 000 euros et qui, selon l’Insee, représente 70% des ménages imposables si l’on se réfère à la répartition des revenus pour 2001. Grosso modo cela se traduira par une baisse de 3,5 milliards d'euros des sommes prélevées sur les revenus des Français.

La réforme se traduira aussi par un plafonnement des impôts à 60 % des revenus –qu’il s’agisse des impôts directs d’Etat c’est-à-dire impôt sur le revenu (IR) et impôt de solidarité sur la fortune (ISF), et des impôts directs locaux (taxe d'habitation et taxe foncière). Ce plafonnement ne s'appliquera pas, en revanche, à la contribution sociale généralisée (CSG) parce que c'est une «cotisation sociale». Jean-François Copé a réfuté l’idée qu’en intégrant les impôts locaux dans ce plafonnement il violait le principe constitutionnel de l’autonomie des collectivités territoriales : «Ce sont 126 000 foyers fiscaux qui sont concernés par rapport à 35 millions de personnes qui paient l’impôt, c’est extrêmement marginal, donc cela ne touche absolument pas ce principe». Thierry Breton pour sa part a souligné : «90% d’entre-eux (de ces 126 000 foyers fiscaux) ont des revenus tout en bas de l’échelle», citant les agriculteurs victimes de mauvaises récoltes ou de jeunes créateurs d’entreprise qui ont du mal à décoller.

Les taux d’imposition sur le revenu (IR) -un impôt payé actuellement par environ la moitié des Français- devraient donc baisser et les tranches imposables au nombre de six actuellement devraient être ramenées à quatre. Cependant, il apparaît déjà qu’entre 10 000 et 30 000 euros la marge est grande. Jean-Marc Durand , économiste et spécialiste de la fiscalité qui analyse, dans le journal L’Humanité, le projet gouvernemental soulève ainsi la question : avec un taux de prélèvement identique de 13% que l’on soit à un pôle ou à l’autre de la tranche «Est-ce à dire que le gouvernement considère que ces deux montants permettent un niveau de vie identique ? », soulignant par ailleurs : « une réduction du nombre de tranches, donc l’élargissement de la plage de chacune restante, concourt à accroître les inégalités». Ce reproche avait déjà été fait à la proposition de réforme d’Alain Juppé en septembre 1996 qui envisageait de réduire la progressivité, facteur essentiel de justice dans le prélèvement public et élément de solidarité nationale.

Le barème de l’impôt sur le revenu est actuellement divisé en sept tranches, chacune assortie d’un taux d’imposition différent, le taux de 0% étant pour la tranche la plus basse, et de 48,09% pour la tranche supérieure. Le nouveau barème des tranches d’imposition applicables en 2007 sur les revenus de 2006 seront à 5,5% à partir de 5 515 euros de revenus annuels, de 14% à partir de 10 847 euros, 30% dès 24 432 euros et 40% au-delà de 65 559 euros. Le contribuable pourra demander un remboursement du trop versé sur ses impôts payés en 2006. Mais quant au calendrier, «c’est très lourd à mettre sur pied et cela doit être discuté au Parlement. Ce qui fait que l’on aura le feu vert final à partir du mois de novembre ou décembre. Mettre quelque chose en place au 1er janvier 2006 est mécaniquement impossible. Par contre en 2007, on aura l’occasion de le faire car je rappelle que le budget augmente mécaniquement de 4,8 milliards d’euros», a expliqué Jean-François Copé.

«[la réforme] bouscule profondément le paysage fiscal français»

En somme, le gouvernement ne s’attaque pas frontalement à la délicate question de l’ISF. Au final, avec cette réforme que le Premier ministre Dominique de Villepin avait dévoilé dans les grandes lignes lors de sa conférence de presse, le gouvernement défend l’idée que «tout le monde sera gagnant». Jean-Marc Durand en est moins certain qui affirme que, selon lui : «Le projet d’une intégration de l’abattement de 20% accrédite l’idée d’un chamboulement total de l’IR (et que) vouloir dissoudre l’abattement dans le global à déclarer, c’est à brève échéance, en condamner l’existence. Après quelques années, tout le monde l’aura oublié. Une autre piste consisterait à accorder à tout le monde cet abattement. L’injustice est au rendez-vous dans un cas comme dans l’autre. Ce sont les revenus non salariaux  qui obtiendraient un cadeau supplémentaire».

Parmi les autres points forts, de cette réforme dont Jean-François Copé affirme qu’«elle bouscule profondément le paysage fiscal français», il est proposé de mensualiser la prime pour l’emploi et d’en augmenter le montant. Il est également prévu de réduire le montant des «niches fiscales». Jusqu’à maintenant il était possible de les cumuler les abattements sans limitation ce qui permettait à certains contribuables, selon Thierry Breton de «réduire fortement leurs impôts», dès lors qu’«ils avaient les moyens financiers et qu’ils étaient bien conseillés». Désormais ces niches seront plafonnées à 8 000 euros -auxquels pourront s’ajouter 750 euros par personne à charge. Ce plafonnement devrait concerner quelque 10 000 contribuables.

Thierry Breton a par ailleurs confirmé que les chômeurs qui accepteront de déménager à plus de 150 kilomètres de chez eux pour rechercher un emploi bénéficieront en 2006 d’une aide à la mobilité. Cette aide prendra la forme d’un crédit d’impôt de 1 500 euros ou bien , pour les non-imposables, d’un chèque de 1 500 euros versés par le Trésor. Pour compléter cette aide aux chômeurs, ceux qui en partant devraient louer leur domicile, bénéficieront alors d’un allégement sur les impôts locatifs.


par Dominique  Raizon

Article publié le 14/09/2005 Dernière mise à jour le 14/09/2005 à 18:17 TU