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Côte d’Ivoire

Mise en examen du général Poncet

Le général Henri Poncet, le 18 janvier 2005, à Abidjan, est aujourd'hui mis en examen pour «complicité d'homicide» d'un civil ivoirien.(Photo: AFP)
Le général Henri Poncet, le 18 janvier 2005, à Abidjan, est aujourd'hui mis en examen pour «complicité d'homicide» d'un civil ivoirien.
(Photo: AFP)
Dans le cadre de l’enquête sur la mort du civil ivoirien Firmin Mahé (13 mai 2005), le général de corps d’armée Henri Poncet est accusé par un subordonné, le colonel Burgaud, d’avoir implicitement donné l’ordre de son exécution. L’ancien chef de la force «Licorne» en Côte d’Ivoire est mis en examen depuis mardi soir -mais laissé en liberté- pour «complicité d’homicide volontaire».

«Vous remontez à Man [où se trouve l’hôpital, 570 kms à l’ouest d’Abidjan]. Vous roulez doucement. Vous me comprenez ! Quand un général trois étoiles dit à un colonel ‘vous roulez doucement, vous me comprenez’, il n’y a pas besoin de faire répéter les choses», a déclaré le colonel Eric Burgaud en se défaussant sur un ordre implicite d’exécution du civil ivoirien Firmin Mahé, capturé blessé et retrouvé mort par étouffement. «J’ai compris la même chose que tout le monde, c’est-à-dire que l’idéal était que Mahé arrive mort», a ajouté le 29 novembre lors de sa garde à vue, le colonel Burgaud -chef du détachement qui opérait dans la zone où ont eu lieu les faits-, accusant par là-même le général Poncet, ancien chef de la force Licorne (de juin 2004 à juin 2005). Fait tout à fait exceptionnel, ce dernier, accusé de «complicité d’homicide volontaire», a été inculpé mardi soir.

L’affaire Mahé remonte à mai 2005, lorsqu’un civil ivoirien est blessé au cours d’une échauffourée avec des soldats français. Présenté par les militaires comme un «coupeur de routes et un bandit de grand chemin» -ce que dément un avocat de la famille de la victime-, l’homme est transféré à l’hôpital dans un blindé et tué par étouffement lors de son transfert à Man. Après enquête, quatre soldats français sont inculpés dans le cadre de l’affaire. Le ministère de la Défense soupçonne le général Poncet d’avoir été au courant des exactions mais «couvert» le crime en n’informant pas ses supérieurs hiérarchiques. Il est alors suspendu de ses fonctions le 17 octobre dernier par la ministre Michèle Alliot-Marie.

«Rien à cacher dans cette affaire»

Le général Poncet «blâmé», la justice militaire française ouvre, dans le même temps, une information judiciaire contre X «pour homicide volontaire» : «Les autorités françaises veulent faire toute la lumière et n’ont rien à cacher dans cette affaire», avait déclaré le Premier ministre français Dominique de Villepin. Placé en garde à vue dans les locaux de la brigade criminelle à Paris où il se présente de lui-même dès réception de sa convocation, puis présenté à la juge d’instruction du tribunal des armées (TAP), Brigitte Raynaud, le général Poncet dément alors formellement avoir donné quelque ordre d’exécution : «Il n’a jamais, de la manière la plus claire, donné un tel ordre», a déclaré Maître Jean-René Farthouat, son avocat.

Le juge du TAP ayant saisi le juge des libertés et de la détention (JLD) en vue d’un éventuel placement en détention, ce dernier n’a pas jugé nécessaire d’écrouer le général mis en examen. Le général Maurice Schmitt, ancien chef d'Etat-major des armées (de 1987 à 1991) estime que «l'armée saura faire face, même si elle souffre de voir aujourd'hui l'un des siens impliqués dans une affaire difficile (…) Il ne faut pas dramatiser (…) et, face à un dossier d'une telle gravité on doit savoir se taire et éviter les bavardages, les fuites». Il n’en demeure pas moins que la mise en examen d’un général de corps d’armée ne passe pas inaperçue : depuis le putsch des généraux pendant la guerre d’Algérie (1961), c’est la première fois qu’un général doit répondre devant la justice d’actes commis au cours d’opérations militaires. 


par Dominique  Raizon

Article publié le 14/12/2005 Dernière mise à jour le 14/12/2005 à 17:13 TU

Audio

Philippe Leymarie

Journaliste à RFI

«L'instruction de cette affaire, c'est un peu «parole d'officier contre parole d'officier» !»

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