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Tchad

Attaque de la rébellion dans l’est

En mai dernier, N’Djamena avait officiellement accusé Khartoum d’armer plus de 3 000 rebelles tchadiens dans des camps d’entraînement au Darfour.(Carte : RFI)
En mai dernier, N’Djamena avait officiellement accusé Khartoum d’armer plus de 3 000 rebelles tchadiens dans des camps d’entraînement au Darfour.
(Carte : RFI)
Le Tchad accuse le Soudan d’être derrière la rébellion qui a mené les attaques de dimanche à Adré, dans l’est du pays, faisant, selon les chiffres donnés par le gouvernement et revus plusieurs fois à la hausse, plus de trois cents morts.

De notre envoyée spéciale dans l’est tchadien

Auprès d’un ouadi encore rempli d’eau en ce début de saison sèche, des troupeaux de bœufs et de chèvres paissent tranquillement. Le paysage sablonneux et poussiéreux est ponctué, ça et là, de quelques collines qu’on dirait sorties de nulle part. Rien ne semblerait rompre cette atmosphère paisible, si l’on n’apercevait, sur la route entre Abéché et Adré, une quinzaine de véhicules de l’armée française, camouflés, en train de patrouiller. Plus loin, à l’entrée de la ville, l’effectif de la garnison tchadienne a été renforcé et peine à contenir les centaines de soldats qui ont été dépêchés ici ces derniers jours. Blindés, armes lourdes, le dispositif est impressionnant. A Adré, la tension est à son comble après les affrontements de la veille.

«Dimanche, les rebelles sont arrivés pour prendre la ville en trois colonnes. Après s’être repliés une première fois, ils ont attaqués à nouveau vers 15 heures», explique Alifa Weddeye, frère de Goukouni Weddeye, l’ancien président du gouvernement de transition, le GUNT et général fraîchement promu, nommé commandant des opérations dans cette zone hautement stratégique, à 170 kilomètres d’Abéché. Il emmène les journalistes dans la brousse où ont eu lieu les combats. Le Tchad tient à montrer que l’offensive a été sérieuse. En 48 heures, le bilan officiel est passé d’une centaine de morts à 300 côté rebelles, pour une dizaine seulement côté gouvernemental. Quelques heures a peine après le début des combats, le Tchad a une fois de plus officiellement accusé le Soudan d’être derrière les attaques. Des griefs récurrents depuis plus de six mois. En mai dernier, N’Djamena avait officiellement accusé Khartoum d’armer plus de 3 000 rebelles tchadiens dans des camps d’entraînement au Darfour.

Un échantillon des troupes surarmées

Depuis le début de la guerre dans cette province de l’ouest du Soudan, Omar El Béchir accuse Idriss Déby d’encourager la rébellion zaghawa du MJE et du MLS, tandis que son homologue se plaint des méfaits des milices arabes appuyées par les divers rebelles tchadiens qui gravitent dans la zone depuis plusieurs années. Eparpillés dans la brousse, derrière des arbustes desséchés, une dizaine de cadavres sont montrés aux journalistes. On nous dit que ce sont des rebelles du RDL, Rassemblement pour la démocratie et la liberté, le mouvement de Mahamat Nour, au maquis depuis plusieurs années contre le régime d’Idriss Déby. Certains portent encore un treillis aux couleurs de l’armée tchadienne. «Des déserteurs», affirme un colonel, de ceux qui ont suivi la vague de départ des officiers ces dernières semaines, après la création d’un autre mouvement, le Scud, à la mi-octobre.

Une dizaine de prisonniers sont extraits de leur cellule étroite et sombre de la maison d’arrêt d’Adré. L’odeur pestilentielle exhale brutalement du réduit dans lequel elle était confinée. Ils sont jeunes, apeurés et habillés en civil. L’un est soudanais et a été embarqué de force dans la rébellion. L’autre est tchadien, simple cultivateur et cherchait un travail de chauffeur. Un autre encore est simple soldat et n’a fait que suivre son chef qui lui a dit de déserter la garnison d’Adré, il y a une semaine avec plusieurs véhicules remplis d’armes. Ils sont présentés comme un échantillon des troupes surarmées qui ont attaqué dimanche.

«Si Adré est prise, le prochaine cible immédiate est Abéché, la troisième ville du Tchad, à moins de mille kilomètres de N’djamena», note une autorité locale qui estime que le péril a été, cette fois, évité de justesse.


par Stéphanie  Braquehais

Article publié le 21/12/2005 Dernière mise à jour le 21/12/2005 à 18:07 TU