Eglise catholique
Benoît XVI : pèlerinage en Pologne
(Photo : AFP)
De notre correspondant à Rome
Au regard de l’histoire, les symboles sont souvent plus éloquents que les longs discours. L’élection en 1978 d’un Pape polonais résonna comme un coup de tonnerre pour les régimes communistes et ouvrit une brèche dans le Rideau de fer. L’élection l’an passé d’un Pape allemand pour lui succéder avait les allures d’un affranchissement pour une nation, la nation allemande, lourde des terribles fautes du XXème siècle. A cet égard, le voyage que Benoît XVI entame en Pologne pourrait marquer un tournant.
Car si Jean Paul II s’était distingué dans l’épiscopat polonais par son rejet total de tout antisémitisme, son successeur s’inscrit parfaitement dans ce sillage. Non seulement, parce que Benoît XVI a conscience, en tant qu’Allemand et en tant que catholique, de la nécessité de rendre hommage aux victimes du nazisme. Mais aussi parce que, théologiquement, il est soucieux de reconnaître la parenté spirituelle qui lie le christianisme au judaïsme. Aller, comme il le fera dimanche prochain, se recueillir au camp d’Auschwitz sera pour lui une façon d’honorer ces deux démarches. Pour les survivants de
S’affranchir du poids médiatique de son prédécesseur
Auparavant, le Pape aura sillonné
On pourrait penser que l’ombre portée du grand pape polonais pèse encore sur son successeur. « C’est se tromper sur l’attente réelle des Polonais pour cette visite. Ce sera peut-être une surprise pour les observateurs de l’étranger, mais vous verrez, ils seront nombreux », nous confie Stefan Vilkanowiscz, président de la fondation Znak à Cracovie. La foule incessante qui chaque semaine vient à Rome écouter Benoît XVI place Saint-Pierre en témoigne. Le nouveau Pape s’affranchit peu à peu du poids médiatique de son prédécesseur et, à cet égard, ce voyage pourrait en être une démonstration.
La droite intégriste se moque des rappels à l’ordre de l’épiscopat
Attendu, le Pape le sera d’autant plus qu’après la disparition de Jean Paul II, les contradictions de l’église polonaise sont apparues au grand jour. Sur des thèmes sensibles comme l’adhésion à l’Union européenne ou la condamnation de l’antisémitisme, personne n’osait contredire le Pape défunt. Depuis, la droite intégriste se moque des rappels à l’ordre de l’épiscopat. Le courant ultra conservateur, catalysé par la puissante Radio Maryja, a trouvé une sorte de consécration avec l’arrivée au pouvoir des frères Kaczinski et du parti Droit et Justice qu’il a soutenu. Cette implication directe de l’Eglise dans la politique est très peu appréciée par Benoît XVI, et les propos violemment antisémites de cette radio ont amené le Vatican à un rappel à l’ordre. Un rappel resté, jusqu’ici, sans effet.
Les propos que tiendra Benoît XVI n’en seront scrutés qu’avec plus d’attention. Le Pape vient dire aux catholiques polonais qu’il y a un « après Jean Paul II » et que, dans la défense de l’identité chrétienne de l’Europe (un de ses thèmes de prédilection), la Pologne, l’un des rares bastions catholiques dans cette partie du continent, garde un rôle de premier plan.
par Laurent Morino
Article publié le 25/05/2006 Dernière mise à jour le 25/05/2006 à 11:56 TU