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Iran

Nucléaire : Téhéran hausse le ton

Les Européens et les Américains demandent à l'Iran de renoncer totalement à l'enrichissement d'uranium comme seule garantie que son programme ne dévie pas vers la fabrication de l'arme atomique. (ici, l'usine iranienne d'Ispahan).Photo : AFP
Les Européens et les Américains demandent à l'Iran de renoncer totalement à l'enrichissement d'uranium comme seule garantie que son programme ne dévie pas vers la fabrication de l'arme atomique. (ici, l'usine iranienne d'Ispahan).
Photo : AFP
Trois jours après l’adoption d’une résolution très dure contre l’Iran par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui permet l’envoi du dossier iranien au Conseil de sécurité des Nations unies, Téhéran a décidé de jouer l’escalade, en menaçant de reprendre l’enrichissement d’uranium et de cesser l’application du protocole additionnel au Traité de non prolifération (TNP) si cette résolution n’était pas corrigée.

De notre correspondant à Téhéran

«La suspension de l'enrichissement figure parmi les concessions que nous supprimerons», a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Hamid Reza Assefi. La veille, le ministère des Affaires étrangères avait publié un communiqué officiel affirmant que «si l'Agence ne modifie pas sa résolution ou insiste pour l'appliquer, l'Iran sera contraint de revenir sur toutes les concessions volontaires, notamment l'application du protocole additionnel». «Nous ne voyons aucune raison pour que notre dossier soit envoyé au Conseil de sécurité. Mais si les Occidentaux veulent le faire par la force, qu'ils le fassent. On verra ensuite qui en souffrira le plus», a ajouté M. Assefi.

En octobre 2003, l’Iran a accepté, à la demande des trois pays européens (France, Allemagne, Grande-Bretagne) de suspendre ses activités d’enrichissement d’uranium et de signer et appliquer le protocole additionnel, qui autorise des inspections inopinées et approfondies des sites nucléaires iraniens. Le parlement iranien n’a pas encore ratifié ce texte, ce qui autorise Téhéran à ne plus l’appliquer.

Il a ajouté que l’Iran attendra «quelques jours pour connaître la réaction de l’autre partie». Allant plus loin, le diplomate iranien a laissé entendre que son pays pourrait même quitter le Traité de non prolifération comme l’avait fait la Corée du Nord si les Occidentaux continuaient à vouloir «utiliser le langage de la force». «Quitter le TNP dépend des décisions futures de l'Agence. Si la position de l'Agence et l'Europe se durcit, ils nous pousseront à prendre des mesures proportionnelles et plus dures. Ils doivent prendre garde de ne pas nous pousser dans cette direction», a-t-il prévenu.

Samedi, le Conseil des gouverneurs de l’AIEA a voté à la majorité (22 contre 1 et 12 abstentions) une résolution présentée par les pays européens qui permet le renvoi futur du dossier nucléaire au Conseil de sécurité. La résolution invoque la «non-conformité de l'Iran au regard du régime de non-prolifération» et des «dissimulations» prolongées. Elle demande à l’Iran d’ouvrir ses sites militaires et pas seulement nucléaires aux inspecteurs de l’Agence, d’accepter que les scientifiques iraniens soient interrogés, de ratifier immédiatement protocole additionnel et de suspendre de manière «totale et indéfinie» toutes ses activités liées à l’enrichissement d’uranium. L’Iran a rejeté ces demandes en affirmant qu’elles n’avaient pas de base juridique légale. Téhéran a repris en août dernier ses activités de conversion d’uranium, qui est l’étape qui précède l’enrichissement lui-même.

Représailles économiques

 Les Européens et les Américains demandent à l'Iran de renoncer totalement à l'enrichissement d'uranium comme seule garantie que son programme ne dévie pas vers la fabrication de l'arme atomique. L’enrichissement d’uranium sert à fabriquer du combustible pour les centrales nucléaires civiles mais il peut également servir à la construction de l’arme atomique. Les Européens affirment que l’Iran, qui n’a pas encore de centrales nucléaires, n’a pas besoin de maîtriser cette technologie et d’enrichir de l’uranium. En effet, la seule centrale nucléaire iranienne, actuellement en construction par les Russes dans le sud de l’Iran, sera achevée fin 2006, mais les Russes se sont engagés à fournir son combustible. De son côté, Téhéran soutient que le TNP l’autorise à développer une industrie pour l’enrichissement de l’uranium. Le président ultraconservateur iranien Mahmoud Ahmadinejad a lui-même dénonce l’«apartheid nucléaire» que les pays riches veulent imposer aux autres en leur interdisant d’avoir la technologie de l’enrichissement.

Téhéran a également menacé les pays qui ont voté la résolution de représailles économiques. «Nos relations politiques et économiques sont liées et nous allons revoir nos relations avec les pays qui ont voté la résolution. Ils vont souffrir», a menacé M. Assefi. Les principaux partenaires économiques de l'Iran, notamment la France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne mais aussi le Japon, la Corée du Sud et l'Inde, font partie des 22 pays qui ont voté la résolution de l'AIEA.

Malgré ces menaces, Téhéran n’a pas totalement fermé la porte des négociations. «L’Iran accueille favorablement toute proposition constructive (...) et invite les trois pays européens à remplacer les mesures radicales par l'entente et la négociation pour trouver une solution à la question nucléaire», a affirmé le ministère des Affaires étrangères. Reste que pour le moment, une reprise du dialogue ne semble pas être à portée de main.


par Siavosh  Ghazi

Article publié le 27/09/2005 Dernière mise à jour le 27/09/2005 à 16:21 TU