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Indonésie

Aceh : désarmement accompli

Les forces de sécurité indonésiennes ont accompli leur retrait d'Aceh.(Photo : AFP)
Les forces de sécurité indonésiennes ont accompli leur retrait d'Aceh.
(Photo : AFP)
Conformément à l’accord de paix conclu l’été dernier, les forces de sécurité indonésiennes achevaient jeudi leur retrait d’Aceh, province du nord de grande île de Sumatra. Ce départ intervient après le désarmement des miliciens indépendantistes du GAM il y a dix jours, et la dissolution de leur armée le 27 décembre.

De notre correspondant à Jakarta

La première étape du processus d’Helsinki est réussie. L’accord signé en août dernier pour mettre un terme à l’insurrection indépendantiste à Aceh, avait fixé un objectif : le désarmement du Mouvement Aceh Libre (GAM) contre le retrait de la moitié des troupes indonésiennes. Les deux adversaires ont respecté le contrat dont la date buttoir avait été fixée au 29 décembre. Mardi, le GAM a décrété officiellement « la démobilisation de ses combattants et la dissolution de sa branche armée ». Durant l’autonome, il avait rendu les 820 armes qu’il avait déclarées en sa possession à la Mission internationale d’observation de la paix.

De son côté, Jakarta a retiré 24 000 soldats par vagues successives depuis septembre. Les derniers militaires concernés par ce retrait, 3 350 hommes, ont quitté la province jeudi. Réunis dans le port de Lokhsemawe, la capitale économique d’Aceh, ils ont embarqué dans des bateaux qui les ramènent sur l’île de Java, le cœur politique et démographique de l’Indonésie. Quinze mille soldats restent à Aceh, mais ils seront désormais cantonnés aux frontières internationales tandis que la moitié, au moins, des 9 000 policiers assurant l’ordre public, devront être originaires de la province.

Le tsunami du 26 décembre 2004, qui a fait 170 000 victimes achénaises, a été fatal à la guerre qui a ravagé pendant trente ans la région la plus au nord de l’île de Sumatra. Le GAM, à l’agonie militairement depuis l’instauration de la loi martiale en 2003, bénéficie du soutien de la population locale. Mais celle-ci n’aurait pas accepté que les séparatistes poursuivent la guérilla alors qu’il faut reconstruire presque entièrement les zones dévastées par le raz-de-marée. Quant au gouvernement indonésien, il n’a pas eu le choix. Les donateurs internationaux, qui ont promis d’investir 4 milliards d’euros, ont conditionné leur aide à un retour à la sécurité et à la stabilité dans la province. Le désarmement et le retrait militaire, sur lesquels avaient achoppé les précédentes tentatives de paix, n’étaient donc peut être pas, dans ce contexte, le plus difficile à réaliser.

Jakarta refuse aux séparatistes de se constituer en parti

La réintégration des rebelles dans la vie civile s’annonce autrement plus compliquée. Les 2 000 séparatistes démobilisés ont regagné leur village et touchent une pension mensuelle de 85 euros versée par Jakarta. Mais ils refusent toujours de donner leur nom au gouvernement indonésien par crainte de représailles. Les allocations sont pour l’instant versées à chaque commandant d’unité qui les reverse ensuite à ses « anciens combattants ». Autre question cruciale : la participation politique du GAM aux institutions qui seront créées dans le cadre du statut d’autonomie accordé à Aceh. Des élections sont prévues en 2006 mais Jakarta refuse toujours aux séparatistes le droit de se constituer en parti politique, craignant qu’une victoire électorale du GAM ne soit interprétée comme un quasi-référendum d’autodétermination.

Ils ne pourront donc se présenter au scrutin que sous des candidatures individuelles. D’ici là, ils doivent trouver l’argent nécessaire à la conduite de leur carrière politique. « L’impôt de résistance nationale», prélevé discrètement dans la population pendant le conflit, n’est plus possible depuis le raz-de-marée. L’aide internationale attisera donc forcement les convoitises. Un magot sur lequel lorgne aussi les officiers indonésiens qui profitaient de l’instabilité créée par la guerre pour se livrer à des activités très lucratives : protection monnayée des raffineries pétrolières, racket et trafic de drogue.


par Jocelyn  Grange

Article publié le 29/12/2005 Dernière mise à jour le 29/12/2005 à 18:11 TU