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Sommet de Salamanque

La communauté ibéro-américaine s’organise

Cérémonie de clôture avec, de gauche à droite : le président costa-ricain Abel Pacheco, pe Président uruguayen Tabaré Vasquez, le roi  Juan Carlos d'Espagne, le Premier ministre espagnol José Luis Rodriguez Zapatero et le secrétaire général de l'Union ibéro-américaine, Enrique Iglesias.(Photo : AFP)
Cérémonie de clôture avec, de gauche à droite : le président costa-ricain Abel Pacheco, pe Président uruguayen Tabaré Vasquez, le roi Juan Carlos d'Espagne, le Premier ministre espagnol José Luis Rodriguez Zapatero et le secrétaire général de l'Union ibéro-américaine, Enrique Iglesias.
(Photo : AFP)
Y aura-t-il un avant et un après Salamanque ? Ou, formulé d’une autre façon, le quinzième sommet ibéro-américain, tenu vendredi et samedi dans la célèbre ville castillane, va-t-il infléchir le sens et le poids de ces rencontres réunissant l’Espagne, le Portugal et leurs ex-colonies du «Nouveau Monde» ?

De notre correspondant à Madrid

Bien sûr, comme à l’accoutumée, les chefs d’Etat et de gouvernement –en l’absence remarquée de Fidel Castro et aussi celle des leaders salvadorien, nicaraguayen, équatorien et guatémaltèque– s’en sont tenus à des pétitions de principe sur la nécessité de lutter contre la pauvreté, les inégalités sociales, l’exclusion et l’émigration économique. Pour autant, cette fois-ci, la grandiloquence et la rhétorique creuse n’ont pas été de mise. Surtout, désireux que ce concert de nations ibéro-américaines ait une voix propre et puisse influer sur le cours des choses, les leaders réunis ont enfin créé une structure permanente. Il s’agit d’un secrétariat général, sur le modèle onusien, dont la direction a été confiée à l’Uruguayen Enrique Iglesias.

Cet organe aura non seulement pour mission de canaliser et harmoniser les agendas des chefs d’Etat mais il devra aussi répondre aux défis concrets, notamment lutter contre la corruption et l’«insécurité juridique» dont se plaignent tant les entrepreneurs au moment d’investir dans un pays. Une condition réclamée tout spécialement par les entreprises espagnoles, deuxième investisseur en Amérique latine derrière les Etats-Unis, l’argent investi dans ce continent correspondant à 6% du PIB espagnol. Sur ce même terrain de consolidation et d’intégration économique, il faut signaler l’incorporation du Venezuela au sein du Mercosur, un bloc commercial fondé en 1991 et qui réunit l’Argentine, le Brésil, l’Uruguay et le Paraguay.

Même absent Castro suscite la polémique

Autre immense défi du Secrétariat général ibéro-américain (SGI) : la pauvreté. Un plan sera présenté aux Etats membres entre 2008 et 2015 avec pour objectif l’«éradication totale de l’analphabétisme». Dans un continent de 600 millions de personnes, où la moitié vit dans la pauvreté, le SGI sait que de l’efficacité des mesures adoptées contre les inégalités sociales dépendra aussi le futur de la démocratie en Amérique latine. Pour l’heure, l’immense majorité des pays sont des démocraties parlementaires, actuellement aux mains de leaders progressistes. Mais l’an prochain, à la faveur d’une douzaine d’élections, la situation pourrait changer et faire le jeu de chefs de file populistes, en particulier dans les régions où la grogne sociale est la plus forte, à savoir dans les pays andins et centre-américains.

Sur le terrain politique, alors que le bouillant vénézuélien Hugo Chavez s’est montré plutôt conciliant avec ses pairs, Fidel Castro –même absent– ne pouvait manquer de susciter la polémique, comme à chaque sommet ibéro-américain. Pour satisfaire le régime castriste, les chefs d’Etat et de gouvernement réunis s’apprêtaient à approuver deux résolutions : la condamnation du blocus américain contre Cuba ; et d’autre part, l’exigence que Washington livre au Venezuela un ex-agent de la CIA, Luis Posada Carriles, accusé d’avoir commis un attentat contre un avion cubain en 1976 ayant coûté la vie à 73 personnes. Or à la suite des protestations de Washington –qui a qualifié ces intentions de «préoccupantes»­–, il y a eu rectification. Sur l’initiative du Premier ministre espagnol José Luis Zapatero, qui après le retrait de ses soldats d’Irak en 2004 cherche à se rabibocher avec l’administration Bush, le communiqué final a été bien plus suave : Posada Carriles pourra être jugé aux Etats-Unis, concrètement en Floride ; et, au lieu de «blocus», les leaders ont préféré la notion ambivalente de «mesures de nature économique et financière». Il faut donc s’attendre à ce que Fidel Castro manifeste d’ici peu son mécontentement.


par François  Musseau

Article publié le 16/10/2005 Dernière mise à jour le 16/10/2005 à 16:00 TU