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Nations unies

Droits de l’homme : réformette à l’ONU

Malgré leurs réticences, « <em>les Etats-Unis travailleront en coopération avec les autres Etats membres&nbsp;</em>» a déclaré John Bolton, ambassadeur américain à l'ONU.(Photo: AFP)
Malgré leurs réticences, « les Etats-Unis travailleront en coopération avec les autres Etats membres » a déclaré John Bolton, ambassadeur américain à l'ONU.
(Photo: AFP)
L'Assemblée générale de l'Onu a enterré mercredi l’actuelle Commission des droits de l’homme, discréditée par la présence en son sein d’Etats répressifs, et approuvé à une écrasante majorité la création d'un Conseil des droits de l'homme. La réforme est jugée insuffisante par les Etats-Unis, même s’ils promettent leur soutien au nouvel organe.

Le 20 janvier 2003, la Libye accédait à la présidence de la Commission des droits de l’homme des Nations unies, grâce au vote en sa faveur d'une large majorité des 53 Etats membres. Dans l’opinion internationale, cet événement portait le coup de grâce à une instance onusienne déjà largement discréditée par la présence, en son sein, de pays comme le Soudan, la Chine, Cuba, la Syrie ou le Zimbabwe, et par sa tendance à condamner les petits pays plutôt que les puissances influentes.

La réflexion sur les nécessaires améliorations à apporter à la structure et au fonctionnement de cet organe allait être conduite par le secrétaire général, Kofi Annan, dans le cadre d'une vaste réforme de l'ONU. Lors du sommet de New York en septembre dernier, le principe en avait été approuvé par les dirigeants mondiaux. Mais l'adoption de la résolution a été retardée, les auteurs du projet tentant, sans succès, de convaincre les Etats-Unis de se rallier à une réforme qu’ils jugent toujours incomplète et superficielle. « Nous voulons un papillon, pas une chenille avec du rouge à lèvres, ironisait le 9 mars John Bolton, l’ambassadeur américain à l’ONU. Nous essayons de renégocier le texte. »

Le Conseil se réunira plus souvent

Selon Washington, les règles régissant le Conseil ne sont pas suffisamment strictes pour empêcher des pays violant les droits de l'homme d'y obtenir un siège. La nouvelle instance, où siègeront 47 pays, sera chargée de superviser le respect des droits de l'homme dans le monde et, à ce titre, devra dénoncer les auteurs d'atteintes aux libertés fondamentales et aider les pays à élaborer leur propre législation en la matière. Les 47 Etats membres seront élus à bulletins secrets et à la majorité absolue de l'Assemblée générale (et non plus désignés comme avant par chaque groupe régional). Parmi les autres changements prévus, le Conseil se réunira plus souvent (au moins trois fois par an pour dix semaines et non plus seulement pour six semaines au printemps) et créera un système pour revoir régulièrement l'état des droits de l'homme dans chaque pays. L'Assemblée générale pourra, par un vote aux deux tiers, suspendre un membre qui commettrait d'importantes violations.

Malgré les pressions des Européens et du Canada, Washington, seul opposant ou presque, n’a pas cédé. L’adoption n’a donc pu se faire par consensus ; il a fallu recourir au vote. Les Etats-Unis n’ayant pas droit de veto à l’Assemblée générale, contrairement au Conseil de sécurité, le texte ne pouvait être bloqué. Et c’est sous les applaudissements que l'Assemblée générale de l'ONU, réunie en séance plénière à New York, a enterré l’actuelle Commission des droits de l’homme et approuvé à une majorité écrasante la création en lieu et place d'un Conseil des droits de l'homme. Résultat : 170 Etats membres ont voté pour la résolution, 4 contre (Etats-Unis, Israël, îles Marshall et Palau), 3 (Bélarus, Iran, Venezuela) se sont abstenus.

La réforme, même imparfaite, marque un progrès

Si les Etats-Unis n’ont pu renégocier ce texte, fruit de cinq mois de consultations et de négociations, s’ils ont voté contre pour marquer leur désapprobation, ils n’ont toutefois pas fait obstruction. « Nous n'avions pas suffisamment confiance dans ce texte pour pouvoir dire que le Conseil serait meilleur que son prédécesseur, a déclaré mercredi John Bolton. Cela dit, les Etats-Unis travailleront en coopération avec les autres Etats membres pour rendre le Conseil aussi fort et efficace que possible. »

De Madagascar où il est en visite officielle, le secrétaire général, Kofi Annan, a salué l'adoption de cette « résolution historique (...) qui donne aux Nations unies une chance de prendre un nouveau départ dans leur travail en faveur des droits de l'homme à travers le monde ». Les pays européens, dans leur ensemble, estiment que la réforme, même très imparfaite, marque toutefois un progrès. Quant aux organisations de défense des droits de l’homme Amnesty International et Human Rights Watch se disent satisfaites et qualifient l'adoption du texte d' « avancée majeure pour la protection des victimes. »


par Philippe  Quillerier

Article publié le 16/03/2006 Dernière mise à jour le 16/03/2006 à 17:19 TU