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Grande-Bretagne

Les conservateurs peinent à trouver leur Tony Blair

Michael Howard a prévenu que la route vers Downing Street serait difficile.(Photo: AFP)
Michael Howard a prévenu que la route vers Downing Street serait difficile.
(Photo: AFP)
Rendez-vous annuel d'un parti en pleine déconfiture depuis huit ans, le congrès des conservateurs aurait pu s'avérer une fois encore bien morose cette semaine à Blackpool. C'était sans compter la décision surprenante prise par leur leader Michael Howard d'annoncer sa démission au lendemain même des élections législatives britanniques en mai dernier. Du coup, le congrès a été pendant quatre jours le théâtre de joutes oratoires enflammées au cours desquelles les candidats à la direction du parti se sont affrontés sans pitié. Une foire d'empoigne salvatrice qui a redonné l'espoir à beaucoup de militants au bord de la déprime.

De notre correspondante à Londres

Quoi de mieux en effet pour regonfler le moral d'un parti laminé par trois défaites consécutives que d'organiser une course à la succession ? Michael Howard s'est félicité de ce succès avant de quitter Blackpool ce jeudi en estimant que le pari de transformer la conférence en beauty contest c'est-à-dire en concours de beauté pour élire la prochaine «Miss Tory» s'était avérée payante. Même si d'ailleurs on s'achemine plutôt vers un «Mister Tory».

Cinq candidats se sont en effet déclarés: David Davies, 56 ans, pour qui la clé du retour au pouvoir est l'euroscepticisme et le discours sécuritaire; le très populaire mais peut-être un peu trop âgé Kenneth Clarke, 65 ans, ancien chancelier de l'Echiquier, plutôt européen, hostile à la guerre en Irak; plus à gauche David Cameron, 38 ans vante sa jeunesse et joue les jeunes premiers, comme Tony Blair à ses débuts, en se présentant comme la relève post-thatchérienne; Liam Fox, 44 ans, chargé des affaires étrangères dans le «cabinet fantôme» qui chérit un conservatisme proche de la droite républicaine américaine. Enfin Malcolm Rifkind, 59 ans, ex-ministre de la Défense qui incarne un thatchérisme quelque peu dépassé.

«Et le nom du futur leader de l’opposition est…»

Le nom du nouveau leader conservateur, le cinquième depuis 1994, après John Major, William Hague, Iain Duncan Smith et Michael Howard, sera connu après un processus électoral à deux tours lors duquel seuls les 198 membres conservateurs de la chambre des Communes seront d'abord appelés à se prononcer. Puis, une fois les deux finalistes sélectionnés par les députés, ce sont les quelque 300 000 militants du parti qui auront le dernier mot.

Seulement voilà, aucun des candidats déclarés ne s'est réellement détaché à Blackpool qui a d'ailleurs complètement changé la donne. En effet, grand favori au début du congrès, David Davies a perdu du terrain après un discours unanimement jugé médiocre mercredi. Celui qui met en avant son image de «dur» a sans doute perdu des voix parmi les modernes du parti en se positionnant clairement à droite. Et loin de les aider, Michael Howard qui ne fait désormais qu'assurer l'intérim, a respecté «la règle d'or» qu’il s'était fixée au début du congrès tory lundi: ne rien dévoiler de ses préférences parmi les cinq concurrents en lice pour le remplacer.

Malgré tout, ménageant ses effets, Michael Howard a semé quelques secondes un vent de panique chez les candidats, en acceptant de révéler le nom du «futur leader de l'opposition»: Gordon Brown... Une pointe d'humour qui lui a valu un franc succès et des rires quelques peu crispés des candidats qui, s'ils parviennent à la tête du parti, auront la dure tâche d'affronter le ministre de l'Économie et dauphin de Tony Blair pour les législatives de 2009 ou 2010.

Michael Howard a cependant prévenu que la route vers Downing Street serait difficile, appelant l'ensemble des militants à s'unir derrière leur futur leader. «Aucun parti n'a de droit divin à gouverner et la notion de parti naturel de gouvernement n'existe pas», a-t-il insisté, mettant à mal un concept longtemps véhiculé au sein des tories après les 18 ans de pouvoir conservateur et le long règne de Margaret Thatcher. Il est vrai que la marge de manoeuvre des conservateurs paraît limitée face à un Tony Blair charismatique et qui a habilement fait glisser son parti vers le centre où se gagnent les élections, mais aussi face à la réussite économique de son ministre des finances Gordon Brown.

Sans compter que l'image du parti reste globalement négative, jusque parmi ses sympathisants. Trois électeurs sur quatre ne jugent pas un parti tory vieillissant prêt à revenir au pouvoir. Bref, la vie du prochain leader conservateur s’annonce tout sauf un long fleuve tranquille durant les quatre ou cinq années à venir...


par Muriel  Delcroix

Article publié le 07/10/2005 Dernière mise à jour le 07/10/2005 à 12:51 TU