Tchad
N’Djamena dans l’incertitude
De notre correspondante à N’Djamena
(Carte : C. Wissing / RFI)
A la sortie nord de la ville vers la route d’Abéché, on apercevait au moins cinq chars pointant leur canon sur la sortie de la ville, renforcés par une dizaine de 4x4 Toyota remplis de militaires tchadiens. Des mouvements de véhicules étaient perceptibles dans la matinée. Un hélicoptère de l’armée tchadienne prenait la route vers le Sud aux alentours de 11 heures. Une heure plus tard, les réseaux de téléphonie mobile Tigo et Celtel étaient coupés. Seules les lignes fixes fonctionnaient encore. Dans les rues, l’activité semble quasi normale, les marchés ouverts et fréquentés, les commerces également. Mais de nombreux bâtiments administratifs ou privés, eux, n’avaient pas ouvert ce matin.
10 h30 : les ressortissants français ont été priés d’aller chercher leurs enfants au lycée français Montaigne, un établissement de 430 élèves. L’ambassade a décidé sa fermeture en raison « de l’accélération des événements ». Des consignes d’éviter de sortir et de rester chez soi à la nuit tombée ont été données à tout le monde. Certaines organisations humanitaires telle MSF ont évacué mardi la plupart de leurs expatriés par l’avion d’Air France vers Paris, d’autres vers le Cameroun. Des commerçants tchadiens ont décidé depuis plusieurs jours de mettre une partie de leurs biens à l’abri et d’évacuer leur famille. Sur l’avenue Mobutu, qui conduit à la sortie sud de la ville, une file de véhicules se dirigeait vers le pont de N’Ggueli qui marque la frontière avec le Cameroun. Le personnel local des Nations unies a été invité à rentrer chez lui et les expatriés sont consignés dans leur base. Il en est de même pour le personnel d’Exxo, l’entreprise qui exploite le pétrole de Doba au sud du Tchad.
Les heures à venir seront décisives
Les informations restaient très contradictoires à la mi-journée. Des rumeurs persistantes à N’Djamena faisaient état d’une colonne de rebelles qui se rapprocherait de la ville. Des sources militaires françaises à Paris ont confirmé qu’à midi une cinquantaine de véhicules se trouvaient à environ 250 Km au sud de la capitale aux alentours de Massénya. Pour sa part, le gouvernement tchadien se montrait soucieux de communiquer dès ce matin. Le ministre de la défense Bichara Issa Djadallah affirme que la ville de Mongo est sous le contrôle de l’armée qui, grâce à deux hélicoptères, a pu attaquer les positions rebelles vers Bitkine à 60 Km à l’ouest de Mongo. « Les généraux Alifa Weddeye, commandant de la région militaire d’Am Timane et Mongo, ainsi que le général Kalemi, commandant du Chari Baguirmi sont arrivés à 19 heures hier soir (mardi) à Mongo », a-t-il déclaré. Ce sont ces troupes tchadiennes venues depuis Haraz Mangueigne, où a eu lieu l’incursion des rebelles du FUC dimanche, qui sont reparties pour prendre à revers les rebelles.
Pour sa part la rébellion, via son porte-parole officiel, contredit ces informations et affirme que les capacités du mouvement sont entières et que les troupes n’ont pas été dispersées. La situation est en tout cas incertaine selon de nombreuses sources militaires. « Tout va dépendre de la motivation des troupes à la solde de Déby qui semble très motivées pour en découdre », estime un colonel. Même diagnostic du côté de l’état-major français qui a déclaré ne pas intervenir si ce n’est dans les transports de troupes tchadiens et les renseignements aériens. Une chose est sûre, les heures à venir seront décisives pour l’équilibre des forces.
par Stéphanie Braquehais
Article publié le 12/04/2006 Dernière mise à jour le 12/04/2006 à 17:16 TU
