Tchétchénie
Le chef des rebelles tchétchènes abattu
(Photo: AFP)
Abdoul Khalim Saïdoullaïev a été tué lors d’un raid mené par les forces spéciales russes (FSA) et la milice de Rmazan Kadyrov, le Premier ministre pro-russe de Tchétchénie. Cette opération visait une maison d’Argoun, où le président autoproclamé des rebelles tchétchènes se trouvait en compagnie de plusieurs personnes. Saïdoullaïev et l’un de ses compagnons ont été abattus lors d’une fusillade. Trois autres rebelles ont été arrêtés. Les autorités de Grozny et les médias russes ont diffusé cette information dans la matinée du 17 juin. Des images du corps ont été diffusées à la télévision. Après quelques heures de silence, la rébellion tchétchène a implicitement confirmée le décès de son chef par la voix du «ministre des affaires étrangères», en exil à Londres, Akhmed Zakaïev. Celui-ci a, en effet, déclaré à la radio russe : «On peut dire qu’à partir d’aujourd’hui le président est Dokou Oumarov [ancien vice-président]».
Ramzan Kadyrov a fait part de sa satisfaction après l’annonce de la mort de Saïdoullaïev : «Les terroristes ont pratiquement été décapités, ils ont reçu un coup dont ils ne se relèveront pas». Le président pro-russe, Alou Alkhanov, s’est lui aussi réjoui de la mort de celui qu’il a qualifié de «bandit» responsable avec «ses complices de la mort de nombreux civils». Il estime même que «sa liquidation montre que la fin des terroristes viendra en Tchétchénie».
La rébellion est-elle réellement affaiblie ?
La mort de Saïdoullaïev ne devrait pourtant pas remettre en cause l’existence de la rébellion tchétchène dont le pivot reste le chef de guerre Chamil Bassaïev, responsable notamment de la prise d’otage de Beslan. C’est d’ailleurs ce dernier qui avait annoncé, le 10 mars 2005, la désignation de Saïdoullaïev pour succéder à Alan Maskhadov. Ce choix avait provoqué une certaine surprise car le nouveau président indépendantiste était peu connu, même s’il était présenté comme l’un des proches de son prédécesseur et occupait la fonction de «chef du tribunal suprême de la charia» au sein des instances indépendantistes.
Depuis sa nomination à la tête de la rébellion, Saïdoullaïev avait fait peu parler de lui. Et des informations contradictoires circulaient sur sa personnalité. Décrit par certains comme un homme plutôt ouvert, proche de la ligne modérée de Maskhadov, il était dépeint par d’autres comme un fondamentaliste, partisan de la guerre sainte contre l’occupant russe et proche des mouvements terroristes internationaux.
Dans tous les cas, Saïdoullaïev ne disposait pas de la légitimité de son prédécesseur Alan Maskhadov, qui avait été élu en 1997 lors d’un scrutin organisé sous la surveillance de l’Organisation de la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Il n’avait vraisemblablement pas non plus une véritable autorité sur les commandants de la rébellion, contrairement à Chamil Bassaïev. Les déclarations des autorités pro-russes de Grozny sur l’impact de l’élimination d’Abdoul Khalim Saïdoullaïev en terme d’affaiblissement de la rébellion semblent donc relever de la propagande plus que de l’analyse des forces sur le terrain. Tout comme la nomination immédiate de son successeur marque la volonté des rebelles de montrer que leur mouvement n’est pas décapité.
par Valérie Gas
Article publié le 17/06/2006Dernière mise à jour le 17/06/2006 à TU