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Justice internationale

Le TPIR délocalise ses procédures

Michel Bagaragaza devrait être le premier accusé de génocide du TPIR à être jugé dans un pays européen.(Source : IRIN)
Michel Bagaragaza devrait être le premier accusé de génocide du TPIR à être jugé dans un pays européen.
(Source : IRIN)
Le tribunal pénal international pour le Rwanda s’apprête à remettre à la Norvège un suspect accusé de génocide. D’autres dossiers devraient être transférés vers les tribunaux européens pour permettre à la juridiction de l’Onu de fermer ses portes en 2010.

De notre correspondante à La Haye

Accusé par le tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) de génocide et de conspiration en vue de commettre le génocide, Michel Bagaragaza devra répondre de ses crimes devant la justice norvégienne. Cet ancien directeur de l’OCIR/Thé, organisme gouvernemental chargé du contrôle de la production de thé au Rwanda, s’était rendu volontairement au tribunal international, basé à Arusha, en Tanzanie, le 16 août 2005. En septembre, il avait passé un accord avec le procureur et accepté de plaider coupable. Le repenti avait alors été transféré à la prison du tribunal pour l’ex-Yougoslavie à La Haye, aux Pays-Bas, «pour des raisons de sécurité».

Transfert de dossiers aux justices nationales

Dans une requête déposée le 15 février 2006, le procureur du tribunal international demande que l’affaire Bagaragaza soit transférée à la justice norvégienne. L’opération est une première pour le tribunal et répond à la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies du 28 août 2003, selon laquelle le TPIR devra boucler ses travaux en 2010 et fermer définitivement ses portes. La communauté internationale juge désormais le tribunal international trop coûteux et estime que l’essentiel du travail de justice a été accompli. Mais New York demande, entre autres mesures, que les Etats délestent le tribunal pour le Rwanda en acceptant de juger certains des accusés devant leurs propres tribunaux.

Le repentir

Accusé d’avoir financé et entraîné la sinistre milice Interahamwe, dont les machettes ont pavé le pays des Mille Collines de près de 800 000 morts, essentiellement tutsis, entre avril et juillet 1994, Michel Bagaragaza bénéficiera, selon l’accord passé avec le procureur, de protections pour sa famille et de l’assurance de ne pas être renvoyé dans une prison africaine pour y purger sa peine. En échange, il a fourni 637 heures d’interrogatoire et devra témoigner contre ses anciens comparses, en procès à Arusha.

Mais au-delà du volet judiciaire, l’accord passé entre l’homme d’affaires rwandais et le parquet d’Arusha comprend une clause plus politique. Pour obtenir son transfert en Norvège, où il risque une peine maximale de 21 ans de prison alors que le TPIR prononce des condamnations à vie, Michel Bagaragaza «a promis d’assister les autorités nationales dans leurs enquêtes» à l’encontre de Rwandais réfugiés sur le territoire norvégien. Depuis plus de six mois, Oslo est régulièrement accusé par Kigali d’avoir octroyé le statut de réfugié politique à des suspects de génocide. Reste que les Etats rechignent à s’acquitter de requêtes d’extradition avec le Rwanda. Le régime de Kigali est régulièrement dénoncé pour violations des droits de l’Homme et la peine de mort y est toujours en vigueur, ce qui rend le Rwanda aujourd’hui inéligible à l’acquisition de dossiers établis par le TPIR. Le tribunal international espère, en revanche, déférer d’autres dossiers en Belgique, en France ou en Suisse.

Les poursuites contre l’APR

A ce jour, le TPIR a jugé 26 accusés, sur près de 70 mises en accusation. Si le parquet a bouclé ses enquêtes contre les principaux responsables du génocide, le procureur doit encore, à la demande du Conseil de sécurité, poursuivre les auteurs des crimes commis par l’Armée patriotique rwandaise (APR) au pouvoir à Kigali. Lors de l’ouverture de cette partie des enquêtes par le TPIR en juin 2001, Kigali avait cependant bloqué toute coopération, empêchant les témoins de se rendre à Arusha pour déposer. Par ailleurs, depuis l’automne 2005, Kigali multiplie les déclarations à l’encontre de pays européens, les accusant d’accueillir sur leur sol des réfugiés rwandais suspects de génocide. Un activisme d’autant plus affirmé que deux enquêtes ont été ouvertes en France et en Espagne à l’encontre de dignitaires de l’actuel régime.


par Stéphanie  Maupas

Article publié le 16/02/2006 Dernière mise à jour le 16/02/2006 à 09:19 TU

Les liens

RFI

IRIN
Bureau pour la coordination des affaires humanitaire de l'ONU.