France
L’article 49-3 au secours du CPE
(Photo : AFP)
Excédé par les ralentissements successifs de la procédure, le Premier ministre Dominique de Villepin a fait acte d’autorité jeudi, recourant à l’article 49-3 de la Constitution pour faire passer, sans vote, le texte du projet de loi Egalité des chances instaurant le Contrat première embauche. L’article 3 (sur 30 que compte le dispositif) avait été voté tard dans la nuit de mercredi à jeudi. Il restait donc jusqu’à dimanche pour examiner les 27 articles et 370 amendements restants. Mettant en balance d’une part le piétinement des débats parlementaires -3 articles votés en 7 jours- et d’autre part l’échéance du calendrier, le gouvernement a décidé de recourir, conformément à ce que l’autorise à faire la Constitution, à l’article 49-3 lui permettant de faire adopter le texte sans vote.
Toutefois, le projet de loi n’est considéré comme approuvé qu’une fois levée la motion de censure qui peut être déposée dans les vingt-quatre heures. Celle-ci doit être « signée par un dixième au moins » des députés, soit 57. Dans le cas où la motion de censure est adoptée à la majorité absolue, le Premier ministre remet alors la démission de son gouvernement au chef de l’Etat. La gauche, qui fustige « un coup de force », entend se mobiliser pour faire barrage.
Le groupe PS a décidé de déposer, le 16 février, une motion de censure contre « la politique sociale du gouvernement », et non sur le projet de loi égalité des chances. Elle sera défendue par le premier secrétaire du PS, François Hollande, a annoncé le groupe socialiste. De leur côté, les confédérations syndicales et les mouvements lycéens et étudiants ont préféré attendre la fin des vacances scolaires pour décider une journée nationale de mobilisation des jeunes et des salariés le mardi 7 mars afin d’exiger le retrait du CPE. D’ici là, les collectifs d’étudiants et de lycéens entendent continuer à mobiliser l’opinion en faisant du mardi 14 et du jeudi 16 « les temps forts » de la semaine prochaine, « avec des assemblées générales d'information et de mobilisation, des actions et manifestations ».
Le temps était compté
Accusé par la gauche d’avoir précipité le train des choses, le gouvernement met en avant l’urgence du calendrier auquel il était confronté : les députés devait se prononcer sur l’ensemble du texte le 21 février -pour le présenter devant le Sénat le 28 février. Au vu du nombre d’articles restants à examiner d’ici dimanche -avant les fameuses vacances parlementaires prévues la semaine prochaine- le temps était compté. Pourtant, « face aux inégalités, face aux discriminations, et face au chômage des jeunes, notre pays s’impatiente, il attend des réponses et veut des décisions », plaide le Premier ministre.
En ayant recours au 49-3 le gouvernement ne laisse plus de place au débat. Il justifie sa décision en déclarant que l’opposition (partis de gauche et Verts réunis) était « lancée dans une espèce de manoeuvre d'obstruction absolument folle », selon les déclarations de Jean-François Copé, porte-parole du gouvernement, arguant que la situation était « intenable, avec quatre heures de suspension de séance, 67 rappels au règlement ». Il a ajouté : « Dans ces moments-là, le Parlement devient comme un théâtre d'ombres ». Du même coup, outre le CPE d’autres dispositions de loi sur l’Egalité des chances ne seront pas débattues : ainsi, par exemple l’instauration d’un « service civil volontaire pour les 16-25 ans », et d’un contrat de parentalité assorti d’une éventuelle mise sous tutelle des allocations familiales en cas d’absentéisme scolaire.
par Dominique Raizon
Article publié le 10/02/2006 Dernière mise à jour le 10/02/2006 à 13:45 TU