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Union européenne

Barroso enterre 69 projets de directives

Soixante-neuf directives sont dans le collimateur du président de la Commission européenne, José Manuel Durão Barroso.(Photo : AFP)
Soixante-neuf directives sont dans le collimateur du président de la Commission européenne, José Manuel Durão Barroso.
(Photo : AFP)
Partant du principe que l’interventionnisme bruxellois est l’une des causes de la victoire du non aux référendums constitutionnels en France et aux Pays-Bas, la Commission européenne «veut se débarrasser des projets qui auraient un impact négatif sur la compétitivité, la croissance économique et l’emploi».

Les échecs successifs enregistrés par l’Union européenne au cours de ces derniers mois n’ont pas entamé les ardeurs réformatrices du président de la Commission européenne, José Manuel Durao Barroso, et de ses collaborateurs. Malgré l’incapacité des 25 à s’entendre sur le budget communautaire pour l’exercice 2007-2013, malgré le revers massif enregistré lors du rejet du traité constitutionnel par deux membres fondateurs, ceux-ci ne renoncent pas à avancer sur la voie de la déréglementation.

Puisque l’Europe politique est paralysée, M. Barroso veut s’engager sur un créneau qui n’a besoin ni de l’approbation des peuples européens, ni de leurs parlements : il propose de faire le ménage des directives qui n’ont été adoptées ni par le Parlement européen, ni par le Conseil et qui sont devenues au fil des ans, selon lui, inutiles car elles encombrent le travail communautaire et peuvent contrarier la «stratégie de Lisbonne», c'est-à-dire entraver les objectifs de compétitivité de l’Union.

«On la jette à la poubelle !»

M. Barroso explique : «on regarde le texte et si c’est une législation absurde, trop bureaucratique, obsolète, qu’elle risque d’agacer les gens ou les entreprises et d’alimenter l’europhobie, on la jette à la poubelle !». Soixante-neuf directives sont ainsi dans le collimateur du président. Aucune n’a pu être adoptée, faute de compromis, en dépit de leur ancienneté : certaines en effet traînent sur le bureau de la Commission depuis près de 10 ans sans trouver de solution.

Parmi celles-ci, la Commission propose notamment de réexaminer le projet de directive sur la protection des travailleurs intérimaires. Le texte est bloqué depuis juin 2003 par le Royaume-Uni, l’Irlande, le Danemark et l’Allemagne, au nom de la flexibilité du marché du travail. La proposition date de 2002 et vise à définir des normes minimales sur les conditions d’emploi des travailleurs intérimaires au sein de l’Union. Elle préconisait une égalité de traitement entre personnel permanent et travailleur intérimaire.

Le prisme de la compétitivité

«C’est la première fois qu’on fait cet exercice, non pas de manière technique, mais à travers l’objectif politique de compétitivité et des réformes économiques», a expliqué à l’AFP un haut fonctionnaire européen. Le commissaire européen aux Entreprises Günter Verheugen, comme le président de la Commission, estiment en effet que l’image bureaucratique et interventionniste offerte par l’Union européenne est l’une des principales sources du rejet de la Constitution, en France et aux Pays-Bas. D’où la nécessité à terme, selon eux, de réexaminer la situation, et les acquis communautaire, à travers le prisme de la compétitivité. Indépendamment de la lecture univoque (et peut être erronée) qu’ils font des votes français et néerlandais, en s’engageant dans cette voie ils s’engouffrent dans la brèche ouverte par le vide politique qui place la Commission au cœur de l’exécutif européen.

Les parlementaires européens ne l’entendent pas ainsi. Ils estiment qu’ils doivent avoir la parole dans cette entreprise d’abandon législatif. Même si certains députés approuvent le principe, la plupart estime que «l’approche n’est pas acceptable» (Martin Schulz, socialiste) car la Commission aurait dû annoncer son projet «devant le Parlement» (Graham Watson, centre-droit).

Lundi à Strasbourg, le président du Parlement européen Josep Borrell a «rappelé à la Commission (…) l’obligation qu’elle a d’informer le Parlement avant de retirer ses propositions, et le faire sous une forme qui ne soit pas vide de contenu». A vingt-quatre heures des propositions attendues du président Barroso, «nous ne savons pas de quels textes il s’agit. Mais s’il s’agit de textes dont l’examen est déjà très avancé, il pourrait surgir des problèmes juridiques», a averti le parlementaire.


par Georges  Abou

Article publié le 27/09/2005 Dernière mise à jour le 27/09/2005 à 18:03 TU

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Gilles Savary

Eurodéputé socialiste

«L'Europe est en train d'envoyer un message détestable qui est: dès qu'un Etat membre est en délicatesse sur un texte, on retire ce texte.»

Daniel Desesquelle

Journaliste à RFI

«Il y a deux critères de retrait des projets de directives: l'élargissement de l'Union européenne et le manque de majorité pour adopter un projet.»

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