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Nations unies

Kofi Annan doit gérer une crise financière

Le siège de l'ONU à New York.( Photo : AFP )
Le siège de l'ONU à New York.
( Photo : AFP )
La question du budget des Nations unies se trouve dans une telle impasse que le secrétaire général de l’ONU a reporté une tournée en Asie. Kofi Annan va devoir batailler pour trouver un consensus entre les différents gros contributeurs financiers de l’organisation. En toile de fond, la nécessaire réforme de l’ONU, qui suscite beaucoup de dissensions.

Près de 16 000 réunions, plus de 6 000 rapports… Ces chiffres vertigineux témoignent de l’extrême lourdeur administrative qui caractérise le système des Nations unies. A lui seul, le secrétariat général de l’organisation est une structure qui emploie environ 8 000 personnes. A leur tête, Kofi Annan. Il s’est lancé depuis plusieurs mois dans une vaste réforme de l’ONU pour simplifier les procédures administratives, les rendre plus transparentes, et surtout réaliser des économies. Le budget de fonctionnement de l’organisation est établi pour une durée de deux ans. Pour la période 2006-2007, le budget prévisionnel doit s’élever autour de 3,9 milliards de dollars. Mais voilà, ce budget n’a pas encore été adopté. Et si aucun vote n’intervient dans les prochaine semaines, cela risque de créer «une grave crise financière», d’après Kofi Annan. Vu la gravité de la situation, le secrétaire général a donc jugé nécessaire d’annuler une tournée prévue en Chine, en Corée, au Japon et au Vietnam. Ces déplacements sont reportés à 2006.

Le budget de l’ONU est approvisionné par les contributions des Etats membres et par des contributions volontaires d’organisations, d’entreprises, voire d’individus. En tout cas, chaque pays est dans l’obligation d’apporter une contribution. Traditionnellement, le plus grand pourvoyeur de fonds est les Etats-Unis, dont la contribution représente 22% du budget. Viennent ensuite le Japon (20%), l’Allemagne (10%), la France (6,5%), l’Italie (5%). Mais pour autant, de nombreux pays ne s’acquittent pas de leurs obligations financières vis-à-vis de l’organisation. En tout cas, ils semblent traîner les pieds pour remplir cette obligation. Ainsi les arriérés budgétaires s’élèvent à 739 millions de dollars pour 2005. Les Etats-Unis sont le pays qui cumule le plus de dettes.

Mais si Washington se fait tirer les oreilles, la présidence américaine tient l’organisation onusienne par la barbichette en exigeant des réformes structurelles. Il y a une semaine, par la voix de leur ambassadeur auprès de l’ONU, John Bolton, les Américains s’étaient opposés à l’adoption du prochain budget, tant que le travail sur les réformes de l’ONU n’avait pas progressé. Et John Bolton de proposer «un mécanisme qui permettrait d’adopter un budget intérimaire pour trois ou quatre mois». Pas question, a répondu en substance le contrôleur des comptes de l’ONU, Warren Sachs.

Machine bloquée

En fait, ces litiges autour du budget sont révélateurs de profonds clivages autour des projets de réforme de l’institution. Et si tous les Etats membres s’accordent sur la nécessité de revoir le fonctionnement de l’ONU, les divergences sont dues au contenu de cette réforme. Principal sujet de blocage: la recomposition du Conseil de sécurité.

Cette instance est composée de 15 membres, dont 5 permanents ayant un droit de veto (Etats-Unis, Russie, France, Royaume-Uni, Chine). Plusieurs projets de réforme visent à accorder à d’autres pays, des sièges permanents. Ainsi le Japon exige un de ces sièges, compte tenu de sa forte contribution au budget de l’ONU. Mais la Chine, hostile aux ambitions diplomatiques du Japon, s’y oppose. Résultat: les autorités japonaises menacent de diminuer leur apport financier à l’organisation onusienne. Blocage.

Associé au Japon, un groupe de pays avec l’Inde, l’Allemagne et le Brésil, qui a présenté un projet de réforme. Refus de la part des Etats-Unis et aussi de l’Union africaine qui défend ses propres propositions. Blocage.

«Le machin», surnom donné à l’ONU par le général de Gaulle dans les années 60, semble devenir une machine de plus en plus difficile à faire avancer, tant sur le plan des réformes institutionnelles que sur le plan des ressources financières. Pour éviter que la machine ne s’écrase, Kofi Annan va devoir mettre les mains dans le cambouis. Dès aujourd’hui.


par Olivier  Péguy

Article publié le 02/12/2005 Dernière mise à jour le 02/12/2005 à 17:10 TU