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Iran

Nucléaire : le défi de Téhéran

Le site d'Ispahan, le 21 juillet 2004.Photo : Digitalglobe
Le site d'Ispahan, le 21 juillet 2004.
Photo : Digitalglobe
L’Iran a repris ses activités de conversion d’uranium, dernière étape avant l’enrichissement d’uranium qui peut conduire à des utilisations militaires. La communauté internationale s’émeut.

De notre envoyé spécial à Ispahan

DR
Les Iraniens ne voulaient laisser aucun doute. C’est devant une vingtaine de journalistes iraniens et étrangers qu’ils ont redémarré l’usine de conversion d’Ispahan malgré les menaces de la communauté internationale. Alors que les inspecteurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique s’affairent à installer leurs caméras de surveillance, c’est sous le regard de la presse que le premier baril d’uranium a été emmené sur place. Dans une atmosphère de vive excitation, des techniciens revêtus de tenues de protection ont scié le couvercle d'un premier baril de poudre d'uranium devant être ensuite déversé dans des convertisseurs. Les jeunes ingénieurs iraniens ne cachaient pas leur joie.

«L'Iran a repris la conversion d'uranium sous le contrôle de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). La décision est irréversible, même si le Conseil des gouverneurs décide mardi d'envoyer le dossier iranien devant le Conseil de sécurité, parce que cela n'a pas de fondement légal et est contraire au Traité de non-prolifération», a déclaré le vice-président de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique, Mohammad Saïdi, devant des journalistes à l’extérieur de l’usine de conversion, qui est située dans un immense complexe de 1 000 km² à environ quinze kilomètres au sud-est de la ville historique d’Ispahan, dans le centre de l’Iran.

Dans le bras de fer engagé entre l’Iran et la communauté internationale, il s’agit en fait d’un premier pas. Téhéran a seulement repris ses activités de conversion et pas celle de l’enrichissement d’uranium. Les Européens soutenus par les Etats-Unis veulent convaincre l’Iran de renoncer à faire de l’enrichissement d’uranium. La raison en est simple, l’uranium enrichi sert à fabriquer du combustible pour les centrales nucléaires civiles. Mais il peut également être utilisé pour la construction de la bombe atomique. Les pays occidentaux veulent empêcher l’Iran islamique d’avoir la capacité de construire une telle arme.

«Une crise grave»

Mais visiblement, malgré les menaces de la communauté internationale, les Iraniens semblent plus décidés que jamais. Pour le moment, il ne s’agit pas de reprendre l’enrichissement a déclaré Mohammad Saïdi. Mais Il a brandi la menace. «Nous voulons reprendre nos activités d’enrichissement d’ici quelques mois dans le cadre d’un accord avec les Européens. Mais si les Européens arrêtent les négociations, nous reprendrons également l’enrichissement sans leur accord», a ajouté Mohammad Saïdi.

En tout cas, l’annonce de la reprise des activités de conversion a immédiatement suscité la réaction des Européens et des Etats-Unis. La reprise d'activités nucléaires sensibles par Téhéran a ouvert une «crise grave», a déclaré le ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy. Evoquant la réunion prévue mardi à Vienne du Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), il a appelé la communauté internationale à «se montrer unie face à une crise grave provoquée délibérément par l'Iran». Les Etats-Unis ont également vivement réagi. «Nous avons toujours dit que si l'Iran brisait les scellés et reprenait l'enrichissement (en fait la conversion, NDLR) à Ispahan ou ailleurs, une réponse appropriée serait un renvoi» devant le Conseil de sécurité de l'Onu, a dit un responsable du département d'Etat. Selon un responsable du Foreign Office, la Grande-Bretagne discutera des «prochaines mesures à prendre» avec ses partenaires internationaux. Mais, a-t-il ajouté, «notre position est bien connue»: une reprise de la conversion constitue une «violation» des accords et des précédentes résolutions du Conseil des gouverneurs.

La France, la Grande-Bretagne et l'Allemagne (UE3) tentent de convaincre l'Iran de renoncer à la conversion et à l'enrichissement. L'Iran avait suspendu ces activités en novembre pour permettre les négociations avec l'Europe. Mais les Iraniens semblent décidés à ne rien céder. «Nous allons vers la crise», a déclaré un responsable iraniens sous couvert de l’anonymat.


par Siavosh  Ghazi

Article publié le 09/08/2005 Dernière mise à jour le 09/08/2005 à 09:49 TU

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Jean-Michel Boucheron

Député socialiste, président du groupe d'amitié France/Iran

«Au niveau du Traité de non-prolifération il faut s’attaquer aux vrais problèmes de demain, c’est-à-dire les trafics de matériels fissiles qui peuvent tomber entre les mains des terroristes.»

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